2 février 2025

Films vus par moi(s): février 2025


**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

À nous les petites Anglaises ! (Michel Lang, 1976) **
Recalés au bac, deux lycéens parisiens sont envoyés réviser leur anglais à Ramsgate. Je n'avais de souvenir de ce film que son titre culte, son sujet, ses filles délurées et quelques images de booms qui m'avaient échauffé à peine ado. Revu cinquante ans plus tard, j'ai été surpris par sa narration et son rythme de chronique sans conflit qui n'aurait aucun intérêt si ce n'étaient la nostalgie et son casting tellement sympathique. Un film à la fois potache et tendre qui bizarrement, a résisté au temps. Et puis revoir Rémi Laurent. BR FR  

Aux sources du Nil / Mountains of the Moon (Bob Rafelson, 1990) ***
Entre 1857 et 1864, les deux expéditions aux sources du Nil de Richard Burton et John Speke et la dispute qui a suivi. Injustement méconnu, un grand film d'aventures coloniales qui dresse le portrait - assez romantisé - des deux explorateurs britanniques amis et concurrents. Patrick Bergin et Iain Glen sont formidables mais ce sont toutes les scènes quasi-documentaires dans les tribus africaines et les décors naturels à couper le souffle qui emportent tout. Du grand cinéma épique et intimiste à la fois, classique quoi. BR US     

Emilia Pérez (Jacques Audiard, 2024) ****
Aidé d'une avocate, un chef de cartel mexicain décide de transitionner et de se ranger du crime. Sur fond de questions graves - le violence du narcotrafic, le jugement sur la transidentité - un exaltant mélodrame musical dont l'originalité absolue du scénario et le panache des interprétations (Karla Sofía Gascón, Zoe Saldana, Selena Gomez) s'accordent à l'inspiration de la mise en scène et à la beauté des images pour donner un vrai classique. Peut-être que la résolution est un brin trop convenue mais bon. Women's Picture perfect. BR FR

The Apprentice (Ali Abbasi, 2024) ***
De 1974 à 1986, l'apprentissage en culot et amoralité de Donald Trump auprès de son mentor Ray Cohn. L'idée magistrale de ce biopic est de le baigner aux codes du film d'horror avec scènes nocturnes, décors néo-gothiques et personnages vampiriques. Et au choix de traiter l'image en grain vidéo de l'époque qui fonctionne au-delà du gimmick. Il en sort un portrait crédible de Trump en formation, dont Sebastian Stan s'empare avec brio, secondé par Jeremy Strong et Maria Bakalova en Ivana. Fascinant et effrayant, comme son monstre. BR FR

The Deliverance (Lee Daniels, 2024) 0
Dans un quartier noir de Pittsburgh, une mère de trois enfants et sa propre mère deviennent locataires d'une maison qui se révèle maléfique. Comment un film aussi bien sur ses premiers deux tiers, qui prennent le temps de suivre le personnage principal et sa famille dans leur quotidien pas facile, peut-il s'effondrer totalement dans son dernier tiers, une copie éhontée et honteuse de "L'Exorciste" ? C'est stupéfiant. Reste le casting, formidable, porté par l'excellente Andra Day et Glenn Close dans une incarnation géniale. Un naufrage. Netflix 

Pavillon noir / The Spanish Main (Frank Borzage, 1945) *
Dans les Caraïbes, le capitaine d'un vaisseau épouse la promise d'un gouverneur espagnol dans sa soif d'une vieille vengeance. Paul Henreid dans un rôle à contre-emploi et Maureen O'Hara dans un rôle aux petits oignons essayent ce qu'ils peuvent dans ce film de pirates assez poussif dans ses péripéties et sa mise en scène et abîmé par une musique de dessin animé pénible. Mais le spectacle est ailleurs, dans les maquettes et l'incroyable Technicolor Kalmus d'une outrance des couleurs insurpassée. Pour ça et rien que pour ça, c'est fascinant. BR US

Impact (Arthur Lubin, 1949) ***
Ayant survécu à l'assassinat fomenté par sa femme et l'amant de celle-ci, un riche industriel se réfugie anonyme à la campagne et est embauché dans une station-service tenue par une jeune femme. Un très bon thriller à la fois Film noir, Americana et Film de procès. Si la partie centrale - l'amitié entre Brian Donlevy et Ella Raines - est la meilleure, l'étonnant croisement des genres fonctionne. Avec Helen Walker en salope de luxe, Charles Coburn en vieux flic et Anna-Mae Wong en bonne (toutes ses apparitions sont ponctuées d'une petite mélodie chinoise). BR US  

Folle à tuer (Yves Boisset, 1975) **
Un milliardaire confie son neveu orphelin à une jeune femme qu'il sort d'une clinique psychiatrique. Les deux sont enlevés par des rançonneurs. Un film purement narratif dont les péripéties sont bien moins intéressantes que les personnages et leurs liens, tous frappés à divers degrés. Dans le décor de La Défense en chantier, Marlène Jobert, Michael Lonsdale, Victor Lanoux et quelques autres pointures ne prennent pas ça très au sérieux, éclipsés par le petit Thomas Wainthrop, génial en peste effrontée. BR FR  

The deep house (Alexandre Bustillo & Julien Maury, 2021) *
Un couple d'urbexers plonge dans un lac perdu pour explorer une maison engloutie. Hantée. Presqu'entièrement tourné sous l'eau avec des acteurs en bouteilles dans des décors immergés, l'aspect visuel inédit de ce film d'horror est son seul intérêt - avec le fait qu'il soit français - et c'est dommage. Parce l'idée est excellente et que la claustrophobie engendrée est réelle. Mais la faiblesse du scénario et des dialogues, insurmontable, noie l'ensemble et on se dit qu'ils sont passés à côté d'un petit classique. BR FR  

Running on Karma / Dai zek lo (Johnnie To & Wai Ka-fai, 2003) **
Un moine bouddhiste devenu culturiste stripteaser doté du pouvoir de voir le Karma des gens essaye de dévier celui d'une policière sur la trace d'un tueur. Invraisemblable - aux yeux occidentaux - hybride de thriller, comédie, gore horror, mélodrame, camp et philosophie bouddhiste, un film hongkongais à toute vitesse et couleur qui nécessite de lâcher ses préjugés et profiter du spectacle, et du message. Dans son costume de muscles en latex, la star Andy Lau fait une prestation irrésistible. BR UK 

MaXXXine (Ti West, 2024) ***
Une jeune actrice de porno embauchée pour le premier rôle d'un film d'horreur est suivie par un tueur en série. Le dernier film de la trilogie de West (après les excellents X et Pearl en 2022) recrée Hollywood en 1985 avec un hyperréalisme clinquant qui lui va comme un gant. La mise en scène, le scénario et les seconds rôles sont formidables, dynamisés par les clins d'oeil au cinéma et surtout Mia Goth, sans conteste l'actrice la plus magnétique du moment. Un slasher qui connaît ses classiques. BR FR

1 janvier 2025

Films vus par moi(s): janvier 2025


**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

L'homme inconnu (Anthony Schatteman, 2021) **
Sur la Côte d'Azur, un écrivain gay en panne observe un jeune couple qui se baigne dans une crique et retrouve l'inspiration. Sur un sujet mince comme tout mais solide, un court-métrage flamand de 20' qui bénéficie du décor imbattable du Cap Ferrat - ou d'un site proche -, du physique de ses acteurs - Samuel Suchod, à suivre (dans les buissons ?) - et d'un twist final bien mené. L'ambiance de l'été, avec les reflets du soleil sur la mer, le chant des grillons et la tiédeur de la brise font rêver. Internet

King Kong Ciné-Concert (Merian C. Cooper, Ernst B. Schoedsack + Joachim Latarjet, 1933) ***
Je suis allé voir par curiosité et pour le plaisir du grand écran mon film préféré en version ciné-concert avec la Compagnie Oh ! Oui..., trois musiciens et une demi-douzaine d'instruments. Traité comme un film muet, mais en gardant quelques dialogues, ajoutant des intertitres et en coupant ou accélérant des séquences, King Kong est le même et tout autre, un sacré film rock en tout cas. J'ai vraiment aimé. Pas comme la vieille dans la salle qui sous les huées gueulait qu'ils saccageaient son film. Musée de la Chasse et de la Nature, Paris

Un jeune chaman / Sèr sèr salkhi / City of wind (Lkhagvadulam Purev-Ochir, 2023) ***
A Oulan-Bator, un chaman de 17 ans tombé amoureux s'éloigne de la charge pour laquelle il a été appelé. Un film magnifique, porté par de formidables interprètes - dont Tergel Bold-Erdene, récompensé à Venise 2024 - sur la place essentielle mais fragile du chamanisme dans la société mongole en mutation. Situé dans l'étonnant quartier ancien des yourtes, ce coming of age movie pose de sérieuses questions sur notre rapport au spirituel et au collectif. Le premier film d'une réalisatrice à suivre. DVD FR

Eraserhead (David Lynch, 1977) **
Abandonné par sa compagne, un type lunaire (John Nance, dans un personnage inoubliable) doit s'occuper seul de leur bébé, sorte de foetus vivant, et en perd la tête. J'avais vu le film dans les années 80 et, tout en ayant admiré l'originalité radicale, la force des images et la travail sur le son, je me souviens m'être un peu fait chier. Quarante ans plus tard, avec quelques connaissances en plus sur la psychose et l'Inconscient, rien n'a changé et j'aime toujours autant la chanson de la fille du radiateur. BR UK

Madame Bovary (Sophie Barthes, 2014) 0
En Normandie, une jeune mariée insatisfaite qui rêve d'une vie plus excitante s'y brûle. Malgré la beauté du cadre et de la direction artistique, malgré les acteurs aux personnages rajeunis - Mia Wasikowska est bien mais trop superficielle - et évidemment malgré l'histoire - ici simplifiée -, on s'ennuie ferme dans cette n-ième adaptation qui n'apporte rien et reste platement illustrative du début à la fin alors qu'il faut un peu de névrose avec Emma. J'en ai vu la moitié en accéléré, sans regret. BR FR  

La horse (Pierre Granier-Deferre, 1970) *** 
En Normandie, un propriétaire fermier affronte les trafiquants dont il a détruit la drogue, dealée par son petit-fils (Marc Porel). Sorte de western du bocage, un thriller intimiste dont les éclairs de violence rythment une narration structurée sur la dynamique interne d'une famille commandée par le patriarche. Jean Gabin, dans la dernière partie de sa carrière, est monumental - au sens propre et figuré - dans le rôle taillé pour lui. Les dialogues dégraissés et la mise en scène sont excellents. Cette fin ! DVD FR

Ursus l'Invincible / Gli invicibili tre (Gianfranco Parolini, 1964) **
L'homme fort Ursus est appelé par un vieux roi à venir déloger l'usurpateur qui a pris le pouvoir sous le nom... d'Ursus. Deux Ursus pour le prix d'un donc dans ce peplum italien tourné dans les sables tunisiens. Les culturistes italiens Alan Steel - assez vulgaire - et Mimmo Palmara - plus classe - se partagent le nom et l'affiche, entourés de pépées aux yeux magnifiques et si le film n'a rien de spécial, il est fun, sympathique et coloré et la séquence aux chameaux est étonnante. Pour les fans du genre. BR FR  

La meilleure part (Yves Allégret, 1956) **
Le quotidien d'une équipe qui construit un barrage hydraulique. J'aurai pu mettre 0 parce qu'il ne se passe rien dans ce film plutôt ennuyeux. Mais le décor réel du barrage en construction de Plan d'Amont à Aussois dans les Alpes et la valeur documentaire d'un chantier de ce genre sont captivants, comme le discours (revendications salariales, traitements des travailleurs Algériens...) d'Allégret et de Gérard Philipe, star à contre-emploi. Un film gauche et de gauche qui est aussi raté qu'intéressant. DVD FR  

Sept hommes à abattre / Seven men from now (Budd Boetticher, 1956) ****
Un ex-shérif qui traque sept bandits responsables d'un cambriolage où sa femme a été tuée croise et accompagne un couple qui part en Californie en chariot. Le premier des sept sublimes westerns que Boetticher a tournés avec Randolph Scott pose les règles de l'ensemble : force du scénario, perfection de la mise en scène, réduction de la durée, économie du décor, du jeu et des attitudes. Cette alchimie unique créé de l'or par l'ajout d'un ingrédient final : l'humanité bouleversante des personnages. BR FR

Le Comte de Monte-Cristo (Matthieu Delaporte & Alexandre de La Patellière, 2024) ***
Entre 1815 et 1835, le calvaire et la vengeance forcenée d'un homme condamné au cachot et revenu à la société métamorphosé. J'y allais à reculons, ayant détesté Les Trois Mousquetaires, Part I que je mettais dans le même panier. Mais malgré la mise en scène platement anonyme et illustrative et l'omniprésence pénible de muzak, j'avoue que la noirceur préservée du roman à tiroirs de Dumas, le très bon casting et la splendeur de la direction artistique m'ont fait passer les trois heures comme deux. BR FR

Jane by Charlotte (Charlotte Gainsbourg, 2021) **
Un peu à Tokyo et à New York, surtout à Paris et dans sa maison de l'Aber Benoît en Bretagne, Jane Birkin parle d'elle et d'elles avec sa fille Charlotte. Se révèle, si on ne le soupçonnait pas déjà, une femme sensible et angoissée qui, jadis subliment belle, se voit vieillir seule en affrontant le cancer et la culpabilité du suicide de sa première née. Le documentaire, évidemment très intime, semble comme la captation d'une mémoire familiale doublée d'un câlin mère-fille un peu retenu. Attachant comme elles. BR US

La vie à l'envers (Alain Jessua, 1964) ****
A Paris, un trentenaire fatigué de tout ça décide de s'affranchir de ses obligations et de ses liens sociaux. Un regard sur la schizophrénie ou un pamphlet contre la société de consommation ? Sans doute les deux mais surtout le portrait radical d'un homme qui se libère par le vide. De tous les plans, Charles Denner est magnifique dans un rôle cousin de celui de Maurice Ronet dans "Le Feu Follet" (Louis Malle, 1963). Comme celui-là, c'est un chef-d'oeuvre du cinéma existentialiste. Une vraie découverte. BR FR

1 décembre 2024

Films vus par moi(s): décembre 2024


**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais 

Blonde ambition (John & Lem Amero, 1981) **
Parties faire carrière dans le cinéma à New York, deux artistes de cabaret du Wyoming sont mêlées à une histoire de broche en diamants. Un porno musical et une comédie X avec des scènes chantées et des scènes hard intégrées à de la comédie digne de Benny Hill sur fond de référence à Gentlemen Prefer Blondes, Gone with the Wind et The Boys in the Band. C'est étonnant et sympathique comme tout et plusieurs séquences osent le camp et l'art et essai. Du porno de haut vol et donc un oiseau rare. BR US

Les envahisseurs attaquent / Destroy all monsters /  Kaiju So-shingeki (Ishiro Honda, 1968) *
Par curiosité. Confinés dans l'île de Monsterland, les Kaijus sont libérés par des extraterrestres qui veulent les utiliser pour détruire l'Humanité. La dizaine des grands monstres du cinéma de SF japonais - Godzilla, Rodan, Mothra, Anguirus, King Ghidora, etc... - sont réunis dans ce crossover extrême dont l'outrance et l'inanité amusent d'abord puis une fois l'effet vite passé, écoeurent de ridicule et de connerie. Sans doute que bien bourré ou pété ça peut le faire mais ce n'était hélas pas mon cas. BR UK

Quantum conwboys (Geoff Marsleft, 2022) *
En Arizona dans les années 1870, deux cowboys sont pris dans une boucle temporelle lors d'une fusillade de rue. Le plus intéressant et beau dans cette histoire, c'est l'usage de multiples techniques de prises de vues et d'animation, du réel au dessin animé en passant par la rotoscopie et la stop-motion. Mais l'histoire circulaire - qui est le sujet de ce western qui est de science-fiction après tout - et le jeu approximatif des acteurs finissent pas assommer.  Il parait que c'est le premier volet d'une trilogie. Sans moi. BR US

Panique Année Zéro / The panic in Year Zero! (Ray Milland, 1962) **
Une famille de quatre californienne partie pour un week-end à la campagne se réfugie dans une grotte pour échapper au chaos quand des bombes atomiques détruisent Los Angeles. Tourné et sorti en pleine Guerre Froide, un survival nucléaire audacieux dans son approche frontale de l'effondrement social et moral - vol, pillage, meurtre, viol - et porté par un Ray Milland usé mais plombé par un score jazzy envahissant de Les Baxter qui vieillit considérablement le film. Autrement, du vrai cinéma nihiliste. BR FR

How to build a time machine (Jay Cheel, 2016) ***
Deux sexagénaires, un fan du film "The Time Machine" (George Pal, 1960) qui a créé sa réplique de la machine et un prof d'université en physique qui a travaillé toute sa vie sur les paradoxes du voyage temporel se retrouvent autour de leur obsession commune, l'abîme du temps. Un documentaire qui m'a parlé, touché et ému aux larmes sur le pouvoir de l'imaginaire, la survie de l'enfant dans l'adulte et la force fondatrice du cinéma. Et cette fin sur "Forever Young" d'Alphaville... And you, where would you go? BR US

Destins (Richard Pottier, 1946) **
Une star du music-hall est contacté par son frère jumeau, un truand qui cherche à lui soutirer de l'argent. Tino Rossi dans un double rôle - le sien et son opposé - fit courir les foules en 1946 dans ce mélodrame musical qui mon vieux est aussi daté qu'épatant huit décennies plus tard. Parce que Tino brise les codes du masculin d'aujourd'hui, qu'il y a un concours de Midinettes et que le rossignol corse chante par trois fois "Petit Papa Noël", portant l'air entêtant au sommet de la culture populaire française. DVD Z2 René Chateau

Alien: Romulus (Fede Alvarez, 2024) *
S'échappant d'une planète minière où ils sont exploités, six adolescents atteignent un vaisseau spatial abandonné infesté de jeunes aliens. On sent bien que le script et la réalisation essayent de revenir à l'esprit des sources et l'envie de comparaison ajouté au rythme trépidant font qu'on regarde jusqu'au bout mais il n'y a rien là-dedans qui ne soit déjà vu, en mieux. Tout cela sent le produit industriel : l'écriture, les références attendues et les visuels digitaux. Reste un intéressant personnage, le robot black. BR FR

Je suis vivant ! / La corta notte della bambole di vetro (Aldo Lado, 1971) *
A Prague, un journaliste retrouvé pour mort dans un parc est emmené à la morgue en attente d'autopsie. Mais lui sait qu'il est vivant et revoit ce qui l'a conduit à cette situation terrifiante. Je déteste le giallo, je n'y arrive pas, jamais. Ici, l'histoire me semblait originale, Jean Sorel est toujours sexy et bien et il y avait Ingrid Thulin, alors... Oui, mais sur un mode mineur et malgré la beauté réelle des images et le propos final, l'ensemble est d'une confusion qui m'a plongé dans la catalepsie du malheureux héros. BR FR

... Comme la Lune (Joël Séria, 1977) ***
Amant d'une bouchère nymphomane, un beauf queutard et grande gueule se ramasse. Dégorgeante de veulerie vulgaire mais aussi d'une tendresse tordue, une autre comédie de moeurs 70s de Séria qui offre un rôle cousu main à Jean-Pierre Marielle, évidemment hors-classe. Et derrière son pauvre type, c'est une galerie de femmes hors-norme qui est croquée, porté par les interprétations de Sophie Daumier - géniale - et de Dominique Lavanant. Un film d'une incorrection nécessaire et salvatrice. DVD Z2 FR

Pleasure (Ninja Thyberg, 2021) ***
Une jeune suédoise de dix-neuf s'installe à Los Angeles pour tenter une carrière dans le X. Un film stupéfiant, hybride d'un sujet et d'un esthétisme à la "Showgirls" ou à la "Boogie Nights" et d'un documentaire frontal et averti sur l'industrie du porno au temps de #MeToo et des réseaux. Le tout d'un point de vue entièrement féminin, personnages, réalisatrice et actrices. Dans un rôle crûment exposé, Sofia Kappel - qui n'est pas une actrice X - ose tout jusqu'à l'abject. Du mélodrame de guérilla, Fuck ! BR UK

Félicie Nanteuil (Marc Allégret, 1942) ***
Vers 1900 à Paris, une jeune actrice de théâtre poussée par un comédien au rabais (Claude Dauphin) devient une vedette à l'Odéon et s'éloigne peu à peu de son mentor amoureux. Adaptation d'Anatole France, un film qui semble commencer comme "A star is born" pour prendre un autre chemin, plus désespéré encore. Malgré des raccourcis trop rapides dans la psychologie et l'action, la noirceur fantastique est fascinante. A vingt ans, Micheline Presle et Louis Jourdan sont beaux comme pas permis. DVD Z2 FR

2 novembre 2024

Films vus par moi(s): novembre 2024

**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais 

La chose derrière la porte (Fabrice Blin, 2023) *
Dans la campagne de 1918, une veuve désespérée (Séverine Ferrer) utilise un grimoire médiéval pour faire revenir à la vie son mari tué à la guerre (David Doukhan). Voilà un film dont beaucoup d'images sont vraiment saisissantes mais qui déçoit par l'écriture trop lâche d'une histoire sans véritable direction. C'est dommage parce son thème - une variation sur la mandragore - est plein de potentiel et que l'Horror manque au cinéma français. Alors, il faut saluer le projet à défaut du produit final. BR FR

Un flic (Jean-Pierre Melville, 1972) ***
Un commissaire de la PJ (Alain Delon admirable) poursuit les auteurs d'un braquage. Personnages taiseux et sentiments refoulés, monde interlope de la nuit et artifice du décor et de la post-production : tout est porté à l'extrême dans ce dernier film de Melville qui, au-delà de l'histoire inspirée par le Film Noir américain, est surtout la plongée dans l'atmosphère d'un brouillard existentiel. En fait, les audaces formelles et narratives, qui peuvent rebuter comme enthousiasmer, portent l'oeuvre vers le film d'art. BR FR

Le propriétaire / The landlord (Hal Ashby, 1970) ***
Le fils d'une famille WASP (Beau Bridges) achète un immeuble à Brooklyn loué à des noirs pour le refaire en appartements à bobos. Les locataires qu'il rencontre lui font changer son point de vue sur eux. Le premier film - trop méconnu - d'Ashby est formidable. Le sujet explosif du rapport de classe et de race est traité avec une intelligence d'écriture et de mise-en-scène qui n'a pas pris une ride. On rit car c'est une comédie et on est touché. Puis on frémit en se disant que c'est redevenu pire aujourd'hui. BR UK

L'été de Giacomo / L'estate di Giacomo (Alessandro Comodin, 2011) **
Dans la campagne du Frioul, un adolescent sourd passe une journée d'été avec sa meilleure amie : marche dans la forêt, baignade dans un lac, visite d'un silo abandonné, fête foraine... Un film qui oscille entre documentaire et fiction en évacuant toute péripétie pour se concentrer sur deux jeunes gens dans leurs rôles proches de la réalité. La nature ensoleillée, le temps suspendu, l'évidence des choses et les émotions sans filtre du charismatique Giacomo Zulian évoquent presque un conte des origines. BR FR

Longlegs (Osgood Perkins, 2024) *
Une jeune flic du FBI renfermée mais visionnaire traque un serial killer peu commun. Une sensation marketing qui n'a mérité ni son succès ni ses éloges. C'est une déclinaison du "Silence des agneaux" (Demme, 1991) adossée à un contexte sataniste d'une roublardise toute contemporaine et avec une actrice principale (Maika Monroe) uniformément inexpressive. Reste la curiosité de ne pas reconnaitre l'extravagant Nicolas Cage, qui s'en donne à coeur joie sous sa prothèse faciale. Rien que pour ça ? BR DE

Trap (M. Night Shyamalan, 2024) **
Un père (Josh Hartnett épaissi à 45 ans) accompagne sa fille au concert d'une pop star dont elle est fan. Serial killer, il découvre que le show est un piège monté par la police pour le capturer. Un thriller bancal, poussif dans sa première partie puis nerveux dans la seconde, mais qui malgré ses invraisemblances à la pelle fonctionne par des twists assez malins, dont une excellente scène avec un portable. Tout le casting joue mal - ou faux - ce qui ennuie au début puis intrigue. Moins que bon mais plus que moyen. BR DE

Les charbons ardents (Hélène Milano, 2019) **
Dans des 1ères pro en mécanique du Nord, d'Ile de France et des Bouches du Rhône, quinze élèves-apprentis de 16 à 19 ans se confient sur ce que c'est qu'être un homme quand on vient d'un milieu simple dans une cité. Un documentaire révélateur et touchant sur l'expérience et l'idée de la masculinité dans la France des banlieues populaires d'aujourd'hui. Derrière les stéréotypes virilistes auxquels ces garçons sont obligé de se conformer pour exister dans le groupe, on sent les fragilités enfouies. DVD Z1 FR

Tarzan et la vallée de l'or / Tarzan and the valley of gold (Robert Day, 1965) *
Tarzan ramène chez lui un jeune Aztèque capturé par un criminel qui convoite l'or légendaire de son peuple. Un film léger jusqu'à l'inconsistance qui commence à Acapulco, avec Tarzan en costume dans une séquence à la James Bond et continue dans la jungle du Mexique. Trois choses à garder : le look et la musique pop Sixties,  le décor impressionnant de Teotihuacan et l'ex-athlète Mike Henry dans le rôle titre. Avec son corps et son visage sculpturaux érotisés à mort, il fera deux autres Tarzan. DVD Z1 US

Shin Godzilla / Godzilla Resurgence / Shin Gojira (Hideaki Anno &  Shinji Higuchi, 2016) ***
A Tokyo, les autorités locales et nationales cherchent une solution face à un monstre amphibie qui ravage la ville. Après des années d'appropriation hollywoodienne, la Toho récupère son icône avec ce reboot qui revient à la source. Un film déroutant, concentré sur les discussions sans fin des fonctionnaires plutôt que sur l'action dynamique, néanmoins présente par séquences. Le message est clair : Que s'est-il passé à Fukushima ? Les métamorphoses de Godzilla sont une superbe idée, jusqu'à la dernière. BR UK

The boy (William Brent Bell, 2016) *
Traumatisée par la violence de son ex-boyfriend, une étudiante plaque tout et se fait embaucher comme baby-sitter d'un petit garçon. Elle découvre qu'il s'agit d'une poupée qui a remplacé l'enfant, mort depuis longtemps, de ses parents devenus vieux. Hésitant entre le psychologique et l'horror, un petit film sans prétention qui prend son temps en atmosphère avant de virer dans l'action attendue après le twist plutôt bien amené. Shyalaman en aurait sans doute fait quelque chose de plus puissant. BR FR

L'esclave aux mains d'or / Golden boy (Rouben Mamoulian, 1939) *
A New-York, une agente sportive convainc un jeune violoniste de se lancer dans les championnats de boxe. Sur un sujet risible, un mélodrame ennuyeux et bavard qui révèle son origine théâtrale. Même le talentueux Mamoulian à la barre n'arrive pas à faire grand chose - sauf de "La Vierge à la Chaise" de Raphaël un quasi-personnage - mais le film vaut d'être vu pour Barbara Stanwyck qui y imposait son protégé William Holden dans son premier rôle. A 21 ans, il y est aussi mauvais que beau. BR US

Godzilla Minus One / Gojira Mainasu One (Takashi Yamazaki, 2023) ****
En 1947, un ex-kamikaze doit surmonter sa peur pour aider à la lutte contre un monstre marin qui menace Tokyo. Une formidable adaptation du Godzilla original (Ishirō Honda, 1954) qui remplace la métaphore du péril atomique par celle du PTSD - troubles du stress post-traumatique - et de ses abysses. Totalement imprégné des concepts jungiens - l'inconscient collectif, l'archetype, le complexe, l'anima... - et de références cinéphiles, un blockbuster intime à la fois spectaculaire, profond et humain. Cinéma (dans sa splendide version N&B, qui me semble la seule adaptée au propos)

2 octobre 2024

Films vus par moi(s): octobre 2024


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais / NSP ne sait pas

Monstres : L'histoire de Lyle et Erik Menendez / Monsters: The Lyle and Erik Menendez story (Ryan Murphy prod, 2024) **
L'histoire des deux frères qui ont assassiné leurs parents à Beverly Hills en 1989 et les deux procès qui ont suivi jusqu'en 1996. Ce fait divers m'avait fasciné à l'époque et le retrouver des décennies plus tard par le petit bout de la lorgnette est plutôt sympathique. Rien à dire, c'est bien écrit, bien fait et parfaitement joué par le casting impeccable - notamment les acteurs des deux frères infernaux - mais le polissage de la grammaire visuelle Netflix fait que rien ne dépasse, enfin presque. Du bon storytelling. Netflix

Sebastian (Mikko Mäkelä, 2024) **
Max, un pigiste de 24 ans qui enquête sur les escort boys gays de Londres tente l'expérience lui-même sous le pseudo de Sebastian. Une plongée dans le monde des chasseurs de sexe ou d'amour dans l'anonymat des applis de rencontre à travers le portrait d'un jeune homme un peu paumé qui se révèle à lui-même. C'est pas mal du tout dans sa description crédible des rapprochements d'âge et de milieu social et la nuit londonienne est photogénique. Ruaridh Mollica - l'excellent acteur principal - aussi. BR US

Traqué par Scotland Yard / Town on trial (John Guillermin, 1957) **
Dans une petite ville anglaise, un jeune femme blonde et aguichante est étranglée. Un officier de police enquête chez les habitants pour trouver le coupable. Le resserrement de l'histoire autour de quelques personnages tente une critique sociale de la bourgeoisie et de ses choses à cacher. Ça c'est du déjà vu. Ce qui l'est moins, c'est l'étonnante hybridité entre Film Noir et Soap Opera autant qu'entre cinéma britannique et américain. Et John Mills, comme d'habitude, est formidable. De la série B de qualité. BR UK

Traitement de choc (Alain Jessua, 1973) **
Dans un institut thalasso de Belle-Ile, une cliente a des soupçons sur les cures rajeunissantes proposée par le beau médecin-directeur. Annie Girardot et Alain Delon en full-frontal ont fait courir les foules à la sortie du film et leurs scènes nues restent une curiosité. Mais au-delà, il y a surprenant thriller d'horror, un genre rarissime dans le cinéma français. Et au-delà encore, une critique cinglante du luxe autocentré des riches et de l'exploitation des vulnérables. Tout cela est terriblement d'actualité. BR FR

La déposition (Claudia Marschal, 2024) **
En 1993, un enfant de choeur de 13 ans est agressé sexuellement par le prêtre de son village alsacien. Trente ans plus tard, Emmanuel dépose plainte à la gendarmerie et enregistre subrepticement sa déposition. A partir de ce document sonore, d'archives et de nouvelles images, le film revient sur une histoire comme il en existe des milliers d'autres et dresse le portrait touchant d'un fils et de son père face au trauma. La Déposition, c'est aussi Jésus descendu de la Croix, un poids mort doucement partagé. Cinéma

Marie Poupée (Joël Séria, 1976) ***
Un antiquaire en poupées (André Dussolier) épouse une femme-enfant vierge de seize ans qu'il transforme par fétichisme, mais sans la consommer, en poupée de porcelaine vivante. Marie s'amuse du jeu jusqu'à ce que le désir la prenne en croisant l'ouvrier agricole Bernard Fresson. Terriblement sexy, un film subversif et cruel entre conte de Perrault et satire de Buñuel qui serait impensable aujourd'hui. Jeanne Goupil est irrésistible en objet sexuel innocent et inconscient. Vachement bien. DVD Z2 FR

La chimère / La chimera (Alice Rohrwacher, 2023) **
Sur la côte toscane, un jeune anglo-italien chef d'une bande de tombaroli - les pilleurs de tombes étrusques - s'enfonce dans une crise existentielle liée à un deuil. Sur un sujet de commerce archéologique vraiment original, un film entre réalisme et fantaisie poétique qui cite frontalement Fellini et Rossellini tout en poursuivant l'esprit d'un autre film - excellent - de la réalisatrice : "Lazzaro felice" (2017). Malgré quelques coquetteries ça marche, notamment grâce à la juste prestation de Josh O'Connor. BR FR

Les chiens (Alain Jessua, 1979) **
Dans une ville nouvelle en construction, un médecin juste arrivé (Victor Laloux) affronte des habitants dont les chiens dressés au combat par Gérard Depardieu blessent régulièrement les rares minorités de la cité. Dans le décor impersonnel mais idéal de Marne-la-Vallée qui sort de terre, les racistes en tout genre qui font le ménage eux-mêmes avec les crocs de leurs molosses étaient en 1979 une dystopie effarante. C'est maintenant une métaphore d'une actualité brûlante. Peu subtil, mais efficace. BR FR

Le Grand Passage / Northwest Passage (Book 1- Roger's Rangers) (King Vidor, 1940) **
En 1759, le Major anglais Robert Rogers (Spencer Tracy solide, avec son accent américain paradoxal) embarque ses Rangers dans une odyssée au Québec pour aller en territoire français détruire un village d'indiens Abenakis. Dans un Technicolor Kalmus qui sublime les paysages de lacs et de forêts et sans un seul temps mort, un film d'aventures historiques situé pendant les French and Indian Wars qui pourrait être excellent. Mais aujourd'hui, la violence colonialiste du film choque, profondément. BR US

La septième victime / The seventh victim (Mark Robson, 1943) ***
Dans Greenwich Village, une jeune femme cherche sa soeur - inoubliable Jean Brooks - brusquement disparue après avoir fréquenté un mystérieux groupe d'intellectuels aisés. Un des diamants - le plus morbidement noir - produits par Val Lewton pour la RKO, ce film d'atmosphère explore les forces obscures à l'oeuvre dans la société urbaine. Dans un N&B menaçant et avec une exploitation géniale de la suggestion, plusieurs des tropes du Film Noir et d'Horror naissent sous nos yeux. Quant à cette fin ! BR US 

Bonjour, petit Copper (Roland Allard, 1998) ***
Je ne connaissais rien d'Annick Martigny, dite Ariane Grimm, cette jeune fille pas si sage morte à 18 ans d'un accident de moto en 1985. Depuis ses 7 ans 1/2, elle n'avait pas cessé d'écrire, de dessiner, de coller, laissant les mots et les images capturer ses enthousiasmes et ses frustrations. A partir de ses "Cahiers de mémoires" gardés par sa mère, ce petit film de 26 minutes cristallise, par une belle lecture de ses étonnants textes, l'essence d'une existence brutalement rompue. Très touchant. Dailymotion

Birdemic: Shock and Terror (James Nguyen, 2010) NSP
Sur la côte californienne, des rapaces attaquent un couple qui fuit et essaye de se défendre. Difficile à dire si cet hommage aux Oiseaux d'Hitchcock est une parodie géniale, un truc marketing ou un des pires navets du cinéma ? Le scénario décousu, les dialogues risibles, le casting amateur incompétent, la photo cramée, le montage erratique et j'en passe pourraient enterrer l'objet. Mais pour qui aime le camp, c'est du culte. Rien que pour les incrustations atterrantes des oiseaux. BR US

La Montagne Sacrée / The Holy Mountain (Alejandro Jodorowsky, 1973) ***
Le Christ ou un vagabond qui lui ressemble est pris en charge par un alchimiste adepte du Tarot qui lui fait rejoindre les dieux de l'Olympe et du monde moderne en quête de l'Immortalité. Rien ne peut résumer ce film foisonnant, boursouflé et étonnamment intemporel dont les situations et surtout les images ne cessent de surprendre et de marquer. Pas facile de trouver un message, à chacun de se faire sa propre projection en se laissant emporter par l'imaginaire débridé à l'oeuvre. Grandiose. Cinéma

1 septembre 2024

Films vus par moi(s): septembre 2024


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais / NSP ne sait pas

The sinful dwarf / Dværgen (Vidal Raski=Eduardo Fuller, 1973) **
Une logeuse et son fils nain trentenaire et voyeur kidnappent des jeunes femmes pour les livrer en pâture à des clients après les avoir droguées. Sur une histoire d'une proximité dérangeante avec l'actualité judiciaire française du moment, un film d'exploitation danois - mais de langue anglaise - entre X et Z dont le budget réduit est compensé par l'outrance des situations et du personnage du nain sordide interprété par un certain Torben (Torben Bille). Tout cela n'est pas du tout correct, évidemment. BR US
                                                              
Histoire de chanter (Gilles Grangier, 1947) **
A Nice, un chirurgien cocu (Noël Roquevert, toujours impérial) échange les codes vocales d'un livreur gouailleur (Julien Carette) et d'un ténor d'opérette adulé. Une comédie avec chansons au thème idiot et drôle qui permet à Luis Mariano de se laisser aller avec plein d'humour à l'auto-dérision par rapport à sa persona et à sa voix "garantie en sucre". Vu d'aujourd'hui, on se demande comment le rossignol basque a pu avoir ce succès fou auprès des femmes avec ce style à la fois désuet et efféminé. High camp. DVD Z2 FR

L'Origine du Monde (Laurent Laffite, 2021) ***
Un homme dont le coeur s'est arrêté de battre doit apporter sous trois jours à une psy une photo du vagin de sa mère pour travailler ses traumas et rester en vie. Sur un sujet outrancier et particulièrement scabreux, une formidable comédie de situation - adaptée d'une pièce - à la fois très drôle dans ses péripéties, touchante dans ses liens entre les personnages et futée dans son regard sur la psyché. Hélène Vincent est la mère, Laurent Laffite le fils, Karin Viard la femme et Vincent Macaigne le vétérinaire. Netflix

Stranded (Juleen Compton, 1965) *
A l'été 1964, une jeune américaine, son copain et son meilleur ami homo louent un bateau pour croiser les îles grecques. A la modernité du tournage et de l'esprit, qui peut faire penser à de la Nouvelle Vague avec des années de retard, s'oppose le jeu affecté des acteurs, surtout la réalisatrice dans le rôle principal et son pote gay français qui passe son temps à hurler "Mais quelle horreur !". Toutefois il y a de très belles images solaires et la liberté de ton, pour un film américain, reste étonnante. BR US

La cité de la peur / City of fear (Irving Lerner, 1959) **
Echappé de prison avec une urne qu'il croit contenir de l'héroïne, un malfrat (Vince Edwards) transporte avec lui une poudre radioactive mortelle. Munie de compteurs Geiger, la police le traque à Los Angeles en évitant d'affoler la population. Une petite série B au sujet original qui surclasse son évident mini budget par ses nombreuses séquences extérieures tournées dans les rues de L.A., ce qui lui donne un aspect newsreel intéressant. Avec une superbe photo Film Noir et un score jazzy. BR UK

Dolls (Stuart Gordon, 1987) *
Leur voiture embourbée, un père, sa fille et la marâtre trouvent refuge chez un vieux couple qui collectionne des poupées vivantes. Les poupées tueuses sont toujours un bon sujet mais dont la stupidité intrinsèque fait qu'il ne marche que quand il se prend au sérieux. Ici, le jeu outré de trois des personnages pousse vers la farce et déséquilibre le tout. Dommage aussi de ne pas voir plus les jouets maléfiques, formidables en stop motion et animatronics. De l'Eighties pur jus mais un beau potentiel gâché. BR UK

L'abbé Pierre, un vit de combat (Fred Tric, 2024) 0
De l'hiver 54 à sa mort en 2007, cinquante ans des luttes désespérées de l'abbé Pierre contre ses pulsions lubriques. Sur un sujet de société alarmant d'actualité - la solidarité sociale -, le film ne propose malheureusement qu'une succession ininterrompue de scènes sexuelles dégoûtantes autour des assauts du fondateur d'Emmaüs contre ses compagnonnes dévouées et quelques compagnons. Monté comme un âne, l'acteur principal est convaincant en trentenaire mais pas en nonagénaire. Honteux et confus. VHS

L'empreinte du Dragon Rouge / The terror of the Tongs (Anthony Bushell, 1961) **
A Hong-Kong en 1910, le capitaine d'un navire anglais traque le chef des Tongs, le gang mafieux qui a tué sa fille. Lanternes et pousse-pousse, gongs et qipao, courbettes et regards obliques... tous les clichés de la Chine exotique sont au rendez-vous de cet enthousiasmant film de vengeance qui bénéficie du savoir-faire de la Hammer côté décors, couleurs et sadisme. Cerise sur le gâteau de riz, c'est Christopher Lee le méchant, grimé en chinois sournois comme les autres rôles parlants. BR UK

Le pirate des Caraïbes / Swashbuckler (James Goldstone, 1976) **
En 1717 à la Jamaïque, une jeune femme intrépide fait appel à un pirate pour libérer son père, prisonnier du gouverneur britannique corrompu jusqu'à la moelle. Classique dans son traitement, ses décors et son enthousiasme curtizien pour la voltige et l'épée, un entraînant film de pirates évitant le pastiche rigolard pour offrir une sorte de joyeux chant du cygne du genre. Mais rien n'est poussiéreux : le casting (Robert Shaw, James Earl Jones, Geneviève Bujold) et l'esprit sont modernes. BR FR

Pas de vagues (Teddy Lussi-Modeste, 20233) **
En sortant du cadre, un jeune professeur de français de 4e idéaliste provoque dans son collège une rumeur qui défait sa vie. Inspiré par une expérience vécue du réalisateur, un film de société à charge contre l'Education Nationale qui nous place du point du vue unique du personnage vis à vis de son entourage professionnel et privé. Ce choix unilatéral est discutable mais l'histoire, écrite et mise en scène sans fioriture, interpelle et consterne. François Civil, sans surprise, est parfait. BR FR

Meurtre sous contrat / Murder by contract (Irving Lerner, 1958) ***
À L.A., un tueur à gages (Vince Edwards, brillant) accompagné de deux observateurs prépare un assassinat commandité par un parrain. Ce n'est pas le sujet de cette série B qui en fait le génie, c'est son traitement du temps dans l'écriture minimaliste et la mise en scène elliptique. D'un postulat de Film Noir, on se retrouve avec le portrait d'un type qui navigue entre sagesse et sociopathie, indéchiffrable. Cool et tendu à l'extrême, pas étonnant que ce soit un des films de chevet de Scorsese, toujours de bon conseil. BR UK

The Primevals (David Allen & Chris Endicott, 1978-1994-2023) ***
Une universitaire (Juliet Mills), deux scientifiques, un baroudeur et un sherpa partent dans l'Himalaya chercher un Yéti dont ils ont preuve de l'existence. Il a fallu 45 ans pour faire ce film d'aventures rêvé et commencé par Allen - mort en 1999 - et terminé par son collègue Endicott. Peu importe ses acteurs et ses dialogues à la noix : avec ses monstres en stop-motion, ses matte paintings et ses références cinéphiles, quelque chose de King Kong et de Jason et les Argonautes est retrouvé et c'est un enchantement. BR US

Le temps d'aimer (Katell Quillévéré, 2023) ***
De 1947 à 1965, la vie compliquée d'un couple marqué, elle ayant eu un fils d'un officier nazi, lui homosexuel dans le placard. Alors ça,  un mélodrame avec ce que le genre comporte de péripéties et d'invraisemblances en 2023 ? Et ça marche, parce que le scénario est sinueux à souhait et qu'Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste sont parfaits. Le film ne l'est pas, la mise en scène manquant de style et de panache mais *** pour la belle histoire d'amour et le culot d'un mélo au temps des préquels et des suites. BR FR   

Les sorciers de la guerre / Wizards (Ralph Bakshi, 1977) 0
Dans un lointain futur post-apocalyptique, deux humanités ont survécu : les créatures magiques et les créatures guerrières, dont les deux chefs sont des frères et ennemis mortels. Je n'en ai vu que 20' puis en accéléré tellement l'hybridation des techniques d'animation - classique, travelling sur image fixe, rotoscopie, film... -, l'infantilité de la narration et du propos et la laideur des personnages m'ont insupporté. Il parait que c'est un OVNI-culte. Foutaise. De Bakshi, le film-culte, c'est "American Pop" (1981). BR DE

La blonde de la Station 6 / Station Six-Sahara (Seth Holt, 1962) **
Au fond du Sahara, les cinq contractuels d'une petite station de forage anglaise tournent en rond entre eux quand débarque Carroll Baker. Jouant sans complexe sur la persona de l'actrice dans "Baby Doll" (1956), un huis-clos en sueur dont la première partie - les hommes sont seuls - aux connotations homo-érotiques est aujourd'hui bien plus forte que la seconde - la blonde arrive - aux enjeux attendus et obtenus. A l'époque, tout cela était sans doute titillant au possible, il en reste une chouette curiosité. BR UK

L'entraîneuse (Albert Valentin, 1938) ***
Une jeune entraîneuse parisienne descendue se reposer sur la Côte d'Azur s'y fait une sympathique bande d'amis aisés avant d'être rattrapée par son métier. Cadré par la chanson "Sans lendemain" de Fréhel, un beau film mélancolique d'une juste liberté des situations et des dialogues sur la compartimentation bourgeoise des âges et des milieux sociaux. Dans la lumière solaire méditerranéenne, Michèle Morgan débutante et d'un classicisme fou créé un personnage aussi touchant que déroutant. VHS

10 août 2024

Films vus par moi(s): août 2024


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais / NSP ne sait pas

La maison aux fenêtres qui rient / La casa dalle finestre che ridono (Pupi Avati, 1976) ***
Dans le delta du Pô, un peintre est appelé par un maire pour restaurer une fresque de Saint Sébastien dans une église de village. Un giallo italien - un genre que je déteste - qui m'a pourtant emballé pour le décor sensationnel des marais, l'argument original des fresques religieuses, l'extravagance de l'idée finale et, loin des outrances habituelles du genre, le jeu retenu des acteurs et la réalisation sans tapage. Pour moi, une découverte. DVD FR 

Dune : Deuxième partie (Denis Villeneuve, 2024) **
Sur la planète désertique, l'héritier se fait peu à peu le sauveur du peuple local harcelé par les colonisateurs ennemis. L'histoire se complexifie, les péripéties s'accumulent, le grand spectacle CGI aussi : si le film reste très digne et regardable, ce qui faisait l'originalité du premier (cf. ci-dessous) a presque disparu au profit des obligations du blockbuster de SF contemporain : le méchant méchant, les explosions, etc... Du coup, je n'ai pas ressenti l'enthousiasme d'hier, qui lui reste intact. Prime Video

Dune : Première partie (Denis Villeneuve, 2021) ***
Vers 10.000, l'héritier dynastique (Timothée Chalamet) d'une planète lointaine est amené à se rendre sur une autre, désertique mais riche d'un produit convoité : l'Épice. Une excellente adaptation - la première partie - du roman de Frank Hebert qui réussit presque tout à part l'imbécile réplique ouverte finale : fine synthèse de l'histoire, précision de la mise en scène, choix du casting, élégance majestueuse des visuels. C'est la SF que j'aime, ni pétaradante, ni roublarde. Juste avec une âme. BR FR

Les saisons du plaisir (Jean-Pierre Mocky, 1987) *
A 100 ans, le patron (Charles Vanel) d'une parfumerie organise un week-end dans son château pour choisir son successeur. Le seul intérêt du film, vraiment le seul, est le casting franchouillard hors-pair parce que l'histoire, les situations et dialogues, où chacun cherche de la bite et du cul, sont lamentables. Alors : Jean Poiret, Jacqueline Maillan, Darry Cowl, Bernard Ménez, Fanny Cottençon, Stéphane Audran, Jean-Pierre Bacry, Bernadette Lafont, Richard Bohringer, Denise Gray, Sylvie Joly...  BR FR

Sound of freedom (Alejandro Gómez Monteverde, 2023) **
Lâché par le FBI, un agent démissionnaire se lance à la recherche de deux enfants enlevés par un réseau pédophile colombien. Produit et distribué par des structures fondamentalistes chrétiennes, un film sulfureux condamné par la critique libérale qui n'est pas le navet décrit mais un thriller prenant, bien foutu et insidieux qui nous entraîne de Carthagène à la jungle des cartels avec Jim Caviezel, star-adepte des conservateurs et de QAnon. Vu avec l'esprit critique nécessaire, c'est aussi une passionnante plongée dans la rhétorique de Trump et de Musk. BR FR

L'oeil sauvage / The savage eye (Sidney Meyers, Ben Maddow & Joseph Strick, 1960) ***
Une divorcée encore jeune débarque à Los Angeles, espérant refaire sa vie. Cet argument narratif, pas développé, permet aux auteurs de construire un essai sur l'aliénation de l'individu dans l'Amérique de la fin des 50s. Sur les images d'un L.A. d'époque captées à la sauvette dans ses visages - extraordinaires - et ses lieux, la bande-son en voix off fait dialoguer la femme et la voix d'homme qui lui trotte dans la tête et l'interroge. Un poème existentialiste sans pareil, un chef-d'oeuvre. DVD Z2 FR 

Vincent doit mourir (Stéphan Castang, 2023) *
Un citadin sans histoires (Karim Leklou) continuellement agressé par les inconnus dont il croise le regard se réfugie à la campagne. Entre road-movie et survival, un film qui se révèle vite une judicieuse métaphore sur la rage individuelle et communautaire de la société actuelle dirigée par le jugement péremptoire. L'idée est excellente mais les péripéties trop répétitives pour emporter et une clause du scénario pêche sans appel : des lunettes noires permettraient à Vincent de régler son malheur. BR FR

Le dernier survivant / The quiet Earth (Geoff Murphy, 1985) **
En Nouvelle-Zélande, un ingénieur engagé sur un projet scientifique international se retrouve seul survivant au monde après une défaillance technique majeure. Ou pas. Un film de science-fiction "Fin de l'Humanité" qui reste volontairement ouvert à interprétations multiples tout en résonnant sans doute plus fort aujourd'hui qu'il y a quarante ans. Bruno Lawrence est très bon dans ses scènes solitaires aux situations et décors inattendus. De la S-F métaphysique pas mal du tout. BR UK  

Le dernier voyage du Demeter / The last voyage of the Demeter (André Øvredal, 2023) *
L'équipage d'un navire commercial découvre qu'il transporte les caisses d'un vampire et le vampire. D'après un passage du roman Dracula, un film d'horreur qui se veut de tradition classique - sans ironie et avec les trois unités - mais qui n'arrive pas à créer l'horreur, la faute à une réalisation plate et à l'usage répétitif des CGI. Il y avait du potentiel - l'idée de l'histoire est bonne - et quelques images/moments sont réussis mais globalement, on s'ennuie poliment. Et c'est pas le genre de Dracula. BR FR

Muscle Beach (Irving Lerner & Joseph Strick, 1948) **
Un week-end à Muscle Beach de Santa Monica. Pas un documentaire sur les premiers adeptes du bodybuilding grand public mais un poème visuel et musical sur l'insouciance des jours d'un été d'après-guerre. Sur les images solaires de la plage, des hommes, des femmes et des enfants, Earl Robinson chante un hymne à la vie - californienne - et à la seule chose qu'on possède vraiment, son corps. Si on pense un peu à "Olympia" de Riefenstahl, ce très court de 9' en est pourtant l'exact antithèse. YouTube

The Royal Hunt of the Sun (Irving Lerner, 1969) ***
En 1532, débarqué avec ses troupes au Pérou pour s'emparer de l'or des Incas, Francesco Pizarro capture l'empereur Atahualpa. D'après la pièce de Peter Shaffer, un étonnant hybride d'epic et de théâtralité qui repose sur les dialogues entre deux hommes qui apprennent à se respecter. Si Robert Shaw est shakespearrien en diable, Christopher Plummer est incroyable dans le rôle de l'Inca à la diction et au body language extravagants. Un film méconnu passionnant dans son sujet et sa forme. DVD Z2 DE