L'autre jour, il neigeait sur Paris comme sur Peyton Place : c'était le bon moment pour passer une matinée paresseuse avec Return to Peyton Place (Retourne à Peyton Place !), la suite du grand mélo de Mark Robson. Un très bon moment effectivement, le film semblant fait pour ce temps qui donne envie de rester chez soi.
Il y a plein de plaisirs dans Return to Peyton Place, le moindre d'entre eux n'étant pas celui de reprendre tous les personnages du premier film en les faisant jouer par des acteurs tous différents, comme si ils étaient passés comme un seul homme entre les mains d'un chirurgien esthétique radical entre les deux films. C'est surprenant, c'est marrant. Il a aussi la fameuse grammaire mélodramatique appliquée à la lettre (voir le post consacré à Madame X sur ce blog), ce qui est toujours une occasion de grands bonheurs sémantiques. Il y a le Cinémascope et le Technicolor. Il y a ensuite l'effet de miroir entre ce que le film raconte et ce qui est vraiment arrivé à la pauvre Grace Metalious (l'auteure du roman "Peyton Place" et sa suite), mise au ban de la société de sa petite ville de province suite au succès à scandale de son livre (qui fut quand même en son temps, dit-on, le second livre le plus vendu au monde après la Bible) : Grace avait pourtant du nez, sa dénonciation de la bigoterie des puritains américains est bien vue et toujours valide, près de 50 ans plus tard. Et bien sûr, il y a Mary Astor, qui vampirise chaque scène dans laquelle elle apparaît : son rôle de mère abusive et réactionnaire se prêterait à tous les excès mais Mary Astor (quelle actrice géniale !) sait garder la mesure d'équilibre qui la rend plus effrayante encore que si elle était tombée dans l'outrance : sa dernière scène est un modèle d'understatement, une perfection.
L'acteur José Ferrer s'essaye à la réalisation correctement, c'est ni bien ni mal. Mail il y a quand même deux grosses faiblesses dans Return to Peyton Place, toutes deux liées aux limites d'acteurs. Carol Lynley ne sait tout simplement pas jouer (la seule fois où je l'ai appréciée est dans L'Aventure du Poséidon, où son rôle n'implique pas de savoir jouer) et plombe toutes ses scènes, ce qui est dommage quand on a le premier rôle. Et Jeff Chandler, en éditeur malin, ne semble pas à son aise, emprunté et peu convaincant. J'aurais préféré Joan Crawford, qui aurait d'ailleurs pu y prolonger son rôle de The Best of Everything, un autre mélo d'enfer (cf. le post dédié à ce film aussi sur ce blog) dont quelques accords de la musique sont étonnament utilisés dans la scène de la party de Return to Peyton Place. Il y aurait eu un piment supplémentaire. Tiens à propos de Crawford et Chandler, quand sortiront-ils enfin Female on the Beach (La Femelle sur la Plage) en DVD ?
Bref, Return to Peyton Place, s'il n'atteint pas les sommets de Peyton Place (pour ceux qui aiment ce genre, je comprend qu'il y ait de la résistance) ne mérite pas l'opprobe dont il est vêtu : je ne l'aurais sans doute moi-même pas vu sans une occasion inattendue. C'est une suite très décente d'un mélo difficilement égalabale, une suite qui dit des choses très justes sur les sociétés confinées, l'hypocrisie et les moyens de la défaire. Et puis, Mary Astor en mégère...
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