28 novembre 2009
Julianne Glamour
Julianne Moore n'a pas sa pareille pour porter dans les films le costume de l'upper-middle class des Fifties ou des Sixties. Cette photo (dont je n'arrive pas à retrouver le nom du photographe), montre qu'elle est aussi parfaite en créature des Forties. Le glamour n'a donc pas tout-à-fait disparu... retranché qu'il s'est dans l'univers morbide et glacé des magazines de mode.
23 novembre 2009
My Best of : Films-catastrophe
A l'occasion de la sortie universelle et de ma délectation individuelle pour 2012, voici dans l’ordre alphabétique une liste subjective de mes 10 (et quelques) films-catastrophe préférés. Si le film-catastrophe est par définition un film de distraction (« entertainment movie » ou « popcorn movie »), quelques-uns de ses chefs-d’oeuvre, comme on le voit ci-dessous, repoussent ce qualificatif jusqu’à son opposé extrême (« depression movie ») et peuvent vous foutre le bourdon pour des jours. Moi, j’aime les uns comme les autres…
The day after tomorrow / Le jour d’après (Roland Emmerich, 2004)
Le changement climatique y plonge la Terre (et New-York) dans un chaos indescriptible mais très cinématographique. Le message écologique donne au film un petit supplément de responsabilité qui n’est pas commun dans les films-catastrophe hollywoodiens mais ce n’est bien sûr pas pour ça qu’on a vu le film : c’est pour le savoir-faire d’Emmerich dans la composition de scènes de désastres naturels, qui reste inégalé (sauf par lui-même dans 2012). De la banquise qui se fissure au gel subit de la planète, en passant par le raz-de-marée sur Manhattan, les tableaux grandioses se succèdent avec enthousiasme. Et si les clichés scénaristiques sur la famille, les élus et les damnés abondent, c’est dans la nature-même du genre. On regrettera quand même quelques loups en CGI vraiment trop voyants, mais c'est chipoter.
The day the Earth caught fire / Le jour où la Terre prit feu (Val Guest, 1961)
Un excellent film britannique en noir et blanc avec un scénario assez original : à la suite d’une série d’explosions nucléaires, la Terre se rapproche du Soleil, chauffe et menace de se consumer. Avec une économie de moyens qui bénéficie au réalisateur, obligé de se concentrer sur le drame humain vécu par quelques personnages (notamment un journaliste qui couvre la catastrophe pour un journal londonien), le film possède une tournure documentaire qui continue à impressionner aujourd’hui. Les vues des rues et des parcs de Londres, devenus fournaises, se vidant peu à peu de la population font – paradoxalement - froid dans le dos. Une grande réussite du film-catastrophe (sur le mode sérieux), malheureusement trop méconnu, et qui rappelle évidemment les inquiétudes des années 1960 concernant la prolifération nucléaire.
A night to remember / Atlantique, latitude 41 (Roy Ward Baker, 1958) &
Titanic (James Cameron, 1997)
Film de tous les superlatifs, Titanic de Cameron, malgré ses nombreux défauts et mièvreries, reste un exaltant moment de cinéma-catastrophe (et d’effets spéciaux) dès lors que le paquebot approche de l’iceberg. Mais c’est A night to remember, que Cameron a pillé sans scrupule, qui demeure le meilleur film jamais réalisé sur le Titanic. Tourné dans un noir et blanc qui lui assure son aspect documentaire et écrit avec l’assistance de Walter Lord, l’historien spécialiste de la tragédie, ce film britannique raconte sans négliger aucun détail l’avant, le pendant et l’après du naufrage. Baker met en scène avec beaucoup de subtilité le drame individuel et collectif des passagers tout en offrant des images saisissantes et élégiaques de l’intérieur du navire qui coule. C’est l’un de mes films préférés, tous genres confondus.
The Poseidon adventure / L'Aventure du Poséidon (Ronald Neame, 1972) &
Poseidon (Wolfgang Petersen, 2006)
L’aventure du Poséidon a donné au film-catastrophe ses lettres de noblesse en 1972 (après Airport, qui était plus un mélodrame) et reste encore, près que quarante ans plus tard, l’un des meilleurs. Le suspense de l’histoire, les effets spéciaux mécaniques, les décors saisissants du paquebot retourné et les acteurs chevronnés qui réussissent à apporter une émouvante épaisseur à leurs personnages stéréotypés permettent au film d’atteindre un équilibre entre frisson et émotion que le genre semble aujourd’hui avoir perdu. Enfant, l’affiche du film a longtemps orné un mur de ma chambre : c’est aussi peut-être pour cela qu’il me tient particulièrement à cœur. En 2006, le remake de Petersen, sans égaler l’original, a privilégié l’action pure et a rempli sa mission avec panache, malgré les critiques assassines qui l’ont accueilli.
On the beach / Le dernier rivage (Stanley Kramer, 1959)
Comme d’habitude chez Kramer, le meilleur côtoie le pire dans ce film d’un rare pessimisme où quelques personnages attendent l’arrivée d’un nuage radioactif mortel sur l’Australie. Le meilleur, c’est la science du cadre large et du noir et blanc. Le pire, c’est la lourdeur démonstrative et de jeu de certains acteurs (Astaire, Perkins). Mais le sentiment désespéré qui imprègne tout le film reste impressionnant après un-demi siècle et certains moments sont de splendides moments de mise en scène : la marche d’Ava Gardner sur le quai devant les marins, l’arrivée du sous-marin dans le port presque désert de San Francisco, la recherche de l’émetteur du signal morse, le dernier profil d'Ava Gardner (à mon avis, elle n'a jamais été plus belle que dans ce film), les toutes dernières images. Et l’utilisation du magnifique "Waltzing Matilda" comme illustration musicale provoque, à chacun de ses passages, un réel pincement au cœur.
San Francisco (W.S. Van Dyke, 1936)
Seule la dernière demi-heure appartient proprement au genre du film-catastrophe, mais quelle demi-heure ! Le tremblement de terre et l’incendie de San Francisco (1906) sont reconstitués de façon très spectaculaire sur les immenses plateaux de la MGM et exaltés par une formidable science du montage, évidemment influencée par le cinéma soviétique. Les trois premiers quarts du film mêlent mélodrame, musical et opéra (quel panachage !) mais contiennent une tension palpable due au fait que le spectateur qui découvre le film attend les premières secousses sans savoir quand elles vont arriver. Certains détestent l’outrance lyrico-mystique de la dernière séquence mais je trouve pour ma part qu’elle obéit bien à la loi du film-catastrophe et de l’époque et qu’elle conclut parfaitement ce film étonnamment hybride, l’une des premières grandes réussites du genre.
Testament / Le dernier testament (Lynne Littman, 1984)
Ce film est sans doute le plus sombre et déprimant jamais réalisé dans ce sous-genre du film-catastrophe : le film d’extinction. C’est ce qui doit expliquer la négligence avec lequel il est traité dans les papiers sur le sujet et l’oubli public dans lequel il est tombé. Réalisé par une femme (c’est important : le ton a une sensibilité toute féminine), il raconte sans aucun recours aux effets spéciaux les conséquences d’une attaque nucléaire distante sur une famille d’une banlieue bourgeoise californienne. Le père, parti travailler en ville le matin, est sans doute mort le premier. A la suite des retombées radioactives, ses enfants puis sa femme (bouleversante Jane Alexander) s’éteignent les uns après les autres, dans leur décor quotidien inchangé. Un film désespéré et inoubliable qui choisit d’analyser la désintégration psychologique et physique d’une famille confrontée à sa disparition certaine.
The towering inferno / La tour infernale (John Guillermin, 1974)
Avec L’Aventure du Poséidon, le second pilier historique du genre. Je me rappelle l’avoir vu sur très grand écran au cinéma, lors d’une ressortie d’été, et d’avoir physiquement ressenti des vagues de chaleur ! C’est à mon avis (malgré mon attachement pour le Poséidon), le modèle insurpassable du film-catastrophe pré-CGI, avec son scénario codifié et efficace, son casting royal, ses décors rutilants puis ravagés et ses effets spéciaux à la fois artisanaux et démesurés. Personne ayant vu le film n’a pu oublier la scène des amants pris au piège des flammes, de l’ascenseur extérieur ou du sauvetage en nacelle entre les deux tours. Je crois même me souvenir que le film avait provoqué à sa sortie l’introduction de modifications dans les règles de sécurité sur les bâtiments de grande hauteur. Son titre lui-même est entré dans la mémoire collective et le prononcer réussit toujours à provoquer un délicieux petit frisson.
United 93 (Paul Greengrass, 2006)
Je classe ce film dans le genre du film-catastrophe même si il y est bien trop à l’étroit. L’éprouvant réalisme du film, dû à l’intelligence du scénario, à la justesse des acteurs et à la maîtrise de la réalisation, dépasse de loin les normes du genre auquel il est pourtant rattaché par de nombreux points : microcosme en péril, univers clos, tension croissante. Le film s’arrête au moment précis de l’impact au sol de l’avion détourné, nous laissant avec nos images mentales des images réelles et obsédantes du 11 septembre. Un film cathartique et passionnel qui est aussi une expérience sensorielle insupportable pour beaucoup. Si United 93 est bien du cinéma, les terribles images du 11 septembre ne sont-elles pas les images définitives (au moins jusqu’à aujourd’hui) du plus grand film-catastrophe qu’on puisse imaginer ?
When the wind blows (Jimmy Murakami, 1986)
J’ai récemment découvert ce bouleversant long-métrage d’animation britannique qu’on peut rapprocher de Testament, cité plus haut. Ici aussi, des anonymes subissent les effets des retombées d’une attaque nucléaire. C’est un couple de petits retraités dans la campagne anglaise. Ils se préparent à des moments difficiles en suivant à la lettre les instructions que leur donne la BBC. Puis l’électricité est coupée, l’isolement devient total, ils tombent malades et meurent. La transition progressive entre la combativité au début, leur incompréhension au milieu et leur résignation à la fin rythme les trois sections du film. La catastrophe, lointaine, est seulement suggérée, mais ses effets sur ces deux charmants petits vieux lui donne une résonance universelle. Un film qui commence avec pas mal d'humour pour finir dans une infinie tristesse.
When worlds collide / Le choc des mondes (Rudolph Maté, 1951) &
2012 (Roland Emmerich, 2009)
Produit par le génial George Pal, Le choc des mondes m’impressionna dans mon enfance quand je l’ai découvert à la télé, au point d'aller parfois scruter le ciel d’été pour essayer d'apercevoir Bellus et Zira s’approchant de la Terre. Sa naïveté me fait aujourd’hui sourire mais j’ai gardé une grande tendresse pour lui. Son remake inavoué, le superlatif 2012 d’Emmerich (encore lui) pousse le film-catastrophe vers des outrances jamais vues jusqu'ici. Les effets spéciaux digitaux actuels permettent tous les excès, péché mignon du réalisateur. De la Californie détachée qui plonge en cinq minutes dans le Pacifique à l’Himalaya balayé par un tsunami, tout est désormais possible et montré, pour notre plus grand plaisir. Peu importe l’idiotie de l’ensemble, on s’accroche au fauteuil pendant 2h40... et on en redemande. Les américains ont inventé un nouveau qualificatif spécialement pour le film : « Disaster Porn ». De la sensation pure sans aucune émotion : on est loin du Poséidon et c’est assez bien vu.
The day after tomorrow / Le jour d’après (Roland Emmerich, 2004)
Le changement climatique y plonge la Terre (et New-York) dans un chaos indescriptible mais très cinématographique. Le message écologique donne au film un petit supplément de responsabilité qui n’est pas commun dans les films-catastrophe hollywoodiens mais ce n’est bien sûr pas pour ça qu’on a vu le film : c’est pour le savoir-faire d’Emmerich dans la composition de scènes de désastres naturels, qui reste inégalé (sauf par lui-même dans 2012). De la banquise qui se fissure au gel subit de la planète, en passant par le raz-de-marée sur Manhattan, les tableaux grandioses se succèdent avec enthousiasme. Et si les clichés scénaristiques sur la famille, les élus et les damnés abondent, c’est dans la nature-même du genre. On regrettera quand même quelques loups en CGI vraiment trop voyants, mais c'est chipoter.
The day the Earth caught fire / Le jour où la Terre prit feu (Val Guest, 1961)
Un excellent film britannique en noir et blanc avec un scénario assez original : à la suite d’une série d’explosions nucléaires, la Terre se rapproche du Soleil, chauffe et menace de se consumer. Avec une économie de moyens qui bénéficie au réalisateur, obligé de se concentrer sur le drame humain vécu par quelques personnages (notamment un journaliste qui couvre la catastrophe pour un journal londonien), le film possède une tournure documentaire qui continue à impressionner aujourd’hui. Les vues des rues et des parcs de Londres, devenus fournaises, se vidant peu à peu de la population font – paradoxalement - froid dans le dos. Une grande réussite du film-catastrophe (sur le mode sérieux), malheureusement trop méconnu, et qui rappelle évidemment les inquiétudes des années 1960 concernant la prolifération nucléaire.
A night to remember / Atlantique, latitude 41 (Roy Ward Baker, 1958) &
Titanic (James Cameron, 1997)
Film de tous les superlatifs, Titanic de Cameron, malgré ses nombreux défauts et mièvreries, reste un exaltant moment de cinéma-catastrophe (et d’effets spéciaux) dès lors que le paquebot approche de l’iceberg. Mais c’est A night to remember, que Cameron a pillé sans scrupule, qui demeure le meilleur film jamais réalisé sur le Titanic. Tourné dans un noir et blanc qui lui assure son aspect documentaire et écrit avec l’assistance de Walter Lord, l’historien spécialiste de la tragédie, ce film britannique raconte sans négliger aucun détail l’avant, le pendant et l’après du naufrage. Baker met en scène avec beaucoup de subtilité le drame individuel et collectif des passagers tout en offrant des images saisissantes et élégiaques de l’intérieur du navire qui coule. C’est l’un de mes films préférés, tous genres confondus.
The Poseidon adventure / L'Aventure du Poséidon (Ronald Neame, 1972) &
Poseidon (Wolfgang Petersen, 2006)
L’aventure du Poséidon a donné au film-catastrophe ses lettres de noblesse en 1972 (après Airport, qui était plus un mélodrame) et reste encore, près que quarante ans plus tard, l’un des meilleurs. Le suspense de l’histoire, les effets spéciaux mécaniques, les décors saisissants du paquebot retourné et les acteurs chevronnés qui réussissent à apporter une émouvante épaisseur à leurs personnages stéréotypés permettent au film d’atteindre un équilibre entre frisson et émotion que le genre semble aujourd’hui avoir perdu. Enfant, l’affiche du film a longtemps orné un mur de ma chambre : c’est aussi peut-être pour cela qu’il me tient particulièrement à cœur. En 2006, le remake de Petersen, sans égaler l’original, a privilégié l’action pure et a rempli sa mission avec panache, malgré les critiques assassines qui l’ont accueilli.
On the beach / Le dernier rivage (Stanley Kramer, 1959)
Comme d’habitude chez Kramer, le meilleur côtoie le pire dans ce film d’un rare pessimisme où quelques personnages attendent l’arrivée d’un nuage radioactif mortel sur l’Australie. Le meilleur, c’est la science du cadre large et du noir et blanc. Le pire, c’est la lourdeur démonstrative et de jeu de certains acteurs (Astaire, Perkins). Mais le sentiment désespéré qui imprègne tout le film reste impressionnant après un-demi siècle et certains moments sont de splendides moments de mise en scène : la marche d’Ava Gardner sur le quai devant les marins, l’arrivée du sous-marin dans le port presque désert de San Francisco, la recherche de l’émetteur du signal morse, le dernier profil d'Ava Gardner (à mon avis, elle n'a jamais été plus belle que dans ce film), les toutes dernières images. Et l’utilisation du magnifique "Waltzing Matilda" comme illustration musicale provoque, à chacun de ses passages, un réel pincement au cœur.
San Francisco (W.S. Van Dyke, 1936)
Seule la dernière demi-heure appartient proprement au genre du film-catastrophe, mais quelle demi-heure ! Le tremblement de terre et l’incendie de San Francisco (1906) sont reconstitués de façon très spectaculaire sur les immenses plateaux de la MGM et exaltés par une formidable science du montage, évidemment influencée par le cinéma soviétique. Les trois premiers quarts du film mêlent mélodrame, musical et opéra (quel panachage !) mais contiennent une tension palpable due au fait que le spectateur qui découvre le film attend les premières secousses sans savoir quand elles vont arriver. Certains détestent l’outrance lyrico-mystique de la dernière séquence mais je trouve pour ma part qu’elle obéit bien à la loi du film-catastrophe et de l’époque et qu’elle conclut parfaitement ce film étonnamment hybride, l’une des premières grandes réussites du genre.
Testament / Le dernier testament (Lynne Littman, 1984)
Ce film est sans doute le plus sombre et déprimant jamais réalisé dans ce sous-genre du film-catastrophe : le film d’extinction. C’est ce qui doit expliquer la négligence avec lequel il est traité dans les papiers sur le sujet et l’oubli public dans lequel il est tombé. Réalisé par une femme (c’est important : le ton a une sensibilité toute féminine), il raconte sans aucun recours aux effets spéciaux les conséquences d’une attaque nucléaire distante sur une famille d’une banlieue bourgeoise californienne. Le père, parti travailler en ville le matin, est sans doute mort le premier. A la suite des retombées radioactives, ses enfants puis sa femme (bouleversante Jane Alexander) s’éteignent les uns après les autres, dans leur décor quotidien inchangé. Un film désespéré et inoubliable qui choisit d’analyser la désintégration psychologique et physique d’une famille confrontée à sa disparition certaine.
The towering inferno / La tour infernale (John Guillermin, 1974)
Avec L’Aventure du Poséidon, le second pilier historique du genre. Je me rappelle l’avoir vu sur très grand écran au cinéma, lors d’une ressortie d’été, et d’avoir physiquement ressenti des vagues de chaleur ! C’est à mon avis (malgré mon attachement pour le Poséidon), le modèle insurpassable du film-catastrophe pré-CGI, avec son scénario codifié et efficace, son casting royal, ses décors rutilants puis ravagés et ses effets spéciaux à la fois artisanaux et démesurés. Personne ayant vu le film n’a pu oublier la scène des amants pris au piège des flammes, de l’ascenseur extérieur ou du sauvetage en nacelle entre les deux tours. Je crois même me souvenir que le film avait provoqué à sa sortie l’introduction de modifications dans les règles de sécurité sur les bâtiments de grande hauteur. Son titre lui-même est entré dans la mémoire collective et le prononcer réussit toujours à provoquer un délicieux petit frisson.
United 93 (Paul Greengrass, 2006)
Je classe ce film dans le genre du film-catastrophe même si il y est bien trop à l’étroit. L’éprouvant réalisme du film, dû à l’intelligence du scénario, à la justesse des acteurs et à la maîtrise de la réalisation, dépasse de loin les normes du genre auquel il est pourtant rattaché par de nombreux points : microcosme en péril, univers clos, tension croissante. Le film s’arrête au moment précis de l’impact au sol de l’avion détourné, nous laissant avec nos images mentales des images réelles et obsédantes du 11 septembre. Un film cathartique et passionnel qui est aussi une expérience sensorielle insupportable pour beaucoup. Si United 93 est bien du cinéma, les terribles images du 11 septembre ne sont-elles pas les images définitives (au moins jusqu’à aujourd’hui) du plus grand film-catastrophe qu’on puisse imaginer ?
When the wind blows (Jimmy Murakami, 1986)
J’ai récemment découvert ce bouleversant long-métrage d’animation britannique qu’on peut rapprocher de Testament, cité plus haut. Ici aussi, des anonymes subissent les effets des retombées d’une attaque nucléaire. C’est un couple de petits retraités dans la campagne anglaise. Ils se préparent à des moments difficiles en suivant à la lettre les instructions que leur donne la BBC. Puis l’électricité est coupée, l’isolement devient total, ils tombent malades et meurent. La transition progressive entre la combativité au début, leur incompréhension au milieu et leur résignation à la fin rythme les trois sections du film. La catastrophe, lointaine, est seulement suggérée, mais ses effets sur ces deux charmants petits vieux lui donne une résonance universelle. Un film qui commence avec pas mal d'humour pour finir dans une infinie tristesse.
When worlds collide / Le choc des mondes (Rudolph Maté, 1951) &
2012 (Roland Emmerich, 2009)
Produit par le génial George Pal, Le choc des mondes m’impressionna dans mon enfance quand je l’ai découvert à la télé, au point d'aller parfois scruter le ciel d’été pour essayer d'apercevoir Bellus et Zira s’approchant de la Terre. Sa naïveté me fait aujourd’hui sourire mais j’ai gardé une grande tendresse pour lui. Son remake inavoué, le superlatif 2012 d’Emmerich (encore lui) pousse le film-catastrophe vers des outrances jamais vues jusqu'ici. Les effets spéciaux digitaux actuels permettent tous les excès, péché mignon du réalisateur. De la Californie détachée qui plonge en cinq minutes dans le Pacifique à l’Himalaya balayé par un tsunami, tout est désormais possible et montré, pour notre plus grand plaisir. Peu importe l’idiotie de l’ensemble, on s’accroche au fauteuil pendant 2h40... et on en redemande. Les américains ont inventé un nouveau qualificatif spécialement pour le film : « Disaster Porn ». De la sensation pure sans aucune émotion : on est loin du Poséidon et c’est assez bien vu.
Libellés :
My Best of,
My Best of : Films-catastrophe
11 novembre 2009
7 novembre 2009
Krazy Karaoke : L'Arche de Noé (Sheila... et Cie, 1977)
Rien ne vaut une chanson à texte (mais qui reste gaie et rythmée) pour se mettre de bonne humeur le matin avant d'aller étudier, travailler, zoner ou collecter ses allocs.
Bonne chanson et bonne journée !
"L'Arche de Noé" par Sheila... et Cie
(S. Jurgens, B. Zambrini / adapt : C. Carrère, J. Schmitt)
C’est incroyable !
Chaque fois que nous partons en vacances
On prend toujours trop d’affaires
Mais cette fois ci pas question !
Même si mes enfants me disent
Les animaux n’ont pas de chemise
Pas de robe, pas de valise
Ils nous ont vus faire nos bagages
Ils voudraient être du voyage
Qu’est-ce qu’on fait ?
On va décider
La chouette et ses lunettes quel regard elle a
On la prend dis Maman ?
Le lièvre aux grandes oreilles gambade déjà
On le prend dis Maman ?
Le canari qui s’est blessé on ne peut pas le laisser
Prend le si tu veux
On le prend dis Maman ?
Il guérira mieux
Et ton petit chien Framboise frétille déjà
On le prend dis Maman ?
L’agneau plein de bouclettes qui dort près de toi
Prend le prend le Maman
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est Maman !
On se serrera
On trouve toujours de la place pour ceux qu’on aime
Et si en chemin tombe la pluie
Ce sera comme au Déluge aussi
Le chat et la souris blanche qui ne se quittent pas
On les prend dis Maman ?
Et le canard sauvage qui le nourrira ?
On le prend dis Maman ?
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est Maman !
On se serrera
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est maman !
Va chercher ton Papa
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
Bonne chanson et bonne journée !
"L'Arche de Noé" par Sheila... et Cie
(S. Jurgens, B. Zambrini / adapt : C. Carrère, J. Schmitt)
C’est incroyable !
Chaque fois que nous partons en vacances
On prend toujours trop d’affaires
Mais cette fois ci pas question !
Même si mes enfants me disent
Les animaux n’ont pas de chemise
Pas de robe, pas de valise
Ils nous ont vus faire nos bagages
Ils voudraient être du voyage
Qu’est-ce qu’on fait ?
On va décider
La chouette et ses lunettes quel regard elle a
On la prend dis Maman ?
Le lièvre aux grandes oreilles gambade déjà
On le prend dis Maman ?
Le canari qui s’est blessé on ne peut pas le laisser
Prend le si tu veux
On le prend dis Maman ?
Il guérira mieux
Et ton petit chien Framboise frétille déjà
On le prend dis Maman ?
L’agneau plein de bouclettes qui dort près de toi
Prend le prend le Maman
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est Maman !
On se serrera
On trouve toujours de la place pour ceux qu’on aime
Et si en chemin tombe la pluie
Ce sera comme au Déluge aussi
Le chat et la souris blanche qui ne se quittent pas
On les prend dis Maman ?
Et le canard sauvage qui le nourrira ?
On le prend dis Maman ?
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est Maman !
On se serrera
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
Et sur la route on va penser c’est l’Arche de Noé !
Enfin ça ira
La plus belle c’est maman !
Va chercher ton Papa
La la la la la la la la la la la la
La plus belle c’est Maman !
6 novembre 2009
Photostories : Some like it cool (1958)
Cette rare photographie de plateau de Some like it hot donne une petite idée de l'ambiance qui pouvait parfois régner sur le tournage du chef-d'œuvre de Billy Wilder.
Nous sommes en 1958 et l'équipe du film s'attaque à la scène qui en deviendra la plus commentée : celle de la séduction sur le bateau d'emprunt. Tony Curtis a passé les décennies qui ont suivi le tournage à raconter les innombrables reprises que la scène nécessita, les dizaines cuisses de poulet qu'il dut ingurgiter et le calvaire qu'était d'embrasser Marilyn Monroe ("Kissing Marilyn was like kissing Hitler"). Dans son récent livre "The making of Some like it hot", il revient sur sa déclaration, niant l'avoir jamais dite et révèle en outre une longue liaison avec la star et peut-être, la paternité de l'enfant qu'elle portait lors du tournage. Ces révélations tardives sont de toute évidence le fruit de l'imagination débridée d'un vieux fanfaron un peu gâteux et prêtent plutôt à sourire qu'à s'étonner.
Dans la photo, Tony est à l'arrière-plan, assis bien droit sur le canapé. Il semble perdu dans ses pensées, lunettes à la main, en train de respirer un bon coup : "Keep cool, Tony, breathe!". Marilyn, elle, est raide allongée sur le pouf, les yeux clos, la bouche entrouverte et les mains sur les seins. En pleine crise d'hyperventilation. Il viennent de passer une demi-journée à tourner la scène du baiser mais rien ne va. Les pleurs succèdent aux nerfs et il faut continuer, encore et encore. Une pause et hop, on repart jusqu'à la prochaine interruption accordée par le réalisateur. En regardant bien la photo, vous remarquerez d'ailleurs Billy, de dos, dans l'angle au fond de la pièce, comme au piquet puni. Mais c'est surtout le technicien à droite qui m'impressionne. Clope au bec, il traverse l'image de droite à gauche, en me regardant d'un air mauvais, prêt à me foutre son poing gauche fermé sur la gueule parce que j'aime tellement Some like it hot, ce film que j'ai vu je ne sais combien de fois alors que pour lui aussi, il est un vrai cauchemar.
J'ai découvert cette photo sur l'excellent blog Crazy for You qui déniche pour vous des images rares et des informations toujours intéressantes sur Marilyn, Madonna et quelques autres passions de sa sympathique rédactrice.
Nous sommes en 1958 et l'équipe du film s'attaque à la scène qui en deviendra la plus commentée : celle de la séduction sur le bateau d'emprunt. Tony Curtis a passé les décennies qui ont suivi le tournage à raconter les innombrables reprises que la scène nécessita, les dizaines cuisses de poulet qu'il dut ingurgiter et le calvaire qu'était d'embrasser Marilyn Monroe ("Kissing Marilyn was like kissing Hitler"). Dans son récent livre "The making of Some like it hot", il revient sur sa déclaration, niant l'avoir jamais dite et révèle en outre une longue liaison avec la star et peut-être, la paternité de l'enfant qu'elle portait lors du tournage. Ces révélations tardives sont de toute évidence le fruit de l'imagination débridée d'un vieux fanfaron un peu gâteux et prêtent plutôt à sourire qu'à s'étonner.
Dans la photo, Tony est à l'arrière-plan, assis bien droit sur le canapé. Il semble perdu dans ses pensées, lunettes à la main, en train de respirer un bon coup : "Keep cool, Tony, breathe!". Marilyn, elle, est raide allongée sur le pouf, les yeux clos, la bouche entrouverte et les mains sur les seins. En pleine crise d'hyperventilation. Il viennent de passer une demi-journée à tourner la scène du baiser mais rien ne va. Les pleurs succèdent aux nerfs et il faut continuer, encore et encore. Une pause et hop, on repart jusqu'à la prochaine interruption accordée par le réalisateur. En regardant bien la photo, vous remarquerez d'ailleurs Billy, de dos, dans l'angle au fond de la pièce, comme au piquet puni. Mais c'est surtout le technicien à droite qui m'impressionne. Clope au bec, il traverse l'image de droite à gauche, en me regardant d'un air mauvais, prêt à me foutre son poing gauche fermé sur la gueule parce que j'aime tellement Some like it hot, ce film que j'ai vu je ne sais combien de fois alors que pour lui aussi, il est un vrai cauchemar.
J'ai découvert cette photo sur l'excellent blog Crazy for You qui déniche pour vous des images rares et des informations toujours intéressantes sur Marilyn, Madonna et quelques autres passions de sa sympathique rédactrice.
4 novembre 2009
Les dimanches de Ville d'Avray (Serge Bourguignon, 1962)
En 1963, un obscur film français remporta à la surprise générale l’Oscar du Meilleur Film Etranger. Et depuis près d’un demi-siècle, prononcez devant n’importe quel américain sincèrement cinéphile à l'occasion d'une conversation sur le cinéma les trois mots « Sundays - and - Cybele » et vous verrez sans doute son visage s’illuminer et un léger sourire s’y esquisser. L’américain aura compris qu’il a en face de lui un fin connaisseur des films qui ont fait, de tous temps, la réputation du cinéma français à l’international, ce mélange bien identifiable d’intimisme et de provocation, de tendresse et d’audace et que le vrai dialogue peut commencer. Sundays and Cybele est un mythe aux USA, un souvenir presque effacé en France.
Car Sundays and Cybele, qui a comme titre original le lugubre mais évocateur Les Dimanches de Ville d’Avray, est un film qui a depuis bien longtemps disparu du radar des cinéphiles français eux-mêmes. Il est passé, il y a quelque temps déjà, mais bien discrètement, sur Canal+ et à La Cinémathèque Française. Il ne passera sans doute jamais plus sur les chaînes hertziennes et restera condamné (mais est-ce une condamnation ou une bénédiction ?) à flotter dans les limbes du cinéma. Je l’ai découvert il y a peu, à l’occasion de sa sortie dans une édition DVD allemande et l’ayant regardé sans aucun à priori ni attente, je dois dire que la surprise a été très bonne.
En 1962, Pierre, trentenaire, est un vétéran amnésique d’une guerre non nommée en Extrême-Orient (Vietnam ?), ancien pilote qui avait tué par accident, en s’écrasant avec son avion, une petite fille asiatique dans un village isolé. Il vit maintenant à Ville d’Avray avec son amie, une infirmière qui s’était occupée de lui à son retour d’Asie. De passage à la gare SNCF, il croise le regard d’une petite fille de 12 ans qui est conduite par son père dans un pensionnat catholique. Il décide de les suivre et remarque que le père maltraite l’enfant à laquelle il n’est apparemment pas très attaché et dont il souhaite se débarrasser au plus vite. Les pleurs de la fillette bouleversent Pierre qui revient plusieurs fois devant le portail du pensionnat en espérant la revoir. Il la revoit, réussit à attirer son attention et à gagner sa confiance à travers les grilles et, par un pieux mensonge, à se faire passer pour son père aux yeux des bonnes sœurs. Il obtient d’elles de venir chercher la fillette, Françoise (qui préfère se faire appeler Cybèle), chaque dimanche et de passer avec elle la journée hors de l’établissement, au parc, à la fête foraine, dans les rues de Ville d’Avray. Pierre et Cybèle se lient l’un à l’autre d’un attachement dont l’ambiguïté n’est pas sans poser problème à l’amie de Pierre, à ses quelques amis et bientôt, à l’entourage et au voisinage tout entier. Alors que Noël approche, la police s'en mêle et le scandale éclate…
De cette trame sulfureuse, adaptée d’un roman éponyme de Bernard Echassériaux, le réalisateur Serge Bourguignon (né en 1928), dont ce film est le principal titre de gloire, a tiré un long-métrage atmosphérique qui ne ressemble à rien de connu (à ma connaissance) à l’époque où il a été réalisé. Bénéficiant d’un scénario qui fait la part belle à l’évocation plutôt qu’à la démonstration, d’une splendide photographie en noir et blanc d’Henri Decae, d’un beau score relativement discret de Maurice Jarre, de l'utilisation de vieilles chansons françaises ("Aux marches du palais"), du format Cinémascope et de la présence d’acteurs tout en retenue, Les Dimanches de Ville d’Avray évite avec panache les pièges du sensationnalisme et du moralisme.
Cela n’empêche cependant pas le film de continuer à étonner et à déranger, près de cinquante ans après sa réalisation. Parce que c’est bien de pédophilie dont le film parle, sans, évidemment, jamais en prononcer le mot ni en montrer la chose. Il touche le sujet de très loin tout en l'évoquant de très près. Les deux personnages principaux, Pierre et Cybèle, sont chacun à leur façon, deux exclus qui se trouvent sans s’être cherchés. Pierre, psychologiquement et émotionnellement instable (depuis son accident oriental ?), a régressé au stade de l’adolescence, des pulsions difficilement contrôlables et de l’inconfort social. Cybèle ("si belle" ?), petite fille précoce qui est toujours plongée dans les livres et a ses opinions définitives sur tous les sujets, a été sevrée d’amour parental trop tôt (sa mère est morte, son père l'a abandonnée) et a compensé son statut d’orpheline solitaire en ayant développé des capacités intellectuelles et une indépendance peu communes à son âge. Lorsque leurs trajectoires se croisent, Pierre et Cybèle se reconnaissent l’un en l’autre, dans leur détresse affective et leur isolement social. Leur grande différence d’âge - il a 35 ans, elle en a 12 - ne leur pose aucun problème car elle n’a pour eux aucune implication. Pour les tiers (et pour le spectateur), c’est évidement une toute autre histoire…
Autour de Pierre et de Cybèle gravitent quelques personnages bien écrits, dont deux notamment sont remarquables. D’abord, l’amie de Pierre, Madeleine (formidable Nicole Courcel, comme toujours), qui essaye de comprendre avec toute la tendresse et l’amour qu’elle a pour Pierre son attachement à la petite fille et qui le regarde petit à petit s’éloigner d’elle. Ensuite Carlos (excellent Daniel Ivernel, comme toujours), l’ami et le confident de Pierre, un sculpteur qui lui aussi, essaye d’accepter l’étrange relation qui s’est tisée entre son ami et la gamine. Madeleine et Carlos, le moment venu, défendront Pierre contre la rumeur et les attaques, au risque de leur propre réputation. Tout le talent du scénario (par Pierre Bourguignon et Antoine Tudal) est de placer le spectateur dans la position de Madeleine et de Carlos et non pas dans celle de Cybèle et de Pierre, ce qui aurait considérablement nui au film en manipulant l’émotion de façon trop extrême. La distance nécessaire pour ne pas faire sombrer le film dans le racolage mélodramatique vient de ce point de vue extérieur à celui des deux personnages principaux du film. La naissance et l’évolution de la relation entre l’adulte et de la fillette nous sont présentées sans jugement social ou moral : comme Madeleine et Carlos, nous devons regarder et tenter de comprendre avant d’accepter de reconnaître notre incapacité à le faire.
Cybèle (Patricia Gozzi)
Dans le rôle difficile de Pierre, Hardy Krüger semble parfois assez mal à l’aise, ou plutôt maladroit, mais cela renforce pour le meilleur les failles et les tensions du personnage qu’il interprète. Cybèle, quant à elle, est jouée par la jeune Patricia Gozzi. Au début du film, le ton sentencieux avec lequel elle s’exprime et l’artificialité de certains de ses propos m’ont gêné et ont failli me faire sortir de l’histoire plus d’une fois. C'est son personnage. Au fur et à mesure de la progression du film, elle s’adoucit et devient plus naturelle : dans les dernières scènes du film, l'actrice joue la petite fille de 12 ans qu’elle a toujours été malgré les apparences de sa maturité intellectuelle. La relation d’amitié amoureuse qui lie les deux personnages est crédible et touchante, les deux acteurs réussissant à faire passer l’émotion et la détresse que leur situation individuelle et commune implique.
Les Dimanches de Ville d’Avray fait la part belle aux scènes intimistes et silencieuses, comme les promenades au bord des étangs de Ville d’Avray, dans le froid des dimanches d’hiver. Ou comme les scènes entre Pierre et Madeleine chez eux, dans la proximité de leurs corps et l'éloignement de leurs âmes. L’une des plus belles scènes du film est la rencontre de Pierre et de Cybèle avec un groupe d’enfants dans le parc du bord de l’eau. Sans effet démonstratif mais tout en nuance, Bourguignon nous y montre que Cybèle appartient au monde de l’enfance et que Pierre en est sorti depuis longtemps, et que malgré leur proximité affective, leurs univers sont irrémédiablement disjoints.
La relation pédophile évoquée dans Les Dimanches de Ville d’Avray n’est pas de nature sexuelle (aucune relation sexuelle n’est jamais suggérée entre Pierre et Cybèle) mais affective. Cela en diminue-t-il la condamnation morale qu’en fait la société par l’entremise du spectateur ? De façon très habile, le film nous laisse en face de nos propres interrogations, comme s’interrogent Madeleine et Carlos. Les deux personnages principaux ne brisent aucun tabou mais entrouvrent la porte sur des questions essentielles d’ordre moral et social. Il ne fait pas de doute que Pierre soit un prédateur (son stratagème d'approche de Cybèle le prouve irréfutablement) et pourtant la condamnation, par la sensibilité de l'écriture du scénario, n'est pas formelle. Drôle de position pour le spectateur... L’étonnement que le film dût provoquer dans les années 60 a fait place, cinquante ans plus tard, à une chape de plomb qui me semble destinée à ne pas s’alléger de sitôt pour des raisons qu'on imagine bien. Et on imagine mal, on n’imagine même pas du tout Les Dimanches de Ville d’Avray passer aujourd’hui à la télévision à une heure de grande écoute : le scandale qui en résulterait forcément en dirait long sur l’évolution de la pensée collective sur un sujet aussi délicat que celui évoqué par le film en l’espace d’un demi-siècle (son triomphe aux Oscars 1963 laisse d’ailleurs songeur…).
Je ne dévoilerai pas ici la fin de l’histoire, qui m’a semblé le seul point un peu faiblard du film (avec aussi quelques petits à-coups dans le rythme). Sachez toutefois qu’il ne s’agit pas d'un conte de fées et « qu’ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants » n’en est pas l’épilogue. Je dirai simplement que le film terminé, j’ai fortement pensé à un autre film du patrimoine français classique, avec lequel il a plus d’un point commun : Jeux interdits (1952) de René Clément. Les deux films pourraient faire l’objet d’un très intéressant « double-bill ».
Beau et sensible, audacieux et dérangeant, Les Dimanches de Ville d’Avray est un film aussi triste que son triste titre. Il montre qu’en ce début des années 60, entre le cinéma de qualité classique et les productions de la Nouvelle Vague, quelques réalisateurs circulaient sur une troisième voie. Serge Bourguignon en fit partie : son film est à la fois classique et nouveau, un peu dans la forme, beaucoup dans le fond. Si Les Dimanches de Ville d’Avray a accédé depuis longtemps au statut de film-culte aux États-Unis et au Japon, il est injustement oublié en son pays d’origine. C’est à mon avis un des films importants de l’époque, qui n’en est pas avare. Si vous en avez l’occasion, n’hésitez donc pas à le découvrir. Vous serez peut-être émus, peut-être dérangés, mais sans aucun doute surpris. Un film vraiment à part.
Le DVD Z2 des Dimanches de Ville d'Avray est sorti en Allemagne sous le titre Sonntage mit Sybill. Il est d’excellente qualité : très belle image N&B anamorphique, très bon son mono d’origine (français) avec option de doublages anglais, allemand, italien, espagnol. Sous-titres amovibles en de nombreuses langues.
Libellés :
1960-1969,
Dimanches de Ville d'Avray Les
1 novembre 2009
Films vus par moi(s), novembre 2009
*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais
The killing / L'ultime razzia (Stanley Kubrick, 1956) ***
Un scénario tiré au cordeau sans un temps mort, une réalisation se jouant de la chronologie, des acteurs parfaits et un suspense prenant : le premier chef-d'œuvre de Kubrick est l'une des plus pures pépites du film noir. DVD
Slumdog millionaire (Danny Boyle, 2008) **
Le choix crispant de la caméra penchée et de la photo dorée n'empêche pas de s'attacher à l'histoire dickensienne de ce gamin des bidonvilles. Un mélodrame énergique taillé sur mesure pour le succès international. DVD
Mamma mia! (Phillida Lloyd, 2008) ***
Les irrésistibles tubes d'Abba s'enfilent comme des perles, interprétés par des acteurs qui s'en donnent à cœur joie, dans ce musical solaire au charme fou. Un divertissement populaire qui remplit son contrat. DVD
Don't mess with the Zohan / Rien que pour vos cheveux (Dennis Dugan, 2008) *
En toile de fond de cette comédie totalement débile, le conflit israelo-palestinien et un salon de coiffure new-yorkais. Les gags s'enchaînent, parfois gonflés, souvent crevés. Sandler est extraverti comme jamais. DVD
My summer of love (Pawel Pawlikowski, 2004) ***
Press et Blunt crèvent l'écran dans cette histoire d'amitié amoureuse entre deux adolescentes dans un village du Yorkshire. Sensuel, touchant et cruel, le film irradie d'une photographie splendide de l'été anglais. DVD
Das weisse Band / Le ruban blanc (Michael Haneke, 2009) ***
Un chef-d'oeuvre au propos ciblé (l'Allemagne) où l'humiliation, la frustration et la violence font réfléchir, de façon plus universelle, sur la naissance des monstres. A forme magistrale, fond vertigineux. Ciné
The clan of the cave bear / Le clan de la caverne des ours (Michael Chapman, 1985) *
Le scénariste à oublié de raconter son histoire, le langage en monosyllabes est agaçant et que dire de Hannah en cro-magnonne blonde ? Restent les beaux paysages de Colombie Britannique. DVD
Brüno (Larry Charles, 2009) 0
"Borat", très drôle, avait pour lui l'avantage de la nouveauté. Baron Cohen remet ça et se ramasse avec son personnage de folle autrichienne plongée dans l'Amérique profonde. C'est fabriqué, réchauffé et nul. DVD
The mark of Zorro / Le signe de Zorro (Rouben Mamoulian, 1940) ***
Power incarne avec panache et humour un Don Diego/Zorro qui s'amuse à brouiller les pistes de sa propre identité. Le splendide noir et blanc, la Californie d'opérette et le savoir-faire de Mamoulian font le reste. DVD
Satan in high heels (Jerald Intrator, 1961) *
Un film d'exploitation assez ennuyeux qui se prend pour un mélo et un film noir. Mais la description d'un nightclub du début des 60's, la patronne lesbienne et les soutiens-gorge bien remplis valent le coup d'œil. DVD
2012 (Roland Emmerich, 2009) ***
Cataclysmes monstrueux, humour et sirop se mêlent dans ce pop-corn movie qui emprunte à tous les films-catastrophe passés et les dépasse. C'est du pur Emmerich : outrancier, abruti mais tellement fun. Ciné
The fantasy film worlds of George Pal (Arnold Leibovit, 1985) **
Un documentaire de 90' sur la carrière de G. Pal (1908-1980), un cinéaste-producteur dont les films ont émerveillé mon enfance. Des Puppetoons au Dr. Lao, cela donne envie de tout revoir, pour le charme et la poésie. DVD
The four horsemen of the Apocalypse / Les quatre cavaliers de l'Apocalypse (Rex Ingram, 1921) **
Du statisme à l'acte I, des tableaux épiques à l'acte II et Valentino, charismatique, devenu superstar du jour au lendemain. Un triomphe à l'époque, ce film ambitieux reste fascinant malgré un rythme inégal. Ciné
The lost world / Le monde perdu (Stuart Orme, 2001) *
Adaptation BBC assez fidèle de Conan Doyle, aux images qui semblent sorties d'un livre illustré. Des savants, des dinosaures, des indiens, des hominidés : un spectacle familial sympathique, mais sans plus. DVD
Born yesterday / Comment l'esprit vient aux femmes (George Cukor, 1950) *
Les suraigus de Holiday et surtout les cris de Crawford m'ont percé les oreilles et gâché le film, un peu trop théâtral. C'est dommage parce que le scénario est futé et que la trop rare Holiday a une présence unique. DVD
Angels & demons / Anges & démons (Ron Howard, 2009) ***
Après le fiasco du "Da Vinci Code", Howard se rattrape avec ce thriller haletant. Les fastes et les mystères du Vatican (spectaculairement recréé en décors et CGI) n'ont jamais été aussi délirants ni distrayants. DVD
Vertige (Abel Ferry, 2009) *
Les facilités du scénario minent ce survival français qui bénéficie des superbes paysages des montagnes croates. Si la première moitié du film est assez réussie, la seconde obéit à tous les poncifs du genre. DVD
The Judy Garland Christmas Show (CBS, 1963) ***
50 minutes en compagnie de Judy, de ses trois enfants (Liza, Lorna & Joe) et de quelques guests qui célèbrent Noël à l'américaine et en chansons. Chaleureux et émouvant, mais que Judy est triste derrière les rires. DVD
Chéri (Pierre Billon, 1950) *
Les acteurs (Desailly, Chantal, Marken) tentent de donner vie à leurs personnages étouffés par la réalisation théâtrale, anémique et abusant du flashback. DeBray écrase tout le monde par son jeu et sa présence. DVD
Timeline (Richard Donner, 2003) 0
Des archéologues américains se retrouvent en 1357 en Dordogne (filmé au Canada), en pleine Guerre de Cent Ans. Ça facilite les choses pour la langue. Un film poussif mal écrit et mal joué : de l'action à bailler. DVD
Musée haut, musée bas (Jean-Michel Ribes, 2007) 0
Ça court, ça crie, c'est plein d'acteurs connus qui y vont de leur numéro aux répliques attendues, c'est exaspérant. De sa pièce sans doute médiocre, Ribes a tiré un film nul et condescendant. Et même pas drôle. DVD
Oliver! (Carol Reed, 1963) ***
J'avais longtemps négligé ce musical sur Oliver Twist dont les chansons, les chorégraphies et la mise en scène appartiennent à ce que le genre a fait de mieux. Un grand classique anglais aux 5 Oscars mérités. DVD
Spencer's Mountain (Delmer Daves, 1963) **
Les paysages du Grand Teton (Wyoming), magnifiés par la caméra lyrique de Daves, volent la vedette à Fonda, O'Hara et MacArthur dans ce beau film familial archétypique, tranche d'Americana dans toute sa splendeur. DVD
Baccara (Yves Mirande, 1935) ***
La société des années 30 toute entière en prend pour son grade dans cette comédie grinçante et tendre aux personnages d'une rare ambiguïté identitaire et morale. Berry étincelle dans un rôle à contre-emploi. DVD
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