3 avril 2016

Films vus par moi(s) : avril 2016


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Les Mille et Une Nuits / Arabian Nights (John Rawlins, 1942) **
Le premier des six films réunissant Maria Montez et John Hall possède le charme des livres d'images. Dans un décor de matte paintings et de sable, la lutte du Calife de Bagdad contre son frère pour les beaux yeux de Shéhérazade est prétexte à de l'action et de l'humour bon enfant avec les prémices du camp qui culminera dans le sublime "Cobra Woman" (Siodmak, 1944). Mais le triomphe appartient au Technicolor Kalmus, une merveille. BR Fr

Au coeur de l'océan / In the heart of the sea (Ron Howard, 2015) 0
L'histoire du fait divers baleinier dont s'est inspiré Herman Melville pour écrire "Moby Dick". Comme d'habitude chez Ron Howard, c'est réalisé de façon linéaire et mécanique, sans vision autre que celle d'illustrer. D'une aventure puissamment symbolique, il reste donc une suite d'images (abusant des CGI) à laquelle il manque l'étincelle qui lui donnerait vie. Un film industriel qu'on regarde sans aucune implication physique ni émotionnelle. BR Fr  

Le corps et le fouet / La frusta e il corpo (Mario Bava, 1963) **
Dans un manoir néo-gothique de bord de mer, une famille est hantée par le spectre d'un fils sadique désiré par sa belle-soeur masochiste. D'une histoire risible, Bava tire un film plastiquement splendide aux décors hammériens et tout en ombres contrastées Technicolor. Les thèmes de la nécrophilie et du désir déviant sont traités de façon opératique, portés par Christopher Lee, Daliah Lavi et une bande son d'un lyrisme échevelé. Baroque à mort. BR US 

Star Wars : Le réveil de la Force / Star Wars: The Force awakens (J.J. Abrams, 2015) *
* pour le plaisir de revoir Carrie Fisher en Leia de 60 ans (la voix marquée par les excès), furtivement Mark Hamill en Luke de 65 ans, tous les deux sans doute contents d'être là (Harrison Ford, je m'en fous) et le mignon petit robot sphérique. Autrement, ce remake pour la jeune génération de La Guerre des Etoiles de 1977 n'a ni charme, ni conflit et une actrice exécrable (Daisy Ridley) en fade héroïne. Un pur produit de consommation. BR Belg

Happy people: A year in the Taiga / Happy people - Ein Jahr in der Taiga (Dimtry Vasyukov & Werner Herzog, 2010) **
A partir d'un documentaire russe de 4h, Herzog a monté et commenté 90' sur les quatre saisons de quelques trappeurs et de leurs chiens d'un village au bord de l'Einisseï, au milieu de la Sibérie. Son commentaire en anglais, à l'accent d'un inimitable lyrisme, transforme le quotidien de ces hommes sages en une aventure millénaire soumise au dictats de la Nature. Un film simple, lumineux et universel qui nous remet à notre juste place. BR Allem

La légende de Beowulf / Beowulf (Robert Zemeckis, 2007) **
Le poème épique anglo-saxon du guerrier qui combat un monstre humain, sa mère et un dragon inspire ce film en Motion Capture CGI, un choix déroutant (les personnages ont des yeux inexpressifs, comme aveugles) typique de Zemeckis. Pour le reste, c'est de l'Héroïc Fantasy assez réussie avec ce qu'il faut de violence, de feu et de nudité (Beowulf - Ray Winstone - aime se mettre pudiquement à poil et la mère - Angelina Jolie - aussi). BR Fr

Bambi (Walt Disney / David Hand, 1942) ***
Revoir Bambi a confirmé que son histoire et sa construction savent marquer à jamais l'enfant qu'on a été. Tout l'essentiel d'une vie y est dit en 1h10, sans fioriture ni solennité. La grâce des biches et des cerfs est merveilleuse et les séquences dynamiques de la seconde partie (le duel, les chiens, l'incendie...) comme l'introduction panoramique sur la forêt, sont parmi ce que Disney a fait de mieux. C'est le plus simplement naturel de ses films. BR Fr

Nouveau souffle / Atmen / Breathing (Karl Markovics, 2011) *
Un garçon asocial de 19 ans incarcéré dans un centre pénitentiaire fait un stage dans une morgue de Vienne et amorce sa réinsertion. Si les conditions du stage sont peu communes, le chemin vers la lumière de ce jeune homme troublé (Thomas Schubert, très bien) est jalonné de clichés que la réalisation austère mais précise (Autriche oblige) travaille un peu trop à maquiller. Au final, un film calculé où l'émotion est tenue à distance artificiellement. BR UK

Love (Gaspar Noé, 2015) *
Vue à travers une succession de flashbacks, la relation toxique entre un américain à Paris et sa compagne. L'Amour du titre, et c'est le problème du film, n'est en aucun moment sensible entre les deux personnages que seul le Sexe semble animer. La mise en scène et l'utilisation de la 3D sont remarquables - d'où * - mais après un début intrigant, la répétition s'installe avec l'ennui. Long, vain et prétentieux (ces autocitations de Noé !). BR 3D Fr

A la poursuite de demain / Tomorrowland (Brad Bird, 2015) 0
Je ne peux pas en dire grand chose, ayant laissé tomber au bout d'1h (sur 2h10). Un gamin des Fifties et une ado contemporaine accèdent à une ville du futur qui ressemble à un parc d'attraction Disney. C'est un film Disney justement, plein d'allers-retours entre hier, aujourd'hui et demain, de voltiges dans les airs, de tours dans le ciel et d'yeux écarquillés. Il y a George Clooney qui cachetonne et le tout n'est pas pour moi, mais alors pas du tout. BR UK

M (Joseph Losey, 1951) *
Ce remake américain du classique de Fritz Lang transpose l'histoire d'une chasse au tueur d'enfants de l'Allemagne de Weimar au Los Angeles de 1950. Si les décors urbains, la photographie et la mise en scène aux superbes cadrages sont exceptionnels, le film est plombé par le jeu désespérément surjoué de la plupart de ses acteurs (les enfants, eux, sont très naturels). Un bon film blessé par sa direction d'acteurs défaillante. BR Fr

Le fils de Saul / Saul fia (Laszlo Nemes, 2015) ***
En 1944, le membre d'un Sonderkommando de Birkenau tente d'enterrer dignement un jeune garçon gazé. La caméra qui suit en plans séquences le personnage (Geza Röhrig, dans une performance intense) en maintenant hors focus tout ce qui se passe autour de lui (mais qui capture les sons effroyables), évoque avec une force ténanisante l'enfer du processus d'extermination. L'expérience est éprouvante mais le film est essentiel. BR Fr 

Azul y no tan rosa / My straight son (Miguel Ferrari, 2012) 0
Hésitant entre comédie et drame, ce film vénézuélien qui descend d'Almodovar rate son sujet en s'éparpillant dans les clichés. A Caracas, un photographe (gay) reçoit son fils adolescent (hétéro) qui vit avec sa mère à Madrid. Ils apprennent à se connaître. On a droit à tout : la copine trans, la scène d'opéra (ridicule), l'agression homophobe, les engueulades, les embrassades et le tango... Le jeune acteur, lui, est très bien. BR UK

Made in France (Nicolas Boukhrief, 2015) ***
A Paris, un journaliste infiltre une petite cellule djihadiste en formation et se retrouve impliqué dans un projet d'attentat. Le choix d'une structure et d'un rythme de thriller (réussi) évite les écueils du film à thèse mais les événements de janvier et novembre 2015 lui donnent une puissante résonance. Malgré des situations un peu précipitées et le jeu approximatif de certains acteurs, son sujet brûlant surclasse son statut de film de genre. BR Fr

All things must pass (Colin Hanks, 2015) **
De 1960 à 2009, le triomphe et la chute de Tower Records, la chaîne de magasins de disques au logo rouge et jaune. Ce documentaire dresse le panorama connu de l'industrie du disque du 33 tours à Internet à travers l'histoire d'une enseigne qui en fut la vitrine. Avec d'intéressantes (et émouvantes) images d'archives et interviews du fondateur Ross Salomon, d'employés et clients (dont Elton John et Bruce Springsteen). La nostalgie... BR US

3 commentaires:

  1. Bonjour Tom,

    Je suis d'accord avec toi au sujet de "Love". Ma première grande déception car jusqu'à ce jour, enfin même si j'ai tout de même des réserves sur "Enter the void", j'étais très fan du cinéma de Noé. J'adore "Seul contre tous", "Carné", et "Irréversible" (surtout parce que l'émotion jaillit dans le final grâce à la construction inversée, et puis c'était une séance inoubliable, je l'ai vu le jour de sa sortie en 2002 dans une salle clairsemée, les gens ne supportant pas le film et évacuant la salle en courant au bout de vingt cinq minutes pour me retrouver seul à l'avant avant dernier rang avec deux gamines qui ne devaient pas avoir bcp plus que 18 ans).

    Le film est construit autour de deux personnages dont l'interprétation m'a agacé. Pas vraiment de symbiose, une voix off qui devient très pénible là où le silence aurait dû s'imposer. Un jeu très limité et au final peu d'émotions. C'est vraiment dommage car en choisissant pourtant de tourner avec des inconnus ou des acteurs non pro (ou en tout cas débutants), il avait tapé très juste et très fort avec ses premiers films : il y avait bcp plus de spontanéité, c'était très écrit -le monologue intérieur du boucher- mais il y avait aussi l'entrain et ce côté génial d'écouter et de voir des gens parler avec leur langue plutôt qu'un texte trop travaillé. Un côté Célinien dans le travail sur la petitesse, l'étroitesse d'esprit, la description d'un petit monde, avec ses souffrances et un final incroyable pour "Seul contre tous"

    Avec "Love" il joue moins la carte de la provocation et de la violence mais davantage celle du poseur. Et c'est la première fois que je le ressens (la scène de la partouze dans le club échangiste n'a aucun intérêt par exemple, avec que la scène du Love Hotel avait quelque chose de plus physique et sensoriel dans "Enter tHe Void". ).

    Un essai qui m'a paru bcp plus platonique au final que passionnel, peu d'émotions, un jeu limité mais une belle photo. C'est peu.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Jordan, je n'ai pas vu Enter the Void qui ne me tente pas vraiment. J'aime beaucoup Seul contre tous, Carne et Irréversible aussi. Love, en y repensant, me semble creux avec des choix de scènes à rallonge sans intérêt et cette voix off qui sonne faux. C'est dommage parce que la mise en scène (montage, couleurs...) est bien. Ma partie préférée est celle de la presque fin, lors de leur rencontre aux Buttes Chaumont, là c'est très réussi.

      Supprimer
  2. Ah, je ne savais pas que le Herzog était un montage réduit, merci pour l'info...

    RépondreSupprimer