2 mars 2018

Films vus par moi(s) : mars 2018


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Les loups dans la bergerie (Hervé Bromberger, 1960) *
Dans les Alpilles, trois malfrats en cavale se réfugient dans un centre de rééducation pour jeunes délinquants. Un étonnant film où la mise en scène peu inspirée (sauf en trois-quatre occasions), les dialogues médiocres, le jeu exécrable des acteurs dont Pierre Mondy ridicule en gangster n'arrivent pas à couler l'intéressant sujet et surtout l'homoérotisme invraisemblable de certaines séquences, dignes d'un proto-porno gay. Une vraie curiosité. BR FR

Sing Street (John Carney, 2016) **
En 1985 à Dublin, un garçon monte un groupe à la hâte pour impressionner la fille qui lui a tapé dans l'oeil. Un coming of age movie musical très chouette dont le charme et le message positif se déploient au rythme des chansons originales typées Pop 80's qui dessinent les fêlures et la résilience des personnages. Ferdia Walsh-Peelo (aux airs d'un Tom Cruise ado) et Lucy Boynton (totalement craquante) crèvent l'écran et iront sans doute loin. BR FR

Le complexe de Frankenstein (Alexandre Poncet & Gilles Penso, 2015) ***
Un panorama de l'art des créateurs des monstres de cinéma, de Méliès aux CGI. Un passionnant documentaire qui laisse la parole à des géants du maquillage et des effets spéciaux des années 70-80, qui ressortent leurs modèles des réserves. Derrière le professionnalisme et la passion perce l'amertume d'avoir été balayés par le numérique depuis "Terminator 2" (1991) et "Jurassic Park" (1993). Ou l'âme au défi de la technique. BR FR

Ready Player One (Steven Spielberg, 2018) ***
En 2045 à Colombus, Ohio, le créateur d'un univers virtuel qui a remplacé Internet meurt en laissant sa fortune et son savoir à l'usager qui trouvera un Easter Egg. Une débauche de CGI, d'action hypertrophiée, d'images folles et de références à la culture pop (surtout Eighties) emporte ce film de SF visuellement très impressionnant et loin d'être idiot dans son scénario. Quelques longueurs sur la fin n'entament pas le plaisir d'un spectacle total. Ciné 

A des millions de kilomètres de la Terre / 20 million miles to Earth (Nathan Juran, 1957) **
Une fusée de retour de Vénus coule près de la Sicile en laissant s'échapper une créature qui grandit à vue d'oeil et va semer la panique à Rome. Cette variation sur King Kong n'a d'intérêt que le monstre inventé par Ray Harryhausen, peut-être son chef-d'œuvre avec les squelettes de Jason. L'animation en stop-motion est vraiment superbe et l'idée de l'affrontement entre Forum et Colisée apporte une touche culturelle à cette série B pur jus. BR US

Les portes de la nuit (Marcel Carné, 1946) 0
Début 1945 à Paris, deux jeunes gens se rencontrent une nuit entre Barbès et Stalingrad. L'évocation du voisinage des résistants, des neutres et des collabos après la Libération était un sujet en or mais le scénario de Prévert, ampoulé de personnages allégoriques et de dialogues réalistes poétiques, donne au film une sorte de grandeur romantique forcée pas convaincante du tout. Yves Montand et Nathalie Nattier sont mauvais comme cochons. BR FR

Nocturnal animals (Tom Ford, 2016) ***
Une directrice de galerie de L.A. reçoit le manuscrit d'un roman de son lointain premier compagnon et en est retournée. Sur un scénario savant qui trame le présent, le passé et les péripéties du roman, Tom Ford réussit à créer une oeuvre à la fois esthétique et psychologique, glacée et stressante, élégante et crade. Amy Adams, Jake Gyllenhaal et Michael Shannon sont formidables. Avec un stupéfiant générique de début et une fin bouleversante. BR DE  

The assassin / Cikè nié yinniang (Hou Hsiao-Hsien, 2015) 0
En Chine médiévale, une jeune femme est poussée par sa tutrice à aller tuer le gouverneur de la région. Le réalisateur a le sens de la belle composition mais quel ennui mortel que ce film où les scènes sont étirées dans une affectation de chaque instant, les dialogues infantiles et l'ensemble d'un narcissisme infect. J'ai laissé tomber au bout de 45'. La critique enthousiaste et son prix à Cannes 2015 sont atterrants. Un navet dans du papier doré. BR FR

Trick 'r Treat (Michael Dougherty, 2007) 0
Un soir d'Halloween, plusieurs habitants d'une petite ville sont confrontés à un enfant tueur déguisé. Leurs quatre histoires se croisent dans cette sorte de film porte-manteau qui a pour lui une belle direction artistique et une ambiance bien évoquée de la fête d'Halloween mais le scénario s'enlise vite dans une sinuosité artificielle aux séquences inégales. L'impression finale est que le résultat est loin d'être à la hauteur du potentiel et des moyens. BR US

Manina, la fille sans voile (Willy Rozier, 1952) 0
Un étudiant engage un contrebandier pour l'aider à retrouver un trésor phénicien englouti près d'un phare corse. Un film nul avec son scénario, ses acteurs et sa mise en scène insipides. Les scènes de plongée et la jeunesse en maillot de bain sont assez étonnants pour l'époque. Mais le seul intérêt est Brigitte Bardot, 17 ans et dans son premier rôle. Elle apparaît en bikini après 45 minutes, adolescente qui annonce à peine la superstar à venir. BR UK

L'armée des ténèbres / Army of darkness (Sam Raimi, 1992) 0
Transportés en plein Moyen Age, un américain et sa tronçonneuse affrontent des morts-vivants. Les grimaces, gesticulations et anachronismes du Jim Carrey de série B qu'est Bruce Campbell forment le socle de cette comédie potache qui ne s'élève jamais du ras du sol. Les décors fantastico-médiévaux et les effets spéciaux sont chouettes mais l'impression de déconnade générale, sympathique hier, est éventée aujourd'hui. BR UK

La couleur de la grenade / Sayat Nova (Sergueï Paradjanov, 1969) **
La vie du poète arménien Sayat-Nova (1712-1795). En aucun cas un biopic mais une création surréaliste, succession de tableaux animés aux sujets pris dans la vie et l'oeuvre du héros national. Il n'y a pas grand chose à comprendre, juste à se laisser aller au rythme des compositions (et des sons) qui semblent inspirées par les enluminures médiévales. L'hermétisme de l'ensemble peut rebuter mais le geste artistique est admirablement mené. BR UK

La fille sans dieu / The godless girl (Cecil B. DeMille, 1929) **
Suite à une bagarre, deux jeunes gens en conflit (une athée et un chrétien) se retrouvent dans un camp de redressement sévère. Le dernier film muet de DeMille et celui des siens qu'il préférait est à la fois social, romanesque et moral. Les péripéties et la mise en scène riche en morceaux de bravoure (la rixe, le camp, l'incendie) sont d'un exaltant dynamisme et si Lina Basquette joue avec outrance, George Duryea a une modernité magnétique. DVD Z1 US

The Square (Ruben Östlung, 2017) **
En Suède, le directeur d'un musée perd le contrôle sur sa vie professionnelle et privée. Portée par l'interprétation de Claes Bang et une mise en scène sûre d'elle-même, cette satire du microcosme de l'art contemporain et surtout de la bonne conscience de l'élite intellectuelle européenne face aux migrants est trop longue (2h30) avec ses scènes disjointes. Mais le propos est féroce et la séquence du dîner des mécènes est extraordinaire. BR FR

Call me by your name (Luca Guadagnino, 2017) ***
L'été 1983 près de Crémone, un adolescent et le thésard que son père archéologue reçoit en résidence sont attirés l'un par l'autre. Sur un scénario de James Ivory, un coming of age solaire dont le seul conflit, traité de façon subtile et apaisée, est celui du trouble et de la réalisation du désir (gay ici en l'occurence). Tout est beau, sensuel et cultivé comme un idéal, jusqu'au puissant monologue du père. Timothée Chalamet est une révélation. BR UK

La terre qui meurt (Jean Vallée, 1936) **
En Vendée, un vieux fermier voit ses enfants partir l'un après l'autre. Sur une histoire typique de la littérature populaire fin de siècle, un mélodrame terrien dont la dignité académique est contrebalancée par le Naturalisme pictural des superbes scènes de plein-air dans les champs et marais et surtout par la magie de la couleur (c'est le deuxième film français en couleurs), dont le procédé Francita a été restitué par la restauration inédite du CNC. Cinémathèque Française

Les maris, les femmes, les amants (Pascal Thomas, 1989) 0
Quelques amis partent en vacances d'été avec leurs enfants sur l'île de Ré tandis que leurs épouses restent à Paris. Des critiques enthousiastes m'ont incité à voir ça. Hélas, cette chronique estivale rate son sujet prometteur : les marivaudages généralisés sont mis à terre par le choix du réalisateur de faire jouer ses comédiens en mode hystérique sur des dialogues surfaits. Sur un sujet proche, revoir plutôt "L'Hôtel de la Plage" (Michel Lang, 1978). DVD Z2 FR

Gabriel et la montagne / Gabriel e a montanha (Fellipe Barbosa, 2017) ***
En 2009, les 70 derniers jours d'un étudiant brésilien parti découvrir l'Afrique et mort sur une montagne du Malawi. Un film étonnant et émouvant, sorte de fiction-documentaire écrite et réalisée par un ami de Gabriel Buchmann à partir de photos et mails retrouvés. Le jeune idéaliste et sa copine sont joués par des acteurs (Joao Pedro Zappa et Caroline Abras, excellents), les autres personnages étant ceux-là mêmes que Gabriel avait croisés sur sa route. BR FR

Le sens de la fête (Eric Toledano & Olivier Nakache, 2017) 0
Un traiteur en fin de carrière (Jean-Pierre Bacri égal à lui-même) organise une fête de mariage dans le parc d'un château. Tout est fabriqué et prévisible dans cette comédie où chaque échange entre personnages ressemble à un mini-sketch dit par des acteurs en performance individuelle. On sourit parfois mais le vrai comique de situation nécessite une mécanique implacable, ce qui n'est pas le cas ici. Un film qui n'a pas volé sa déconfiture aux Césars. BR FR

Ca / It (Andy Muschietti, 2017) 0
En 1988 dans une petite ville du Maine, quelques enfants affrontent un clown démoniaque qui leur apparaît régulièrement. Le roman de Stephen King, déjà trop long, est adapté platement dans ce film interminable qui, une fois l'excellente première séquence passée, se traîne sur un mode répétitif entre tension et sursaut. La métaphore sur les peurs profondes de l'enfance est intéressante évidemment mais le film lui-même s'oublie aussitôt vu. BR DE