**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais
Presence (Steven Soderbergh, 2024) ***
Une famille de quatre s'installe dans une maison habitée par un fantôme. Du fantastique conceptuel par Soderbergh qui retourne les codes du film de maison hantée - un peu au formidable "Les Autres" - en filmant tout en caméra subjective du point de vue de la "présence" qui observe les nouveaux locataires. L'exercice de style fonctionne parfaitement en créant un sentiment de voyeurisme de plus en plus actif. Derrière la brillante idée de mise en scène, c'est aussi un beau film sur la famille et ses failles, qui laisse bien des choses ouvertes jusqu'à l'intrigant final. BR FR
Le tueur (Denys de La Patellière, 1972) **
Un vieux commissaire (Jean Gabin) s'oppose à son nouveau supérieur (Bernard Blier) sur la façon d'attraper un tueur en cavale. Un étrange film policier sur des gens qui ont tout vu dans un monde qui change vite. L'action est une poursuite linéaire dans un Paris 70s en mutation - chantier de la Tour Montparnasse et des Halles - qui fait disparaître l'ancien, celui du Gabin de la grande époque justement : c'est crépusculaire. Une autre étrangeté : l'érotisation du psychopathe (Fabio Testi sexy comme jamais) et la chanson finale qui sonne comme un blanc-seing. BR FR
Le Colosse de Rhodes / Il Colosso di Rodi (Sergio Leone, 1961) *
Venu se reposer à Rhodes, un militaire athénien se retrouve impliqué dans la lutte de rebelles contre le tyran de l'île. Ce peplum italien ambitieux dans son format de 2h20 et ses décors spectaculaires - l'extérieur et l'intérieur du Colosse - avait aussi pour lui son scénario solide et l'œil déjà aiguisé de Leone, dont c'était la première réalisation. Seulement, le film ne décolle que dans sa seconde partie pleine d'action, la première étant tuée par le jeu et l'anti-charisme de Rory Calhoun dans la rôle principal, aussi piètre acteur que présence. Une erreur de casting rédhibitoire. BR FR
L'étoile du silence / Der schweigende Stern / The silent star (Kurt Maetzig, 1960) **
Suite à la découverte d'un cylindre extraterrestre, une équipe internationale d'astronautes part pour Vénus pour rencontrer les Vénusiens. Un film de science-fiction est-allemand de la Guerre Froide sans doute trop bavard mais aux décors psychédéliques surcolorés et à la musique électronique plutôt pionniers. Le plus étonnant sont les personnages et le casting multiracial et le message limpide - en 1959 - sur les risques de l'escalade nucléaire et la nécessité d'une fraternité universelle. Dans les pays de l'Est, la science-fiction s'appelait l'utopie. CQFD. BR
Rue des Cascades / Un gosse de la Butte (Maurice Delbez, 1964) ***
A Ménilmontant, un garçon de neuf apprend à connaître l'amant de sa mère célibataire (Madeleine Robinson), un jeune boxeur noir d'une vingtaine d'années (Serge Nubret). Avec ses compositions inspirées de Doisneau, son regard sincère sur l'enfance et son message anti-raciste frontal, le film bénéficie aussi du décor naturel d'un quartier populaire de Paris aujourd'hui gentrifié et d'idées poétiques qui enchantent l'ensemble. La liaison mixte montrée choqua à l'époque et coula le film et son réalisateur. La redécouverte est réelle : elle était méritée. BR FR
L'histoire de Souleymane (Boris Lojkine, 2024) ***
A Paris, les deux jours et nuits trépidants d'un migrant guinéen avant son entretien de demande d'asile. Omniprésent sur son vélo de livreur ou courant après des sous et des papiers, l'acteur non professionnel Abou Sangaré crève l'écran dans ce film au rythme de thriller qui prend pourtant le temps de dresser le portrait et l'odyssée de ces invisibles de notre société qu'on croise à chaque coin de rue des grandes villes. En en incarnant un avec tant de force, Sangaré leur donne à tous un visage et une histoire. La scène de l'entretien est d'une puissance rare. BR FR
Dream scenario (Kristoffer Borgli, 2023) ***
Lorsqu'il apparaît dans les rêves de plein de gens, un professeur d'université lambda devient une star mais quand les rêves tournent aux cauchemars, il devient un pestiféré social. Une fable existentielle qui commence en comédie pour muter en drame sur le comportement de meute, l'exploitation commerciale et la réputation au temps des réseaux sociaux. Sur une idée et un scenario malins comme tout, Nicolas Cage est sensationnel en victime sacrificielle du collectif. Un film singulier, à la fois enthousiasmant et puissamment dérangeant. BR FR
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