4 juin 2024

Films vus pas moi(s): juin 2024


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais / NSP ne sait pas

Liaisons secrètes / Strangers when we meet (Richard Quine, 1960) ***
À L.A., un architecte et une femme délaissée par son mari deviennent amants. Je n'ai jamais vu Kirk Douglas et Kim Novak aussi bons que dans ce film sur l'adultère qui offre - c'est saisissant pour l'époque - un point de vue totalement adulte loin des stéréotypes du mélodrame. Seul l'impact social et psychologique de leur désir sexuel sur les deux personnages importe : les gros plans de leurs visages en CinemaScope disent tout. A forme hollywoodienne, un chef-d'oeuvre au ton très européen. Cinémathèque Française

La porte du diable / Devil's Doorway (Anthony Mann, 1950) ***
Un vétéran indien shoshone (Robert Taylor passé au fond de teint), médaillé de la guerre de Sécession, revient à la ferme familiale pour la développer. Aidé par la loi, un juriste raciste incite des éleveurs blancs à s'en approprier les terres. Un western d'une audace folle pour son temps qui traite du racisme colonial et de la misogynie professionnelle - l'indien prend une avocate sans client - avec une rigueur de narration et de mise en scène qui ne sacrifie en rien aux clichés. Le revoir aujourd'hui... BR US

Sous la Seine (Xavier Gens, 20243) *
A quelques heures d'un triathlon, une scientifique (Bérénice Bejo qui ne rigole pas) et la brigade fluviale de Paris traquent un grand requin qui sillonne la Seine et tue. Le film ose le premier degré, ce qui le rend plus intéressant avec ses invraisemblances au sérieux. Le concept est opportuniste, la  mise en scène routinière et les acteurs juste ok mais trois choses sont chouettes : Paris vu depuis le fleuve, Anne Marivin en Valérie Pécresse devenue maire de Paris et l'orientation de la fin. Netflix. 

Pandemonium (Quarxx, 2023) **
Pensant s'être tiré d'un accident de voiture, un type se rend compte qu'il a été tué et qu'il est arrivé en enfer. Il y rencontre deux âmes damnées, dont on découvre le sort. Entre horror et art & essai, un film qui imprime son malaise - je n'ai rien vu de l'humour que d'autres ont pu y trouver - par des situations, des idées, décors et une photo franchement inquiétantes. Avec un budget sans doute réduit, l'imaginaire noir l'emporte. La toute jeune actrice qui joue le petite fille du segment central est étonnante. BR UK

Skullduggery (Gordon Douglas, 1970) NSP
Dans la jungle de Nouvelle-Guinée, une anthropologue accompagnée de Burt Reynolds découvre une tribu du chaînon manquant, les Tropis. Un capitaliste l'apprend et les met au travail forcé, un prêtre veut les baptiser et l'une des petites femelles se fait engrosser par un membre de l'équipe. L'enfant à venir sera-t-il homme ou animal ? Procès. Une ahurissante adaptation darwino-marxiste-black panthers des "Animaux dénaturés" de Vercors d'un incorrect politique à grimper aux rideaux. Bouche bée. BR US

La maman et la putain (Jean Eustache, 1973) ***
Dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, un blanc-bec oisif discourant et autocentré partage sa vie sexuelle entre sa maîtresse et la jeune femme qu'il a abordée dans la rue. J'ai attendu tout ce temps avant de découvrir ce film qui entre illico dans mon Panthéon. Dès les premières scènes, le texte, le jeu, le ton, l'image et l'atmosphère m'ont happé pour me laisser pantois, 3h40 plus tard. Dans l'ordre, Jean Eustache, Françoise Lebrun, Jean-Pierre Léaud et Bernadette Lafont me sont désormais immortels. BR FR

Gentleman Jim (Raoul Walsh, 1942) ***
En 1892, un clerc de banque arriviste devient champion du monde de boxe grâce à son talent et son entregent. Sur l'histoire de James Corbett, qui a changé l'histoire de la boxe, le film qui a défini le film de boxe jusqu'à aujourd'hui. La mise en scène brillante de Walsh - même les réfractaires au sport y trouvent leur compte - et le jeu au charisme fou d'Errol Flynn sont irrésistibles. Quant à l'histoire d'amour, elle est transfigurée par Alexis Smith et son personnage de femme moderne. Un vrai classique. BR US

De Humani Corporis Fabrica (Verena Paravel & Lucien Castaing-Taylor, 2022) **
Le quotidien de quelques hôpitaux en France, de la salle d'opération à la salle de garde. Un documentaire  sensoriel - les auteurs sont ceux de l'extraordinaire "Leviathan" sur la pêche industrielle - qui explore les entrailles de l'hôpital comme celles des patients, montrant l'intérieur des corps et la fatigue des âmes. Le rire et la démence, la vie et la mort y vont côte à côte en une sorte de "Le Voyage Fantastique" revu par Dante. Le coeur du spectateur, lui, doit être bien accroché. BR US

La main / Talk to me (Danny & Michael Philippou, 2022) ***
Quelques ados s'amusent à se faire peur avec un main en plâtre qui les fait communiquer avec les limbes quand ils l'agrippent. L'expérience tourne mal. Un premier film d'horreur australien qui ne ménage pas ses personnages et ses spectateur sans se foutre d'eux. Au-delà du conflit lui-même, plutôt malin en s'appuyant sur le thème du deuil, c'est le regard sur la dynamique des online challenges de la Gen Z qui occupe la première partie qui est formidable. Le casting - Sophie Wilde en tête - est parfait. BR FR

4 commentaires:

  1. Gentleman Jim ❤️<3

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  2. Salut Tom ,

    Je me suis mis également récemment à Jean Eustache, en démarrant par son moyen métrage "Du côté de Robinson". Le plus surprenant sans doute c'est le ton assez mordant et surtout l'utilisation d'un langage cru voire grossier, chose inabituelle pour l'époque.

    Le reste m'a moyennement convaincu et les deux mecs sont quand même des têtes de cons (mais c'est volontaire) ce qui me laisse donc un goût d'inachevé car j'ai du mal à aimer des cons y compris dans la fiction. Même si cela reste subjectif.

    Ce qui fait le sel de ce film est à mon sens la description du Paris de 1964, ses boulevards, ses commerces et puis ces gens du quotidien qui parfois semblent surpris de voir la caméra, ses devantures de ciné avec les films à l'affiche.

    Il y en a une magnifique du "Cléopâtre" de Mankiewicz à un moment. Bref, j'attends de voir la suite et surtout le morceau de choix avec "La maman et la putain". J'aime bien Léaud, j'aime bien Laffont, j'aime bien Lebrun

    Pas vu "Sous la seine", mais c'est bien de pouvoir encore produire ce film de genre en France même si le côté production Netflix a de quoi agacer d'une certaine façon (j'ai essayé et je n'ai pas aimé cette plateforme). On dirait que c'est davantage produit pour la télé que pour le ciné. Et nombre de comédiens semblent trouver une autre "jeunesse" ou en tout cas un autre tournant de carrière avec.

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    1. Salut Jordan,
      Je suis d'accord avec toi sur Robinson d'Eustache, intéressant mais pas plus à part le vocabulaire et les situations crues et Paris. Tu devrais vraiment aimer La maman et la putain.
      Netflix, je me rends compte que ce n'est que par curiosité que je regarde quand un un film fait un buzz qui m'intrigue et - presque - à chaque fois, je suis déçu quand pas atterré...

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