5 octobre 2020

Films vus par moi(s): octobre 2020


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais / NS ne sait

La sagesse de la pieuvre / My octopus teacher (Pippa Ehrlich & James Reed, 2020) **
En Afrique du Sud, après un burnout, un documentariste se ressource en se liant d'amitié avec une pieuvre auprès de laquelle il plonge chaque jour. L'histoire de cet apprivoisement mutuel entre l'homme et le céphalopode est fascinant et étrangement émouvant, la pieuvre étant un véritable personnage dramatique. Je suis un peu réservé sur la narration et le ton assez monotones de Craig Foster mais quelles images sous-marines ! Netflix 

Aimez-moi ce soir / Love me tonight (Rouben Mamoulian, 1932) ***
Un tailleur parisien se fait passer pour un baron et séduit une princesse languissante. Une comédie et un musical d'une inventivité de tous les instants dans la réalisation, les voies de l'humour et les dialogues pleins de sous-entendus sexuels. Maurice Chevalier déploie son habituelle énergie bravache et Jeanette MacDonald son charme irrésistible. La mise-en-scène de la chanson "Isn't it romantic?" est jubilatoire. Le reste aussi. BR US

Carré 35 (Eric Caravaca, 2017) ***
L'acteur Eric Caravaca enquête sur sa soeur Christine, morte à trois ans au Maroc en 1963, avant sa naissance à lui, et effacée de la mémoire familiale par leur mère. Avec des films personnels Super 8, des entretiens avec les proches concernés et des déplacements sur les lieux de l'histoire, un documentaire intimiste en forme de parcours dans les méandres d'un lourd secret de famille. Très fort émotionnellement. DVD Z2 FR

J'ai perdu mon corps (Jérémy Clapin, 2019) NS
A Paris, un jeune homme se débat dans le quotidien tandis qu'une main sectionnée tente une traversée de la ville. L'originalité graphique de cette main qui affronte les dangers au ras du sol m'a plu mais le ton monocorde et désabusé du garçon de l'histoire parallèle m'a vite cassé les pieds. Bref, je suis passé au fast-forward à la 42e minute et n'ai rien vu dans la suite accélérée qui aurait pu me faire revenir. De très belles images, mais... BR FR 

La prière (Cédric Kahn, 2018) **
Dans les Alpes, un toxicomane de vingt-deux ans rejoint une communauté de réhabilitation par le travail et la prière. Un film austère dans son écriture mais généreux dans ses images et son message qui suit la transformation d'un être humain par le combat contre ses ombres et avec l'assistance des autres. Le jeune Anthony Bajon est très vrai dans un rôle à la fois physique et intérieur. Un beau regard sur le Don bien plus que sur la Foi elle-même. BR FR

Le quatrième homme / Kansas City confidential (Phil Karlson, 1952) **
Faussement soupçonné d'un braquage, un livreur en retrouve les véritables auteurs pour se venger. Un petit film noir tout en gros plans et coups de poings que la mise en scène nerveuse structure avec précision. Le casting de gueules (Jack Elam, Neville Brand, Lee Van Cleef) fait des étincelles et John Payne est un anti-héros parfait. Il y a aussi des flics véreux et un début de romance. Un classique dynamique de la Série B. BR FR

Sea fever (Neasa Hardiman, 2019) 0
Un chalutier est immobilisé au large par une créature tentaculaire. A bord, une étudiante en biologie tente de comprendre ce que c'est. Un petit film fantastique irlandais qui navigue dans les eaux du formidable "The Thing" de Carpenter mais s'échoue sur un scénario prévisible, une réalisation amorphe, un monstre et des personnages insignifiants (l'héroïne fait la gueule tout le temps). Même en accéléré, c'est terriblement ennuyant. BR FR 

Matthias & Maxime (Xavier Dolan, 2019) **
Deux amis d'enfance amenés à s'embrasser pour un court-métrage sont déstabilisés par leur attirance mutuelle inavouée. Dolan joue lui-même l'un des deux copains de ce film de sentiments traversé comme d'habitude de moments d'hystérie, de musique et de tendresse. Un peu long et ponctué d'une fin à retournement abruptement plaquée, il fonctionne par morceaux tout en manquant d'unité. Mais le sujet est touchant. BR FR  

Vacances romaines / Roman holiday (William Wyler, 1953) *
Une princesse en voyage officiel à Rome profite d'une échappée anonyme d'un jour dans la ville en compagnie d'un américain qu'elle ignore être un journaliste. J'avais le souvenir d'un film sympathique mais le revoir a été une douche froide, la réalisation poussive et le rythme désaccordé provoquant l'ennui presque dès le début. Reste les vues de Rome et le charme du visage d'Audrey Hepburn. Un classique bien fade. BR US

Un idiot à Paris (Serge Korber, 1967) 0
L'idiot d'un village de l'Allier débarqué à Paris fait des rencontres diverses. L'idiot est Jean Lefebvre, dans le seul rôle principal de sa carrière... Un navet irrécupérable où le casting déclame les insipides bons mots d'un Audiard à bout de souffle et où le rythme patine autour d'une idée uniforme : l'innocence ébahie du simplet. J'avais envie de le voir pour les images de Paris en 1966 (dont les Halles) mais même ça déçoit. Lamentable. BR FR 

La ville sans Juifs / Die Stadt ohne Juden (Hans Karl Breslauer, 1924) **
L'expulsion de tous les Juifs de la ville d'Utopia provoque une crise économique majeure : certains notables demandent leur retour. Considéré perdu, retrouvé au Marché aux Puces de Paris en 2015 et restauré en 2018, un surprenant film muet autrichien dont certaines images sont terriblement prémonitoires (le harcèlement et les déportations) et dont le message progressiste résonne toujours très fort, un siècle plus tard. BR DE

La falaise mystérieuse / The uninvited (Lewis Allen, 1944) 0
Un frère et une soeur achètent un manoir anglais de bord de mer dont la précédente propriétaire, tombée de la falaise, a une fille qui semble possédée. Un ersatz du "Rebecca" (1940) de Hitchcock dont les chuchotements dans le noir, deux courtes scènes d'ectoplasmes et la méchante lesbienne fonctionnent mais dont le reste est creux, factice et soporifique. La tragique Gail Russell est belle, hélas sans savoir jouer. BR FR

The boys in the band (Joe Mantello, 2020) ** 
En 1968 à Manhattan, un trentenaire organise dans son appart une fête d'anniversaire pour un de ses amis. Tous sont gays. Avec l'alcool et un participant inattendu, la soirée tourne au règlement de comptes. La pièce de Matt Crowley (1968) et le film de William Friedkin (1970) nécessitaient-ils ce remake ? Non, sa plus-value n'apparaît que dans le final, moins désespéré. Mais le casting est bon et le texte original toujours percutant. Netflix

Michel-Ange / Il peccato (Andrei Konchalovsky, 2019) *
En 1515, Michel-Ange va chercher un énorme bloc de marbre à Carrare alors qu'il est tiraillé entre ses mécènes Della Rovere et Médicis. Le film est plastiquement formidable : la reconstitution de la Renaissance à Rome est exceptionnelle. Mais le scénario se fixe uniquement sur la personnalité torturée de l'artiste (incarné avec une intensité expressionniste par Alberto Testone) et sur 2h15, la monotonie et l'ennui s'installent. Quel dommage ! AP Ciné