1 octobre 2017

Films vus par moi(s) : octobre 2017


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

A ghost story (David Lowery, 2017) ***
Le fantôme d'un homme tué dans un accident reste dans sa maison, désertée par sa compagne. Malgré deux scènes embarrassantes de longueur et de suffisance (la tarte et le monologue), ce film fantastique intimiste change de point de vue à mi-parcours en glissant du thème du deuil à celui de la fuite temporelle. L'idée simple, universelle et expressive du drap blanc est un coup de génie. Un poème existentiel d'une infinie mélancolie. BR US

Les amants de Caracas / Desde alla (Lorenzo Vigas, 2015) * 
Un quinquagénaire taciturne (Alfredo Castro) paie de jeunes hommes de la rue pour se déshabiller devant lui. Une relation de défiance et de respect taiseux s'installe avec l'un d'eux (Luis Silva). Dans le décor de Caracas filmée comme le tiers-monde, ce film au rythme lent et aux dialogues économes diffuse une violence physique et psychologique sourde jusqu'à une fin inattendue qui renverse tout. On s'ennuie quand même un peu. DVD Z2 FR 

La noire de... (Ousmane Sembène, 1966) **
A Antibes, une jeune femme sénégalaise embauchée par un couple blanc comme nounou devient leur bonne à tout faire et dépérit. Prix Jean Vigo 1966, ce moyen-métrage (1h) dénonce avec virulence la lutte des races et des classes et l'arrogance post-coloniale. Le budget réduit est compensé par un style cinéma-vérité, lui même contredit par la voix off, le symbolisme et le jeu outrancier de la patronne prédatrice. Un film activiste mais désabusé. BR UK 

Ant-Man (Peyton Reed, 2015) 0
Un délinquant (Paul Rudd) est recruté par un inventeur (Michael Douglas) pour être miniaturisé à la taille d'une fourmi et effectuer une mission. D'une idée à potentiel, le scénario adapté d'une histoire Marvel déçoit au fil du film et la mise en scène est une indigestion de caméra virevoltante (les courses des fourmis et les vols des fourmis-ailées) et d'excès de CGI. Du produit industriel qui se consomme mais que pour ma part, j'ai lâché en route. BR DE

Le sixième continent / The land that time forgot (Kevin Connor, 1974) 0
En 1916, un sous-marin découvre une île perdue restée dans la Préhistoire. Après une première demi-heure à bord du submersible, on rencontre enfin, comme les personnages, les dinosaures et les Néandertaliens. Si les effets spéciaux désuets ont encore du charme, le scénario et la réalisation ineptes n'exploitent rien à part la bagarre. Cette adaptation d'Edgar Rice Burroughs avait marqué mon enfance. J'ai piqué du nez en la revoyant, hélas. BR US

Alien : Covenant (Ridley Scott, 2017) **
L'équipage du vaisseau Covenant découvre une planète potentiellement vivable et part l'explorer, pour son malheur. Après la métaphysique de "Prometheus" (2012), ce sixième titre de la série revient - en moins bon - à l'action bourrine, mais divertissante, de "Aliens" (1986). Le scénario dynamique n'a pas peur des incohérences mais le spectacle est là et les bébés aliens sont croquignolets. Une bonne série B à gros budget. BR DE  

Pasqualino / Pasqualino Settebellezze / Seven beauties (Lina Wertmüller, 1975) ***
Pendant la guerre à Naples, un maquereau bravache (Giancarlo Giannini, magnétique) qui protège l'honneur de ses sept soeurs commet un meurtre et se retrouve au tribunal, à l'asile et dans un camp de concentration. Les stratégies de survie de cet antihéros contradictoire et la question de ce qu'on serait prêt à faire pour sauver sa peau occupent ce film inclassable, comédie italienne et tragédie noire pleine d'images indélébiles. Une fable radicale. BR US

Le corbeau (Henri-Georges Clouzot, 1943) ***
Une pluie de lettres anonymes bien informées déstabilise une petite ville française. Produit sous l'Occupation par Continental Films, ce chef-d'oeuvre subversif dresse le portrait collectif d'une communauté close et le portrait individuel de ses membres, pétris de frustrations et de jalousies. La mise en scène accumule les séquences d'anthologie, de l'école au cimetière et Pierre Fresnay mène un casting éblouissant où chacun donne le meilleur. BR FR

Get out (Jordan Peele, 2017) ***
Un jeune homme noir (Daniel Kaluuya, une révélation) qui accompagne en weekend sa petite amie blanche chez les parents de celle-ci s'inquiète de leur comportement bizarre à son égard. En glissant de la romcom au thriller puis au fantastique horrifique sur un scénario et une mise en scène magistraux, un film popcorn malin comme tout qui se révèle un brûlot politique sur le racisme de peau formidablement rageur et dérangeant. BR DE

L'île du Dr Moreau / The island of Dr. Moreau (Don Taylor, 1977) 0
Un naufragé échoue sur une île où un scientifique illuminé mute des animaux en humains (les prothèses des humanimaux sont plutôt bonnes). Le génial roman d'H.G. Wells est adapté platement dans ce film avec Michael York et Burt Lancaster où le scénario se traîne trop sage et où la mise en scène ne décolle que dans la séquence finale de la révolte. Cette version n'arrive pas à la cheville de l'inoubliable de 1932 ni même de celle de 1996. BR UK

Borom sarret (Ousmane Sembène, 1963) ***
A Dakar, un pauvre taxi-charrette (le "bonhomme charrette" du titre) prend en charge quelques passagers successifs. Ce court-métrage sénégalais de 20' est le film fondateur du cinéma africain, par son premier réalisateur. Derrière l'intérêt historique, la fluidité de la mise en scène, la luminosité de la photo et la voix off construisent une oeuvre à la poésie simple contredite par le propos féroce sur les multiples degrés de l'exploitation et de la misère. BR UK   

Space station 76 (Jack Plotnick, 2014) **
L'équipage d'une station spatiale, accro au Valium, est secoué de conflits personnels et collectifs. L'idée d'utiliser le look 70's (tout le design rappelle Cosmos 1999, Karting et Roche Bobois de la grande époque) apporte une amusante étrangeté à ce film dont l'humour le cède peu à peu à une fable mélancolique sur la solitude et la détresse affective. Patrick Wilson, Liv Tyler et Matt Bomer sont parfaits. Un exercice de style mais pas que. DVD Z2 DE 

Macbeth (Justin Kurzel, 2015) *
Poussé par sa Lady (Marion Cotillard), le général Macbeth (Michael Fassbender) assassine ceux qui sont sur son chemin vers la Couronne et sombre dans la folie. Cette adaptation de Shakespeare se concentre sur les visages chuchotants des acteurs baignés des feux orange de l'Enfer. Les Highlands d'Ecosse sont grandioses et l'histoire n'est pas mal mais il y a aussi des boursouflures dans la mise en scène qui touchent au kitsch. BR FR

Alpes / Alpeis (Yorgos Lanthimos, 2011) *
Les membres d'un groupe offrent comme service aux proches de décédés d'en jouer le rôle afin de faciliter le deuil. Sur une idée vraiment intrigante, ce film grec présente une métaphore originale sur le transfert psychanalytique et la vie par procuration dont l'austérité générale et le choix de cadrages serrés sur les personnages m'ont un peu rebuté. Le scénario trouve son accomplissement dans une belle scène finale. Une oeuvre difficile d'accès. DVD Z2 UK 

Le septième voyage de Sinbad / The 7th voyage of Sinbad (Nathan Juran, 1958) **
Aller-retour entre l'ile des Cyclopes et Bagdad avec Sinbad pour sauver sa princesse amoureuse miniaturisée par un magicien. Un pur film d'aventures pour enfants, petits et grands, au Technicolor rutilant et dont la naïveté est percée par des éclairs sadiques. Les monstres en stop motion de Ray Harryhausen ont marqué une génération de spectateurs et de réalisateurs : les cyclopes, la femme-serpent, l'oiseau rock, le dragon, le squelette vivant. BR DE

Lust in the dust (Paul Bartel, 1985) *
Au Nouveau-Mexique, plusieurs aventuriers cherchent à mettre la main sur un trésor caché. Un western parodique et camp où l'histoire n'est que prétexte à s'amuser de situations grotesques et d'une galerie de personnages outranciers menés par Divine (en chanteuse pute de saloon), Lainie Kazan et Tab Hunter. On rit souvent mais le rythme s'étiole dans la seconde partie et le film erre sans aller au bout de sa joyeuse subversion. DVD Z1 US

Akenfield (Peter Hall, 1974) **
En 1973 dans un village du Suffolk, le jour de l'enterrement de son grand-père, un jeune homme fait le bilan. L'accompagnement musical par le Corelli Fantasia de Tippett et les allers-retours narratifs et visuels entre présent, Première et Seconde Guerres Mondiales apportent à cette chronique rurale jouée par des non professionnels une puissante mélancolie. Un film sur le passage du temps qui réussit à être à la fois naturaliste et élégiaque. BR UK

Captured (John Krish, 1959) **
En 1950 dans un camp du nord de la Corée, quelques soldats anglais prisonniers des Chinois et des Russes sont soumis à la torture mentale et physique. Un étonnant docudrama (joué par des acteurs, réalisé comme une fiction) de 60' commandé par les services secrets britanniques et destiné exclusivement aux officiers pour les sensibiliser au sort possible de leurs troupes en cas de capture. Un document rare sur un sujet qui l'est tout aussi. BR UK

Leviathan (George P. Cosmatos, 1989) 0
Dans l'Atlantique, l'équipe d'une base minière découvre un organisme mutant qui la décime. Malgré quelques bonnes scènes d'atmosphère sous-marine, ce ertzatz américano-italien qui hybride Aliens, The Thing et Abyss n'a ni leur vision, leur mise en scène, leur casting ou leurs créatures réussies. Si le début suggère une sympathique série B, le reste descend au niveau du Z sans se relever. Un navet avec des moyens reste un navet. BR DE

Une vie de chien / A dog's life (Charles Chaplin, 1918) **
Charlot qui survit de débrouille dans la rue prend sous sa protection un chien errant. Ce court-métrage de 35' déborde d'humanité bien sûr, notamment dans le lien en miroir du clochard et du chien et dans la touchante jeune femme jouée par Edna Purviance. Il offre aussi deux morceaux de bravoure : l'empifrage de gâteaux au comptoir et surtout le jeu de mains illusionniste autour d'un évanoui, l'une des séquences les plus brillantes de tout Chaplin. BR UK

Chevalier (Athina Rachel Tsangari, 2015) *
Sur un yacht en mer Egée, six hommes entre 40 et 70 ans font des petits concours pour trouver celui d'entre eux qui est "globalement le meilleur". Toutes les insécurités masculines (du succès professionnel à la taille de la bite) sont passées en revue dans cette fable corrosive dont la bonne idée de départ est affaiblie par la répétitivité du scénario. Mais il y a des moments bien vus et le fait que ça soit une femme qui s'y soit collée est sympathique. DVD Z2 UK  

La meilleure façon de marcher (Claude Miller, 1976) ***
Dans une colonie de vacances en 1960, deux moniteurs aux personnalités opposées se cherchent et s'affrontent. Patrick Dewaere et Patrick Bouchitey jouent le jeu de la séduction et de la défiance dans cette subtile étude psychologique d'un rapport de force qui repose sur le stéréotype machiste et l'ambiguïté sexuelle. Tout est en suggestion et en suspens, comme dans les fondus au noir éloquents et la fin inattendue. Et puis, il y a Christine Pascal. BR FR

Vivre libre / Born free (James Hill, 1966) *
Au Kenya, Joy et George Adamson (Virginia McKenna et Bill Travers, très moyens) recueillent une petite lionne qu'ils s'obligent à laisser retourner à l'état sauvage devenue adulte. Les vastes paysages d'Afrique et le lyrisme de la musique de John Barry (qui triompha) sont le meilleur de ce film de bons sentiments et sans aspérité qu'une lecture en transfert de parentalité d'un couple sans enfant sur un animal rend plus intéressant qu'il est. BR UK

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