4 janvier 2013

Films vus par moi(s) : janvier 2013



*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Paperman (John Kahrs, 2012) ***
Un employé de bureau essaye d'attirer avec des avions de papier l'attention d'une jeune femme croisée sur un quai de métro. Un formidable court métrage (6'30) d'animation des studios Disney avec une nouvelle technique qui fusionne dessin et image de synthèse. L'animation est extraordinaire, l'histoire simple et touchante et le noir et blanc lui donne une intemporalité qui le rapproche de "Lonesome" (Paul Fejos, 1928). YouTube

The river / Le fleuve (Jean Renoir, 1951) *
La mièvrerie de la première partie du film qui s'attarde sur le quotidien insouciant de cette famille anglaise installée sur les bords du Gange m'a tapé sur les nerfs. La voix off qui décrit l'image aussi. Puis, le drame arrive et ca devient plus solide mais c'est un peu tard. Je reconnais que la mise en scène est remarquable, le Technicolor splendide et le propos sensible mais... Et quand on est allergique à la musique traditionnelle indienne... BR Fr

The duellists / Les duellistes (Ridley Scott, 1977) ***
Le premier film de Scott survalue son modeste budget par la beauté de sa photographie (ces paysages de Dordogne !), de ses costumes et de ses compositions marquées par la peinture du XVIIIe s. Intimiste dans sa forme comme dans sa narration, il est porté par le jeu intériorisé de Keith Carradine et enfiévré d'Harvey Keitel (les motivations peu claires de la haine de son personnage sont le seul point faible du scénario). BR US

Angst / Schizophrenia (Gerald Kargl, 1983) ***
Un psychopathe juste sorti de prison commet un triple meurtre gratuit dans une maison des environs de Vienne. Plus qu'un film de serial killer, un fascinant exercice de style où la caméra et les corps actifs et inertes sont soumis à une chorégraphie qui m'a fait penser à du Pina Bausch sous acide. Avec une géniale utilisation de la voix off du tueur qui nous fait entrer dans sa psyché. L'acteur (Erwin Leder), habité par son rôle, est terrifiant. BR Fr

Thor (Kenneth Brannagh, 2011) *
Un dieu nordique en guerre interfamiliale et galactique fait des va-et-vient entre sa planète et le Nouveau-Mexique pour récupérer son marteau magique et son trône. Une adaptation de Marcel au kitsch généreusement assumé qui s'amuse à donner à ses enfantillages des accents presque shakespeariens. Ca se regarde sans déplaisir mais s'oublie aussi vite que l'éclair, comme la plupart des films de super-héros. BR FR

The Puppetoon movie (George Pal & Arnold Leibovit, 1987) **
Une compilation de 11 courts-métrages d'animation en stop motion (les "Puppetoons") produits et réalisés par George Pal dans les années 30 et 40. Leur inventivité technique et leur sens de la poésie continuent à charmer et l'omniprésence de la musique (du jazz surtout) à leur donner un vigoureux dynamisme. "Tulips shall grow" (1942), jolie métaphore sur l'invasion de la Hollande, est un mini-classique. DVD Z1 US 

Les revenants (Fabrice Gobert pour Canal+, 2012) *
Près d'un barrage en Savoie, des morts reviennent chez eux et perturbent les vies de leurs proches. Une série française ambitieuse (inspirée par le bon film homonyme de R. Campillo de 2003) qui repose sur une idée passionnante et dont les premiers épisodes promettent. Puis ça se met à tourner en rond avec une languissante monotonie et des choix scénaristiques médiocres (le serial killer). Original mais poliment chiant. DVD Z2 Fr

Going down in La La Land (Casper Andreas, 2011) *
Une entrée de plus dans le genre du film où un jeune adulte arrive à Hollywood pour y percer à l'écran et se retrouve à vendre son corps. Ici, le personnage est gay et atterrit dans l'industrie du porno et de l'escort gays. Ca mélange comédie, drame et romance et n'a pas grand intérêt si ce n'est de porter un regard sans doute assez juste sur la faune et les règles du showbizz à L.A. et de bien évoquer l'atmosphère de la ville. DVD Z2 Allem.

Sucker Punch (Zack Snyder, 2011) **
Je ne sais pas vraiment ce que j'ai vu (un clip étiré sur 100' ? un jeu vidéo ? un musical dégénéré ? un caprice d'ego ?) et à aucun moment  - sauf dans l'ouverture et la toute fin, très réussies - je ne me suis investi dans l'histoire de ces quatre filles turbulentes mais l'outrance visuelle, l'avalanche de références filmiques (notamment "Showgirls") et sonores et la confusion assumée de l'ensemble m'ont finalement assez séduit. BR Fr

The queen of Versailles (Lauren Greenfield, 2012) ***
David Siegel, roi mondial de la propriété en time-share et parvenu modèle, se construit en Floride la plus grande demeure privée des USA quand la crise de 2008 frappe et efface sa fortune. Sa femme Jackie et ses huit enfants doivent revoir leur train de vie à la baisse du jour au lendemain. Un documentaire aux accents de fable et de soap-opera, à la fois drôle, vulgaire et tragique, sur les aléas du rêve américain. BR US

Triangle (Christopher Smith, 2009) **
Une balade en mer entre amis est ruinée par une tempête, un naufrage et se poursuit par la montée à bord d'un paquebot désert où une des naufragées se retrouve prise dans une série de boucles temporelles. Le scénario outrageusement alambiqué commence par intriguer, puis finit par lasser. Mais l'atmosphère à bord du vaisseau fantôme est pas mal du tout et dans un thriller fantastique, c'est ce qui compte. BR UK

Shadow of a doubt / L'ombre d'un doute (Alfred Hitchcock, 1943) ***
La naïveté et la perversité se répondent mutuellement dans cette chronique familiale baignée d'Americana où une jeune fille mürit brutalement à l'ombre d'un oncle adoré mais sociopathe. Les mouvements de caméra, comme une écriture, évoquent les émotions contrastées des personnages près desquels le Mal rode sans qu'ils s'en doutent. Teresa Wright et Joseph Cotten mènent un casting parfait (notamment la gamine). BR US

Stukas (Karl Ritter, 1941) *
Tout à la gloire des pilotes des Stukas de la Luftwaffe, un film de propagande nazi qui mêle studio, images d'archives et modèles réduits pour raconter le quotidien d'une escadrille pendant la Bataille de France en 1940. La musique et le mélodrame ne manquent pas, comme dans cette scène où un aviateur blessé entre en dépression avant de retrouver la pêche pendant un concert de Wagner à Bayreuth. DVD Z1 US

Moonrise kingdom (Wes Anderson, 2012) 0
L'histoire de ces deux gamins précoces et inadaptés (l'une dans sa famille, l'autre dans son camp scout) qui s'échappent  dans la Nature le temps d'une courte fugue est sensible mais l'insupportable chichitterie de la réalisation, autocontemplative et pleine des tics de l'auteur, écrase - et c'est rageant - tout le film de son affectation. Mais il y a la beauté des paysages maritimes de la côte Est des US : c'est au moins ça. BR Fr

Red state (Kevin Smith, 2011) ***
Un thriller qui débute comme un teenage movie pour obliquer vers des territoires plus sombres autour des sectes chrétiennes extrémistes, du port d'armes et de l'homophobie. La violence du propos est doublée de celle des images et si la toute fin est décevante (les éléments d'une autre, géniale, sont lâchés en route), l'originalité de l'ensemble reste captivante. Mention spéciale à quelques formidables numéros d'acteurs. BR UK

Skoonheid / Beauty (Oliver Hermanus, 2011) **
En Afrique du Sud, lors de mariage de sa fille un Afrikaner quadragénaire revoit le fils d'amis et en tombe fou de désir. L'homosexualité refoulée, le fossé des générations (plus le racisme en sous-texte) sont montrés avec une grande force suggestive dans ce film à l'atmosphère étouffante où l'isolement affectif fait des ravages. Introverti et peu loquace, à l'image de son personnage joué à la perfection par Deon Lotz. DVD Z2 Allem.

Les Misérables (Richard Boleslawski, 1935) 0
Il y a de tout un peu dans cette adaptation poussive : des galères aux égoûts, les grandes scènes du roman y sont mais diminuées à leur moindre intérêt par une mise en scène inexistante. March est un Valjean très correct et Laughton en Javert avait du potentiel mais l'incompétence du réalisateur les perd en ignorant le souffle épique que l'histoire nécessite. Un an plus tôt, Raymond Bernard en avait fait, lui, un chef-d'oeuvre. DVD Z1 US

Fantastic Mr. Fox (Wes Anderson, 2009) *
L'animation en stop-motion est formidable, les décors aussi et les personnages animaux ont chacun leur sympathique personnalité mais l'histoire n'a pas assez d'enjeux ni de profondeur pour maintenir l'intérêt sur la durée du film. Le phrasé très rapide et cool des dialogues qui crépitent m'a tapé sur le système. La prouesse technique est remarquable mais il aurait fallu quelque chose en plus pour que je sois emballé. BR Fr

A lonely place to die / Poursuite mortelle (Julian Gibley, 2011) **
Un thriller d'aventures assez prenant sur des alpinistes dans les Highlands qui trouvent une gamine croate sequestrée et sont poursuivis par ses ravisseurs. Les paysages naturels d'Ecosse sont splendides, les acteurs bons et les scènes de suspense bien conduites (pour ce genre de film très codifié). Il y a bien des clichés et des comportements improbables mais l'ensemble maintient une belle tension et c'est l'essentiel. BR UK

Hans Westmar (Franz Wenzler, 1933) **
A Berlin en 1929, un étudiant s'enrôle dans la S.A. pour lutter contre les étrangers, les juifs et les communistes qui veulent mettre la main sur la ville. L'histoire fortement réécrite du jeune martyr nazi Horst Wessel offre au cinéma du Troisième Reich le sujet d'un de ses premiers films de propagande enragée, dont il est un véritable archétype. Un document passionnant sur le cinéma comme outil politique. DVD Z1 US

5 commentaires:

  1. Bonsoir Tom,
    Plusieurs petits commentaires.
    Je suis content de voir que tu as apprécié trois films que j'ai personnellement adoré/beaucoup aimé.

    "Poursuite mortelle", sa remarquable gestion du suspens, son sens de l'espace (ces décors parfaitement mis en valeur !), la composition des cadres et l'interprétation. Les méchants ont quelque chose de terrifiant. Surtout Sean Harris, tueur implacable et parfaitement inquiétant. Et comme le disait Hitchcock, plus un méchant est crédible, meilleur en sera le film.

    "Triangle" est un film très particulier, je ne suis pas sûr d'avoir vu un tel dispositif de mise en scène depuis quelques années dans le cinéma fantastique et a fortiori dans le ciné tout court. Le film fait son effet sur le principe de la boucle temporelle : cette sensation qu'un petit détail ou qu'un truc banal peut durer éternellement, l'impression de déjà-vu, la lenteur des mouvements, la déconcentration ou encore la perte de repères visuels et sonores momentanée. Dans le film cette sensation est parfaitement retranscrite avec ces allers et retours, cette histoire ressassée, cette impression de semelles de plomb. Bref, le film a tout de ce que l'on peut appeler un "bad trip".

    "Sucker Punch" m'a fait l'effet d'un gigantesque tour de grand huit, avec pour une fois le mariage réussi du cinéma et du jeu-vidéo. Le film m'a semblé fun, et l'introduction a tout de suite donné le ton : enlevée, parfois sûre de ses effets, mais aussi diablement énergique (la scène du samouraï géant qui suit le démontre). Et j'ai été totalement transporté lors de la scène de l'attaque du train lancé à grande vitesse avec la bombe.

    @+

    Jordan

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  2. Bonsoir Tom,

    Dis-moi tu as vu Angst en VF ou en VOSTF sur le BR de Carlotta ?

    J'ai vu le film une première fois en VHS carrère vidéo et en VF il y a presque dix ans, recadrée, mais malgré tout, le film reste impressionnant techniquement parlant.

    Ensuite je l'ai revu, toujours en VHS (puisqu'il était indisponible à ma connaissance en DVD, et ce quel que soit l'endroit où un DVD peut sortir en édition vidéo)environ deux ans après, et je me suis plus intéressé à l'histoire (certes bateau) qu'à la technique. Choc. Du fait de la folie meurtrière latente qui gangrène tout le film à partir de la dixième minute pour ne plus jamais le lâcher.

    Je l'ai revu il y a quelques semaines, cette fois sur Youtube, mais en VO, sans sous-titres, et là, avec la voix originale c'est encore plus étrange. Je ne maîtrise pas l'allemand, mais les dialogues sont assez rudimentaires, et j'avais déjà vu le film en VF donc cela ne m'a pas posé de problème.

    Le film a largement influencé le cinéma de Gaspar Noé (que j'adore, c'est un avis personnel), notamment Seul contre tous (le prologue initial avec les images d'archives, l'utilisation de la voix-off qui devient logorrhée lors de la scène finale après le carton d'avertissement, le personnage central et la caméra collée aux basques). Noé lui même ne s'en cache pas et admire le travail formel, technique et pictural de Angst qui sera aussi pompé dans Requiem for a dream (les séquences caméra accrochée au pied).

    Un film unique en soi, difficile, je ne me souvenais plus de la scène d'agression de la jeune femme après le meurtre de la vieille dame, scène dans le tunnel sombre, une scène absolument horrible et quasi insupportable.

    Bravo à Carlotta d'avoir sorti le BR (il faut aussi regarder le prologue).

    @+
    Jordan

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  3. Jordan, j'ai vu Angst en VOSTF sur le BR Carlotta. Gaspard Noé parle du film dans une interview des bonus : à quel point il l'a marqué vis a vis de ses propres films comme tu dis et aussi sur le fait qu'il préfère la VF à la VO (la VF dissocie plus le texte de l'image et pour lui, ca renforce la schizophrénie du personnage). L'histoire elle-même ne m'a pas spécialement intéressé, les histoires de tueur se ressemblent toutes, mais le traitement par la réalisation m'a passionné avec ce que je dis plus haut, cette chorégraphie formidablement inventive de la caméra et des corps des acteurs. Très content de l'avoir découvert, je n'en avais jamais entendu parler avent sa réédition par Carlotta. A+

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  4. Waah, faut être sacrément culotté pour foutre 0 à Moonrise Kingdom et *** à Red State. En tous cas, intriguant point de vue, j'adore :)

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  5. Pour moi, c'est le contraire qui serait culotté, comme quoi tout est relatif. Merci pour vos visites.

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