2 novembre 2024

Films vus par moi(s): novembre 2024

**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais 

La chose derrière la porte (Fabrice Blin, 2023) *
Dans la campagne de 1918, une veuve désespérée (Séverine Ferrer) utilise un grimoire médiéval pour faire revenir à la vie son mari tué à la guerre (David Doukhan). Voilà un film dont beaucoup d'images sont vraiment saisissantes mais qui déçoit par l'écriture trop lâche d'une histoire sans véritable direction. C'est dommage parce son thème - une variation sur la mandragore - est plein de potentiel et que l'Horror manque au cinéma français. Alors, il faut saluer le projet à défaut du produit final. BR FR

Un flic (Jean-Pierre Melville, 1972) ***
Un commissaire de la PJ (Alain Delon admirable) poursuit les auteurs d'un braquage. Personnages taiseux et sentiments refoulés, monde interlope de la nuit et artifice du décor et de la post-production : tout est porté à l'extrême dans ce dernier film de Melville qui, au-delà de l'histoire inspirée par le Film Noir américain, est surtout la plongée dans l'atmosphère d'un brouillard existentiel. En fait, les audaces formelles et narratives, qui peuvent rebuter comme enthousiasmer, portent l'oeuvre vers le film d'art. BR FR

Le propriétaire / The landlord (Hal Ashby, 1970) ***
Le fils d'une famille WASP (Beau Bridges) achète un immeuble à Brooklyn loué à des noirs pour le refaire en appartements à bobos. Les locataires qu'il rencontre lui font changer son point de vue sur eux. Le premier film - trop méconnu - d'Ashby est formidable. Le sujet explosif du rapport de classe et de race est traité avec une intelligence d'écriture et de mise-en-scène qui n'a pas pris une ride. On rit car c'est une comédie et on est touché. Puis on frémit en se disant que c'est redevenu pire aujourd'hui. BR UK

L'été de Giacomo / L'estate di Giacomo (Alessandro Comodin, 2011) **
Dans la campagne du Frioul, un adolescent sourd passe une journée d'été avec sa meilleure amie : marche dans la forêt, baignade dans un lac, visite d'un silo abandonné, fête foraine... Un film qui oscille entre documentaire et fiction en évacuant toute péripétie pour se concentrer sur deux jeunes gens dans leurs rôles proches de la réalité. La nature ensoleillée, le temps suspendu, l'évidence des choses et les émotions sans filtre du charismatique Giacomo Zulian évoquent presque un conte des origines. BR FR

Longlegs (Osgood Perkins, 2024) *
Une jeune flic du FBI renfermée mais visionnaire traque un serial killer peu commun. Une sensation marketing qui n'a mérité ni son succès ni ses éloges. C'est une déclinaison du "Silence des agneaux" (Demme, 1991) adossée à un contexte sataniste d'une roublardise toute contemporaine et avec une actrice principale (Maika Monroe) uniformément inexpressive. Reste la curiosité de ne pas reconnaitre l'extravagant Nicolas Cage, qui s'en donne à coeur joie sous sa prothèse faciale. Rien que pour ça ? BR DE

Trap (M. Night Shyamalan, 2024) **
Un père (Josh Hartnett épaissi à 45 ans) accompagne sa fille au concert d'une pop star dont elle est fan. Serial killer, il découvre que le show est un piège monté par la police pour le capturer. Un thriller bancal, poussif dans sa première partie puis nerveux dans la seconde, mais qui malgré ses invraisemblances à la pelle fonctionne par des twists assez malins, dont une excellente scène avec un portable. Tout le casting joue mal - ou faux - ce qui ennuie au début puis intrigue. Moins que bon mais plus que moyen. BR DE

Les charbons ardents (Hélène Milano, 2019) **
Dans des 1ères pro en mécanique du Nord, d'Ile de France et des Bouches du Rhône, quinze élèves-apprentis de 16 à 19 ans se confient sur ce que c'est qu'être un homme quand on vient d'un milieu simple dans une cité. Un documentaire révélateur et touchant sur l'expérience et l'idée de la masculinité dans la France des banlieues populaires d'aujourd'hui. Derrière les stéréotypes virilistes auxquels ces garçons sont obligé de se conformer pour exister dans le groupe, on sent les fragilités enfouies. DVD Z1 FR

Tarzan et la vallée de l'or / Tarzan and the valley of gold (Robert Day, 1965) *
Tarzan ramène chez lui un jeune Aztèque capturé par un criminel qui convoite l'or légendaire de son peuple. Un film léger jusqu'à l'inconsistance qui commence à Acapulco, avec Tarzan en costume dans une séquence à la James Bond et continue dans la jungle du Mexique. Trois choses à garder : le look et la musique pop Sixties,  le décor impressionnant de Teotihuacan et l'ex-athlète Mike Henry dans le rôle titre. Avec son corps et son visage sculpturaux érotisés à mort, il fera deux autres Tarzan. DVD Z1 US

Shin Godzilla / Godzilla Resurgence / Shin Gojira (Hideaki Anno &  Shinji Higuchi, 2016) ***
A Tokyo, les autorités locales et nationales cherchent une solution face à un monstre amphibie qui ravage la ville. Après des années d'appropriation hollywoodienne, la Toho récupère son icône avec ce reboot qui revient à la source. Un film déroutant, concentré sur les discussions sans fin des fonctionnaires plutôt que sur l'action dynamique, néanmoins présente par séquences. Le message est clair : Que s'est-il passé à Fukushima ? Les métamorphoses de Godzilla sont une superbe idée, jusqu'à la dernière. BR UK

The boy (William Brent Bell, 2016) *
Traumatisée par la violence de son ex-boyfriend, une étudiante plaque tout et se fait embaucher comme baby-sitter d'un petit garçon. Elle découvre qu'il s'agit d'une poupée qui a remplacé l'enfant, mort depuis longtemps, de ses parents devenus vieux. Hésitant entre le psychologique et l'horror, un petit film sans prétention qui prend son temps en atmosphère avant de virer dans l'action attendue après le twist plutôt bien amené. Shyalaman en aurait sans doute fait quelque chose de plus puissant. BR FR

L'esclave aux mains d'or / Golden boy (Rouben Mamoulian, 1939) *
A New-York, une agente sportive convainc un jeune violoniste de se lancer dans les championnats de boxe. Sur un sujet risible, un mélodrame ennuyeux et bavard qui révèle son origine théâtrale. Même le talentueux Mamoulian à la barre n'arrive pas à faire grand chose - sauf de "La Vierge à la Chaise" de Raphaël un quasi-personnage - mais le film vaut d'être vu pour Barbara Stanwyck qui y imposait son protégé William Holden dans son premier rôle. A 21 ans, il y est aussi mauvais que beau. BR US

Godzilla Minus One / Gojira Mainasu One (Takashi Yamazaki, 2023) ****
En 1947, un ex-kamikaze doit surmonter sa peur pour aider à la lutte contre un monstre marin qui menace Tokyo. Une formidable adaptation du Godzilla original (Ishirō Honda, 1954) qui remplace la métaphore du péril atomique par celle du PTSD - troubles du stress post-traumatique - et de ses abysses. Totalement imprégné des concepts jungiens - l'inconscient collectif, l'archetype, le complexe, l'anima... - et de références cinéphiles, un blockbuster intime à la fois spectaculaire, profond et humain. Cinéma (dans sa splendide version N&B, qui me semble la seule adaptée au propos)

4 commentaires:

  1. Ah la vache, me suis pris un coup derrière la tête en lisant rapido ton post que je n'ai pas vu venir sur Classik au sujet de la fermeture définitive de Disc King du 14ème.

    Une boutique que j'aime bcp dans laquelle j'ai souvent fureté (idem pour le quartier, à deux pas du "Les 7 Parnassiens"). Comme le dit la chanson "Trochę ciepła" de Gora Andrzejewicz " Les souvenirs m'étreignent" et c'est avec une amertume non dissimulée que j'ai lu le petit récit que tu en as fait. J'avais des doutes, enfin je m'étais posé la question il y a environ 8 mois/1 an quand j'avais vu quelques destockages massifs. Et puis je lui avais posé la question, il m'avait quelque peu rassuré, même si je sentais que ce n'était pas forcément une période faste.

    Les trois derniers mois ont du être très difficiles. Dis-moi, continue t'il de vendre des VHS ? La curiosité me pousse à y retourner rapidement bien qu'il m'ait bcp vu ces derniers temps. Un certain nombre de boutiques ont fermé depuis deux ans. Celles de Disck King des autres arrondissements, la Boulinier du Boulevard Saint Michel, du Boulevard Mcdonald, etc.

    Ta photo est belle et représente très bien l'atmosphère de la nuit tombante, nuit dans laquelle les lumières éclairent les visages des cinéphiles petits et grands s'affairant à trouver de belles découvertes en support physique.

    Et tu as raison le gérant est très sympa et en connaît un rayon (sans mauvais jeu de mots). Je me rappelle qu'une fois une cliente très bornée et hyper sèche lui demande sur un ton brutal s'il n'a pas telle comédie de tel réalisateur italien, il lui répond gentiment que non et en le déniant elle s'en va aussitôt arrivée.

    Je me rappelle aussi être passé à côté de "La dérobade" de Daniel Duval et l'avoir reposé. Exemplaire rare vendu et pas retrouvé depuis. Je me rappelle lui avoir dit que j'adore les VHS et le revoir revenir avec quatre cartons supplémentaires alors qu'il n'était pas obligé de le faire. Attentionné, patient, et me souhaitant toujours "Bons visionnages ! "

    Cela dit malgré la tristesse du ton, je me dis que s'il trouve ailleurs l'aventure ne s'arrête pas complètement et qu'on pourrait donc bien le revoir à un autre endroit. Et ainsi faire perdurer l'activité malgré tout...

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    1. Merci pour ton beau témoignage sur cette sympathique boutique et son gérant. Je n'ai pas remarqué s'il y avait des VHS ou pas (en fait, je ne l'ai jamais remarqué !) mais sans doute, ce n'est plus le genre d'article qui s'arrache à part pour toi ;)
      Moi aussi j'espère qu'il trouvera une solution pour continuer...

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  2. Il ne vend plus de VHS. Il y en avait bcp il y a encore six mois. Stockées devant la boutique, tout un rayon et d'autres dans des cartons. Toutes à 1 €. D'abord quelques unes, puis il a remis du stock (il y avait de tout : du bis, du polar, des classiques italiens, allemands, français, du cape et d'épée, de l'horreur, des comédies, etc) et j'ai du en acheter environ 80 à un moment donné dont des René Chateau, spécialement après sa mort. Là pour le coup il m'a dit n'en avoir plus du tout.

    Dommage, d'autant que je ne sais pas pour le coup ce qu'il a pu faire du stock qui lui restait, certainement entre 80 et 100 VHS. Il me semble en revanche qu'il n'y avait pas de Laserdiscs.

    Il prend les adresses mails pour alerter ses clients au sujet de la réouverture à une autre adresse dans le 14ème "si possible", nous serons donc prévenus....

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    1. Au moins, il a vendu une partie ses VHS à un collectionneur inspiré. ;)

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