23 novembre 2009

My Best of : Films-catastrophe

A l'occasion de la sortie universelle et de ma délectation individuelle pour 2012, voici dans l’ordre alphabétique une liste subjective de mes 10 (et quelques) films-catastrophe préférés. Si le film-catastrophe est par définition un film de distraction (« entertainment movie » ou « popcorn movie »), quelques-uns de ses chefs-d’oeuvre, comme on le voit ci-dessous, repoussent ce qualificatif jusqu’à son opposé extrême (« depression movie ») et peuvent vous foutre le bourdon pour des jours. Moi, j’aime les uns comme les autres…


The day after tomorrow / Le jour d’après (Roland Emmerich, 2004)
Le changement climatique y plonge la Terre (et New-York) dans un chaos indescriptible mais très cinématographique. Le message écologique donne au film un petit supplément de responsabilité qui n’est pas commun dans les films-catastrophe hollywoodiens mais ce n’est bien sûr pas pour ça qu’on a vu le film : c’est pour le savoir-faire d’Emmerich dans la composition de scènes de désastres naturels, qui reste inégalé (sauf par lui-même dans 2012). De la banquise qui se fissure au gel subit de la planète, en passant par le raz-de-marée sur Manhattan, les tableaux grandioses se succèdent avec enthousiasme. Et si les clichés scénaristiques sur la famille, les élus et les damnés abondent, c’est dans la nature-même du genre. On regrettera quand même quelques loups en CGI vraiment trop voyants, mais c'est chipoter.


The day the Earth caught fire / Le jour où la Terre prit feu (Val Guest, 1961)
Un excellent film britannique en noir et blanc avec un scénario assez original : à la suite d’une série d’explosions nucléaires, la Terre se rapproche du Soleil, chauffe et menace de se consumer. Avec une économie de moyens qui bénéficie au réalisateur, obligé de se concentrer sur le drame humain vécu par quelques personnages (notamment un journaliste qui couvre la catastrophe pour un journal londonien), le film possède une tournure documentaire qui continue à impressionner aujourd’hui. Les vues des rues et des parcs de Londres, devenus fournaises, se vidant peu à peu de la population font – paradoxalement - froid dans le dos. Une grande réussite du film-catastrophe (sur le mode sérieux), malheureusement trop méconnu, et qui rappelle évidemment les inquiétudes des années 1960 concernant la prolifération nucléaire.



A night to remember / Atlantique, latitude 41 (Roy Ward Baker, 1958) &
Titanic (James Cameron, 1997)
Film de tous les superlatifs, Titanic de Cameron, malgré ses nombreux défauts et mièvreries, reste un exaltant moment de cinéma-catastrophe (et d’effets spéciaux) dès lors que le paquebot approche de l’iceberg. Mais c’est A night to remember, que Cameron a pillé sans scrupule, qui demeure le meilleur film jamais réalisé sur le Titanic. Tourné dans un noir et blanc qui lui assure son aspect documentaire et écrit avec l’assistance de Walter Lord, l’historien spécialiste de la tragédie, ce film britannique raconte sans négliger aucun détail l’avant, le pendant et l’après du naufrage. Baker met en scène avec beaucoup de subtilité le drame individuel et collectif des passagers tout en offrant des images saisissantes et élégiaques de l’intérieur du navire qui coule. C’est l’un de mes films préférés, tous genres confondus.


The Poseidon adventure / L'Aventure du Poséidon (Ronald Neame, 1972) &
Poseidon (Wolfgang Petersen, 2006)
L’aventure du Poséidon a donné au film-catastrophe ses lettres de noblesse en 1972 (après Airport, qui était plus un mélodrame) et reste encore, près que quarante ans plus tard, l’un des meilleurs. Le suspense de l’histoire, les effets spéciaux mécaniques, les décors saisissants du paquebot retourné et les acteurs chevronnés qui réussissent à apporter une émouvante épaisseur à leurs personnages stéréotypés permettent au film d’atteindre un équilibre entre frisson et émotion que le genre semble aujourd’hui avoir perdu. Enfant, l’affiche du film a longtemps orné un mur de ma chambre : c’est aussi peut-être pour cela qu’il me tient particulièrement à cœur. En 2006, le remake de Petersen, sans égaler l’original, a privilégié l’action pure et a rempli sa mission avec panache, malgré les critiques assassines qui l’ont accueilli.


On the beach / Le dernier rivage (Stanley Kramer, 1959)
Comme d’habitude chez Kramer, le meilleur côtoie le pire dans ce film d’un rare pessimisme où quelques personnages attendent l’arrivée d’un nuage radioactif mortel sur l’Australie. Le meilleur, c’est la science du cadre large et du noir et blanc. Le pire, c’est la lourdeur démonstrative et de jeu de certains acteurs (Astaire, Perkins). Mais le sentiment désespéré qui imprègne tout le film reste impressionnant après un-demi siècle et certains moments sont de splendides moments de mise en scène : la marche d’Ava Gardner sur le quai devant les marins, l’arrivée du sous-marin dans le port presque désert de San Francisco, la recherche de l’émetteur du signal morse, le dernier profil d'Ava Gardner (à mon avis, elle n'a jamais été plus belle que dans ce film), les toutes dernières images. Et l’utilisation du magnifique "Waltzing Matilda" comme illustration musicale provoque, à chacun de ses passages, un réel pincement au cœur.


San Francisco (W.S. Van Dyke, 1936)
Seule la dernière demi-heure appartient proprement au genre du film-catastrophe, mais quelle demi-heure ! Le tremblement de terre et l’incendie de San Francisco (1906) sont reconstitués de façon très spectaculaire sur les immenses plateaux de la MGM et exaltés par une formidable science du montage, évidemment influencée par le cinéma soviétique. Les trois premiers quarts du film mêlent mélodrame, musical et opéra (quel panachage !) mais contiennent une tension palpable due au fait que le spectateur qui découvre le film attend les premières secousses sans savoir quand elles vont arriver. Certains détestent l’outrance lyrico-mystique de la dernière séquence mais je trouve pour ma part qu’elle obéit bien à la loi du film-catastrophe et de l’époque et qu’elle conclut parfaitement ce film étonnamment hybride, l’une des premières grandes réussites du genre.


Testament / Le dernier testament (Lynne Littman, 1984)
Ce film est sans doute le plus sombre et déprimant jamais réalisé dans ce sous-genre du film-catastrophe : le film d’extinction. C’est ce qui doit expliquer la négligence avec lequel il est traité dans les papiers sur le sujet et l’oubli public dans lequel il est tombé. Réalisé par une femme (c’est important : le ton a une sensibilité toute féminine), il raconte sans aucun recours aux effets spéciaux les conséquences d’une attaque nucléaire distante sur une famille d’une banlieue bourgeoise californienne. Le père, parti travailler en ville le matin, est sans doute mort le premier. A la suite des retombées radioactives, ses enfants puis sa femme (bouleversante Jane Alexander) s’éteignent les uns après les autres, dans leur décor quotidien inchangé. Un film désespéré et inoubliable qui choisit d’analyser la désintégration psychologique et physique d’une famille confrontée à sa disparition certaine.


The towering inferno / La tour infernale (John Guillermin, 1974)
Avec L’Aventure du Poséidon, le second pilier historique du genre. Je me rappelle l’avoir vu sur très grand écran au cinéma, lors d’une ressortie d’été, et d’avoir physiquement ressenti des vagues de chaleur ! C’est à mon avis (malgré mon attachement pour le Poséidon), le modèle insurpassable du film-catastrophe pré-CGI, avec son scénario codifié et efficace, son casting royal, ses décors rutilants puis ravagés et ses effets spéciaux à la fois artisanaux et démesurés. Personne ayant vu le film n’a pu oublier la scène des amants pris au piège des flammes, de l’ascenseur extérieur ou du sauvetage en nacelle entre les deux tours. Je crois même me souvenir que le film avait provoqué à sa sortie l’introduction de modifications dans les règles de sécurité sur les bâtiments de grande hauteur. Son titre lui-même est entré dans la mémoire collective et le prononcer réussit toujours à provoquer un délicieux petit frisson.


United 93 (Paul Greengrass, 2006)
Je classe ce film dans le genre du film-catastrophe même si il y est bien trop à l’étroit. L’éprouvant réalisme du film, dû à l’intelligence du scénario, à la justesse des acteurs et à la maîtrise de la réalisation, dépasse de loin les normes du genre auquel il est pourtant rattaché par de nombreux points : microcosme en péril, univers clos, tension croissante. Le film s’arrête au moment précis de l’impact au sol de l’avion détourné, nous laissant avec nos images mentales des images réelles et obsédantes du 11 septembre. Un film cathartique et passionnel qui est aussi une expérience sensorielle insupportable pour beaucoup. Si United 93 est bien du cinéma, les terribles images du 11 septembre ne sont-elles pas les images définitives (au moins jusqu’à aujourd’hui) du plus grand film-catastrophe qu’on puisse imaginer ?



When the wind blows (Jimmy Murakami, 1986)
J’ai récemment découvert ce bouleversant long-métrage d’animation britannique qu’on peut rapprocher de Testament, cité plus haut. Ici aussi, des anonymes subissent les effets des retombées d’une attaque nucléaire. C’est un couple de petits retraités dans la campagne anglaise. Ils se préparent à des moments difficiles en suivant à la lettre les instructions que leur donne la BBC. Puis l’électricité est coupée, l’isolement devient total, ils tombent malades et meurent. La transition progressive entre la combativité au début, leur incompréhension au milieu et leur résignation à la fin rythme les trois sections du film. La catastrophe, lointaine, est seulement suggérée, mais ses effets sur ces deux charmants petits vieux lui donne une résonance universelle. Un film qui commence avec pas mal d'humour pour finir dans une infinie tristesse.



When worlds collide / Le choc des mondes (Rudolph Maté, 1951) &
2012 (Roland Emmerich, 2009)
Produit par le génial George Pal, Le choc des mondes m’impressionna dans mon enfance quand je l’ai découvert à la télé, au point d'aller parfois scruter le ciel d’été pour essayer d'apercevoir Bellus et Zira s’approchant de la Terre. Sa naïveté me fait aujourd’hui sourire mais j’ai gardé une grande tendresse pour lui. Son remake inavoué, le superlatif 2012 d’Emmerich (encore lui) pousse le film-catastrophe vers des outrances jamais vues jusqu'ici. Les effets spéciaux digitaux actuels permettent tous les excès, péché mignon du réalisateur. De la Californie détachée qui plonge en cinq minutes dans le Pacifique à l’Himalaya balayé par un tsunami, tout est désormais possible et montré, pour notre plus grand plaisir. Peu importe l’idiotie de l’ensemble, on s’accroche au fauteuil pendant 2h40... et on en redemande. Les américains ont inventé un nouveau qualificatif spécialement pour le film : « Disaster Porn ». De la sensation pure sans aucune émotion : on est loin du Poséidon et c’est assez bien vu.

9 commentaires:

  1. Excellente idée que ce post consacré aux films-catastrophe... J'y découvre un titre que j'ignorais, "When the wind blows", qu'il me tarde vraiment de découvrir !... Mon préféré dans le lot reste "A Night to Remember", suivi de près par "La Tour Infernale", celui qui, selon moi, équilibre le mieux spectaculaire et émotion... Merci Tom !...

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  2. Merci pour ton commentaire, bbjane.

    "When the wind blows" est vraiment excellent et très créatif sur le plan visuel comme tu verras (le film est dispo en DVD Z2 UK, de très bonne qualité). Et cerise sur le gâteau, Bowie a écrit une chanson pour le film. C'est le film d'animation le plus désespéré que je connaisse, avec "Le tombeau des lucioles" qu'on ne présente plus et "The plague dogs", un autre chef-d'œuvre de l'animation anglaise.

    Oui, "A night to remember" dépasse tous les autres de la liste, on est d'accord. Mais je pense que "L'aventure du Poséidon" l'emporte sur "La tour infernale" quant à l'équilibre action-émotion. La mort de Shelley Winters, quand même !

    Bien à toi
    TP

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  3. "Pas cette femme .... pas cette femme ..."

    Contrairement à La Tour Infernale ou à Airport, Poséidon me déprime profondèment à cause de tous ces morts. J'en conclus que je ne suis pas un vrai amateur de films catastrophes.

    Attention spoiler,

    Je dois être sentimental : dans 2012 j'aurais tellement aimé qu'on sauve non seulement le chien mais encore en plus la poule russe. "Pas cette femme .... Pas cette femme" bis.

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  4. Merci, Jacques, pour cette petite piqure de rappel !

    L’aventure du Poséidon reste à tout jamais le film-référence…je reconnais bien volontiers que l’appréciation est amplement filtrée par la magie de mes souvenirs ! J’ai vu le film en 1973, dans un cinéma de Pointe-à-Pitre. Ambiance garantie. Parmi toutes les émotions qui sont demeurées intactes, la musique de John Williams bien sur, la scène du sapin, la mort de Shelley Winters, celle d’Hackman, etc.…Et puis il y avait Stella Stevens ! L’idée de couvrir l’ex playmate (janvier 1959) d’une simple chemise d’homme, m’allait alors droit au cœur : sa petite culotte, complaisamment dévoilée dans les nombreuses contre-plongées, est vite devenue pour le garçon de douze que j’étais, le personnage principal du film…
    Mais depuis 1973, j’ai naturellement revu le film plusieurs fois et je suis toujours impressionné, autant par la qualité de l’enchainement des épisodes – on ne s’ennuie jamais, à la différence de certaines scènes bavardes de La tour infernale – que par l’aventure humaine de cette petite communauté de rescapés. Rarement un film catastrophe a su offrir une telle consistance à ses personnages. Outre la confrontation Hackman-Borgnine, les quatre tandems amoureux ou conjugaux apparaissent comme autant d’allégories des âges de la vie et des sentiments. Poséidon de Petersen ? Des effets spéciaux numériques et des personnages transparents, ou l’inverse ? Une catastrophe tout court !

    Pour Le Testament, film que je ne connais pas, je me propose d’accompagner cette découverte réjouissante d’une bonne bouteille de Beaujolais! A bientôt, Jacques ! François

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  5. @francesco : "Pas cette femme... pas cette femme". Voilà il me semble une réplique qui serait bien à sa place dans un livret de Grand Opéra, non ? Quel baryton lui ferait un sort ?

    @françois : t'imaginer trépigner devant la petite culotte de Stella Stevens dans un cinéma de Pointe-à-Pitre m'évoque irrésistiblement Fellini. :)

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  6. Féru de Roger Waters dans ma jeunesse, j'ai longtemps rêvé de voir When the wind blows et puis j'ai déchanté quand j'ai découvert un lourd
    film anti-atomique.

    Sinon, je trouve sans intérêt le film-catastrophe façon Irwin Allen mais je pense que L'incendie de Chicago de King mériterait sa place au milieu des films que tu cites.

    et si La guerre des mondes de Spielberg peut-être considéré comme relevant du genre alors que c'est peut-être le meilleur qu'il m'ait été donné de voir.

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  7. @Christophe : Je n'ai pas pris When the wind blows comme un film anti-atomique seulement mais plutôt comme un film sur l'effacement (comme Testament d'ailleurs). C'est ce qui fait sa force , sa triste poésie. Et je te trouve bien sévère, "lourd" n'est pas un adjectif que je collerais à ce film d'animation qui est au contraire tout en nuance (les moments dans la cuisine, les scènes de dialogue qui n'ont aucune importance entre les deux vieux, mais qui deviennent essentiels parce que c'est la dernière fois qu'ils parleront du thé ou de leur jardin).

    J'ai hésité entre San Francisco et In old Chicago en effet mais je préfère la réalisation de la scène de catastrophe du premier ainsi que ses acteurs alors la balance a penché de ce côté.

    Quant au formidable La guerre des mondes de Spielberg, je le réserve pour un autre billet sur les films de monstres, comme Cloverfield.

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  8. "Pas cette femme... Pas cette femme" certes, mais parlant des répliques immortelles, est-ce qu'on ne retiendra pas de 2012 le déjà presque classique "Papa je ne mets plus de couche". Je ne sais pas, je m'interroge.

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  9. "Papa je ne mets plus de couche" : ça expliquerait l'inondation ?

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