**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais
Venez donc prendre le café... chez nous ! / Venga a predere il caffè da noi ! (Alberto Lattuada, 1970) ****
Sur le Lac Majeur, un arriviste séduit trois soeurs vieilles filles pour la fortune que leur père leur a laissée. Une féroce satire de la cupidité mais surtout de la frustration sexuelle féminine avec une trivialité et un humour dévastateurs qui passeraient mal dans notre contemporain réduit au premier degré. Dans le décor bourgeois et brumeux de Luino, Ugo Tognazzi est magistral en queutard stratège mais ce sont les trois actrices (Francesca Romana Coluzzi, Milena Vokotic et Angela Gooodwin) qui m'ont font grimper aux rideaux. Du lucre et du stupre : génial ! DVD FR Tamasa
Le Lion de Saint Marc / Il Leone di San Marco (Luigi Capuano, 1963) **
A Venise au XVIe siècle, le fils du Doge s'éprend d'une femme pirate dont la bande attaque régulièrement la ville. Un chouette film d'aventures en couleurs et costumes tourné dans Venise avec ce qu'il faut de bals, de masques, de duels et de traitrises. Le casting est très bon, avec un séduisant Gordon Scott et une splendide Gianna Maria Canale en chemise, pantalon et indépendance. La mise en scène est sage mais les décors naturels et le spectacle font qu'on passe un moment distrayant, ce qui était recherché avant tout par la production. DVD FR Artus Films
La forteresse noire / The keep (Michael Mann, 1983) 0
Dans une gorge des Carpathes en 1941, des nazis et un savant juif sont piégés par une forteresse ancienne qui abrite une entité maléfique. Même si le film envisagé a été charcuté par la Paramount et n'a plus aucun sens, la laideur Eighties de l'ensemble et la bêtise abyssale du scénario et des dialogues ampoulés qui tentent une explication ancestrale du Nazisme sont atterrants, précipitant ce soi-disant "film culte" dans la poubelle des navets irrécupérables. Il y a juste le décor hammérien du village et le monstre qui retiennent un peu l'attention. Nul. BR US Vinegar Syndrome
Possession meurtrière / The possession of Joel Delaney (Waris Hussein, 1972) **
Une divorcée de Manhattan essaye de comprendre pourquoi son frère a des accès de folie furieuse. Un film de possession assez dérangeant, par l'atmosphère d'inquiétude Seventies qu'il dégage, la suggestion incestueuse et le final avec les enfants en péril. Ajouté au décor du New York crado de l'époque, à l'imbrication entre l'aspect documentaire en ville et le vaudou porto-ricain et au jeu solide de Shirley MacLaine et de Perry King, le film maintient la tension. En donnant l'impression d'être un chainon manquant entre Rosemary's baby et L'Exorciste. BR US Vinegar Syndrome
Winter kept us warm (David Secter, 1965) ****
Sur le campus de l'Université de Toronto, un étudiant s'attache à un autre. Canadien, le tout premier film gay - faut-il dire forcément dire "queer" ? - présenté à Cannes est le travail d'un passionné de cinéma de 22 ans qui y racontait un peu son histoire, qui est aussi celle de tout homo qui a eu un jour le coeur qui bat pour un camarade de cours. Avec un budget de rien le scénario, les dialogues et la réalisation font des merveilles, portés par un casting amateur très sympathique. La révélation d'un film pionnier d'un temps où l'homosexualité, au Canada, était un crime. BR US Canadian International Pictures
Un si joli village... (Etienne Périer, 1978) ***
Un village près d'Angoulême prend la défense d'un potentat, le propriétaire de l'usine locale soupçonné par un juge d'avoir tué sa femme. Une formidable étude de caractères, individuels - les personnages - et collectifs - le village, la justice - qui sous les apparences d'une enquête à la "Columbo", aborde des thèmes à la fois fixés dans leur temps et dans l'intemporel, notamment l'emprise des pourvoyeurs d'emplois sur les municipalités et leurs liens troubles avec les institutions. Avec Victor Lanoux, Valérie Mairesse et surtout Jean Carmet, dans son meilleur rôle ? BR FR StudioCanal
La brigade du suicide / T-Men (Anthony Mann, 1947) ***
Deux agents du Département du Trésor américain - les T-Men - infiltrent un gang mafieux de faux-monnayeurs en se faisant passer pour deux caïds. Un étonnant hybride de Film Noir et de documentaire panégyrique sur la police financière US, qui utilise des effets communs aux deux - la voix-off et le tournage en extérieurs - tout en travaillant la grammaire du premier avec une sublime photographie N&B contrastée et des cadrages extrêmes et la pédagogie du second. Avec en plus une violence crue et des émotions froides qui donnent au film une férocité singulière. BR FR Rimini Editions
Sambizanga (Sarah Maldoror, 1972) ***
En Angola en 1961, une jeune femme de la campagne part avec son bébé à Luanda à la recherche de son mari capturé et torturé par la police coloniale portugaise. Joué par des non-professionnels - le couple sera critiqué d'être trop "beau" - et traité sur un ton mi-documentaire, mi-élégiaque, le premier film africain réalisé par une femme - une française noire - évoque les prémices de la guerre décoloniale angolaise (1961-1975) d'un point de vue féminin hautement personnel. Du cinéma politique engagé avec un véritable supplément d'art et d'âme. BR FR Carlotta
Les proies / The beguiled (Sofia Coppola, 2017) *
Pendant la Guerre de Sécession, un soldat nordiste blessé est recueilli par le six occupantes d'une pension privée de Virginie. Un remake du film avec Clint Eastwood (Don Siegel, 1971) qui bénéficie d'une production et d'une photographie léchées - un peu trop - et d'un casting épatant - Colin Farrell, Nicole Kidman, Kirsten Dunst, Elle Fanning - mais dont le scénario répétitif bifurque vers une fin trop expédiée. Surtout, le message est brouillé : si le pauvre type est en chaleur, c'est parce que les pubères ont toutes le feu où je pense. Pour le féminisme annoncé, on repassera... BR UK
Le fruit défendu (Henri Verneuil, 1952) **
Notable d'Arles, un docteur marié se prend de passion pour une jeune aventurière venue de Paris. Le démon de midi n'est plus un sujet au cinéma et quel dommage : outre les outrances de scénario et les leçons de morale, ça donne aussi des numéros d'acteurs et d'actrices formidables. C'est le cas ici, avec Fernandel dans un role dramatique qui s'avilit pour Françoise Arnoul, super en imper et béret ou en négligé affriolant. Un drame bourgeois de papa comme je les aime et en prime, Sylvie en mère abusive et Claude Nollier en grande cocue. DVD FR René Chateau
Fils de (Carlos Abascal Peiró, 2025) **
Dans l'effervescence de la nomination d'un premier ministre, un attaché parlementaire (Jean Chevalier) pousse son père, politicien retiré (François Cluzet), à être candidat. Une comédie-thriller qui est surtout une charge contre la classe politique autocentrée et ses magouilles. On rit souvent de l'outrance des situations et du casting remonté (Karin Viard, Alex Lutz...) et la satire semble savoir de quoi elle parle mais le rythme et le montage trépidants fatiguent et on s'interroge sur la pertinence d'en rajouter une couche au moment où la chose politique est tellement défiée. Cinéma