2 mars 2025

Films vus par moi(s): mars 2025

**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Lumière. L'aventure continue ! (Thierry Frémaux, 2025) ***
A partir de 120 "vues" - les petits films de 50 secondes - ou extraits des Frères Lumière, un essai visuel qui rappelle qu'entre 1894 et 1900, les inventeurs du Cinématographe avaient tout compris du potentiel technique, narratif et artistique de leur invention. Admirablement restaurés, les vues choisies sont inédites pour la plupart - ils en ont fait 2000 - et par l'intelligence du montage et du commentaire malicieux de Frémaux, démontrent l'incroyable modernité de ces images d'il y a 100-130 ans. Sur grand écran, c'est tout simplement génial. Cinémathèque Française

Le beau mec (Wallace Potts, 1979) **
A Paris, un homosexuel de 27 ans gigolo et performer de cabaret répond aux questions du réalisateur qui met en scène ses baises et ses fantasmes. Un hybride de porno gay, de documentaire et de film d'art qui comme son titre l'indique, s'attache à son sujet, Karl Forest (aka. Jean-Paul Doux), un type virilement sexy et obsédé que de deux choses : le sexe et surtout lui-même. Le portée érotique du film est certaine mais c'est le document d'époque qui est le plus intéressant. Nestor Almendros et Rudolf Noureev, non crédités, ont participé au projet. BR US   

Paradis pour tou.te.s (Alain Jessua, 1982) *
Après une tentative de suicide, un agent d'assurance dépressif bénéficie d'un "flashage", le traitement révolutionnaire d'un psychiatre qui apporte au patient le bonheur permanent. L'illusion thérapeutique et l'anesthésie émotionnelle forment sujet de ce film fantastico-social au casting épatant (Jacques Dutronc, Philippe Léotard, Stéphane Audran...) mais à la mise en scène poussive et au look 1980 très daté. Surtout, voir les yeux éteints de Patrick Dewaere dans ce rôle, son dernier - il s'est tué peu après le tournage -, est infiniment douloureux. BR FR

La fille et le garçon (Jean-Marie Besset, 2023) **
Mu par le désir, un couple d'intellectuels libertins de Toulouse recueille un jeune couple d'expatriés. Le conformisme du couple et de la famille est explosé dans ce conte farci de références - lui est spécialiste de Diderot, elle du peintre Michael Sweerts - qui traite avec une légèreté lucide plusieurs sujets d'intérêt : les valeurs conjugales, la polysexualité, l'exploitation mutuelle des immigrés et de la bourgeoise cultivée. C'est sexy et littéraire, petit budget et malicieux. Avec Arielle Dombasle, Aurélien Recoing, Mina Kavani et Louka Méliava. BR FR

Teddy (Ludovic & Zoran Boukherma, 2020) **
Mordu par un loup, un jeune homme mal intégré à son cercle social subit des pulsions de plus en plus violentes : il se métamorphose en loup-garou. Comme son anti-héros campé par Anthony Bajon toujours très bien, un film hybride qui oscille entre réalisme et fantastique, facétie et tragédie. Le cocktail des contraires ne fonctionne pas toujours mais l'écriture des personnages, le regard sur la routine de leur village des Pyrénées et le portrait de ce Teddy en révolte sont très réussis. De l'horror à la française au ton vraiment original. BR FR

Petite nature (Samuel Theis, 2022) ***
A Forbach, délaissé par une mère paumée et instable, un garçon de dix ans reporte son amour sur son maître d'école. Porté par la performance d'une rare maturité et intensité du jeune Aliocha Reinert, un film sur un sujet tabou qui arrive à éviter à la fois l'exploitation et le malaise par l'intelligence du traitement des personnages et des situations, sur le fil. Les films sur les enfants sont rares, les bons une minorité : sur les frustrations culturelles et les désirs d'évolution de l'un d'entre eux, celui-ci atteint sa cible avec force et finesse. BR FR

Ma vie, ma gueule (Sophie Fillières, 2024) **
Une femme de 55 ans perd le sens de la vie et entre en dépression. Sur un sujet peu traité au cinéma car périlleux, un film à l'écriture et au ton très originaux qui oscille entre comédie et drame, réalisme et poésie. Les dialogues et les situations, souvent absurdes, réussissent à faire sourire et même rire, malgré la gravité du fond. Tout cela repose sur les épaules d'Agnès Jaoui, exceptionnelle de vulnérabilité, surtout dans la longue séquence de l'hôpital. Le film a été monté après le décès de la réalisatrice, selon ses indications. BR FR

Miséricorde (Alain Guiraudie, 2024) ***
Revenu pour l'enterrement de son ex-patron dans son petit village aveyronnais, un jeune boulanger déclenche les passions de quelques habitants : la veuve, le fils, le copain d'enfance et le prêtre. Par une poignée de personnages, Guiraudie explore le désir et la haine dans le vase clos de la campagne avec le drame, l'humour et les non-dits qu'il manie en maître. Comme d'habitude, les stéréotypes physiques, psychologiques et narratifs sont battus en brèche avec une audace tranquille exaltante. Félix Kysyl mène un casting en tout point formidable. BR FR

2 février 2025

Films vus par moi(s): février 2025


**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Gabriel over the White House (Gregory La Cava, 1933) ****
Pendant la Dépression, le nouveau Président des Etats-Unis reçoit un message céleste pour redresser le pays. Un film stupéfiant pour son temps, les années 1930 et plus encore pour le nôtre par sa résonance inversée avec Trump, acte II. Inversée car le Président de Walter Huston se donne les moyens de rendre America To The People Again par une sorte de dictature, mais de centre-gauche. Manifestations, tentative d'assassinat, purge de l'administration fédérale : tout y passe. Un mélodrame politique fascinant et absolument unique. BR US 

Gueules noires (Mathieu Turi, 2024) 0
En 1956 dans le Nord, un professeur descend dans une mine avec des gueules noires à la recherche d'une civilisation oubliée. Un film d'horror bancal dont la première partie sur les mineurs est très bien mais qui part à vau-l'eau une fois le monstre lovecraftien ridicule révélé : le scénario, les dialogues, les situations et les acteurs filent en roue libre. C'est dommage parce que le décor de la mine est superbe et l'horror à la française est rare. Avec Samuel Le Bihan, Philippe Torreton et Jean-Hughes Anglade qui cachetonnent. BR FR 

Film (Samuel Beckett & Alain Schneider, 1965) ***
Un homme qu'on ne voit que de dos entre dans un appartement presque vide où il se cache au regard d'animaux de compagnie et de photos sur les murs et dans un album.  Ecrit et dirigé par Beckett dont c'est la seule incursion dans le cinéma, un court-métrage de 22 minutes avec Buster Keaton en fin de carrière dont le caractère expérimental peut rebuter ou séduire. Le second pour ma part, mais seulement après la fin du visionnage quand j'ai cru percevoir le propos de Beckett sur l'oeil de la société et le regard sur soi. BR FR

Les félins (René Clément, 1964) 0
A Nice, un gigolo traqué par des tueurs trouve refuge chez une belle veuve qui l'engage comme chauffeur. Une autre jeune femme habite la maison. Un jeu du chat et de la souris qui bénéficie d'une photo N&B splendide et du décor de la Riviera mais dont le traitement mi-thriller mi-parodie et surtout le surjeu de tout le casting en voix post-synchronisée sont rédhibitoires. Le projet repose uniquement sur la beauté renversante d'Alain Delon et de Jane Fonda, qui minaude. Malgré ces atouts, le résultat est exécrable. BR FR

La salle des profs / Das Lehrerzimmer (Ilker Çatak, 2024) **
Dans un collège allemand, une jeune enseignante qui a laissé sa caméra d'ordinateur tourner dans la salle des profs pour voir qui commet des vols se retrouve harcelée par ses élèves, leurs parents et ses collègues. Une histoire d'engrenage autour de la rumeur et des opinions infondées portée par Leonie Benesch, dont le film épouse le point de vue. Derrière le thriller psychologique, une métaphore sur la disparition de l'esprit critique dans la société de meute et des revers de la bonne conscience de l'administration. BR FR

À nous les petites Anglaises ! (Michel Lang, 1976) **
Recalés au bac, deux lycéens parisiens sont envoyés réviser leur anglais à Ramsgate. Je n'avais de souvenir de ce film que son titre culte, son sujet, ses filles délurées et quelques images de booms qui m'avaient échauffé à peine ado. Revu cinquante ans plus tard, j'ai été surpris par sa narration et son rythme de chronique sans conflit qui n'aurait aucun intérêt si ce n'étaient la nostalgie et son casting tellement sympathique. Un film à la fois potache et tendre qui bizarrement, a résisté au temps. Et puis revoir Rémi Laurent. BR FR  

Aux sources du Nil / Mountains of the Moon (Bob Rafelson, 1990) ***
Entre 1857 et 1864, les deux expéditions aux sources du Nil de Richard Burton et John Speke et la dispute qui a suivi. Injustement méconnu, un grand film d'aventures coloniales qui dresse le portrait - assez romantisé - des deux explorateurs britanniques amis et concurrents. Patrick Bergin et Iain Glen sont formidables mais ce sont toutes les scènes quasi-documentaires dans les tribus africaines et les décors naturels à couper le souffle qui emportent tout. Du grand cinéma épique et intimiste à la fois, classique quoi. BR US     

Emilia Pérez (Jacques Audiard, 2024) ****
Aidé d'une avocate, un chef de cartel mexicain décide de transitionner et de se ranger du crime. Sur fond de questions graves - le violence du narcotrafic, le jugement sur la transidentité - un exaltant mélodrame musical dont l'originalité absolue du scénario et le panache des interprétations (Karla Sofía Gascón, Zoe Saldana, Selena Gomez) s'accordent à l'inspiration de la mise en scène et à la beauté des images pour donner un vrai classique. Peut-être que la résolution est un brin trop convenue mais bon. Women's Picture perfect. BR FR

The Apprentice (Ali Abbasi, 2024) ***
De 1974 à 1986, l'apprentissage en culot et amoralité de Donald Trump auprès de son mentor Ray Cohn. L'idée magistrale de ce biopic est de le baigner aux codes du film d'horror avec scènes nocturnes, décors néo-gothiques et personnages vampiriques. Et au choix de traiter l'image en grain vidéo de l'époque qui fonctionne au-delà du gimmick. Il en sort un portrait crédible de Trump en formation, dont Sebastian Stan s'empare avec brio, secondé par Jeremy Strong et Maria Bakalova en Ivana. Fascinant et effrayant, comme son monstre. BR FR

The Deliverance (Lee Daniels, 2024) 0
Dans un quartier noir de Pittsburgh, une mère de trois enfants et sa propre mère deviennent locataires d'une maison qui se révèle maléfique. Comment un film aussi bien sur ses premiers deux tiers, qui prennent le temps de suivre le personnage principal et sa famille dans leur quotidien pas facile, peut-il s'effondrer totalement dans son dernier tiers, une copie éhontée et honteuse de "L'Exorciste" ? C'est stupéfiant. Reste le casting, formidable, porté par l'excellente Andra Day et Glenn Close dans une incarnation géniale. Un naufrage. Netflix 

Pavillon noir / The Spanish Main (Frank Borzage, 1945) *
Dans les Caraïbes, le capitaine d'un vaisseau épouse la promise d'un gouverneur espagnol dans sa soif d'une vieille vengeance. Paul Henreid dans un rôle à contre-emploi et Maureen O'Hara dans un rôle aux petits oignons essayent ce qu'ils peuvent dans ce film de pirates assez poussif dans ses péripéties et sa mise en scène et abîmé par une musique de dessin animé pénible. Mais le spectacle est ailleurs, dans les maquettes et l'incroyable Technicolor Kalmus d'une outrance des couleurs insurpassée. Pour ça et rien que pour ça, c'est fascinant. BR US

Impact (Arthur Lubin, 1949) ***
Ayant survécu à l'assassinat fomenté par sa femme et l'amant de celle-ci, un riche industriel se réfugie anonyme à la campagne et est embauché dans une station-service tenue par une jeune femme. Un très bon thriller à la fois Film noir, Americana et Film de procès. Si la partie centrale - l'amitié entre Brian Donlevy et Ella Raines - est la meilleure, l'étonnant croisement des genres fonctionne. Avec Helen Walker en salope de luxe, Charles Coburn en vieux flic et Anna-Mae Wong en bonne (toutes ses apparitions sont ponctuées d'une petite mélodie chinoise). BR US  

Folle à tuer (Yves Boisset, 1975) **
Un milliardaire confie son neveu orphelin à une jeune femme qu'il sort d'une clinique psychiatrique. Les deux sont enlevés par des rançonneurs. Un film purement narratif dont les péripéties sont bien moins intéressantes que les personnages et leurs liens, tous frappés à divers degrés. Dans le décor de La Défense en chantier, Marlène Jobert, Michael Lonsdale, Victor Lanoux et quelques autres pointures ne prennent pas ça très au sérieux, éclipsés par le petit Thomas Wainthrop, génial en peste effrontée. BR FR  

The deep house (Alexandre Bustillo & Julien Maury, 2021) *
Un couple d'urbexers plonge dans un lac perdu pour explorer une maison engloutie. Hantée. Presqu'entièrement tourné sous l'eau avec des acteurs en bouteilles dans des décors immergés, l'aspect visuel inédit de ce film d'horror est son seul intérêt - avec le fait qu'il soit français - et c'est dommage. Parce l'idée est excellente et que la claustrophobie engendrée est réelle. Mais la faiblesse du scénario et des dialogues, insurmontable, noie l'ensemble et on se dit qu'ils sont passés à côté d'un petit classique. BR FR  

Running on Karma / Dai zek lo (Johnnie To & Wai Ka-fai, 2003) **
Un moine bouddhiste devenu culturiste stripteaser doté du pouvoir de voir le Karma des gens essaye de dévier celui d'une policière sur la trace d'un tueur. Invraisemblable - aux yeux occidentaux - hybride de thriller, comédie, gore horror, mélodrame, camp et philosophie bouddhiste, un film hongkongais à toute vitesse et couleur qui nécessite de lâcher ses préjugés et profiter du spectacle, et du message. Dans son costume de muscles en latex, la star Andy Lau fait une prestation irrésistible. BR UK 

MaXXXine (Ti West, 2024) ***
Une jeune actrice de porno embauchée pour le premier rôle d'un film d'horreur est suivie par un tueur en série. Le dernier film de la trilogie de West (après les excellents X et Pearl en 2022) recrée Hollywood en 1985 avec un hyperréalisme clinquant qui lui va comme un gant. La mise en scène, le scénario et les seconds rôles sont formidables, dynamisés par les clins d'oeil au cinéma et surtout Mia Goth, sans conteste l'actrice la plus magnétique du moment. Un slasher qui connaît ses classiques. BR FR

1 janvier 2025

Films vus par moi(s): janvier 2025


**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

L'homme inconnu (Anthony Schatteman, 2021) **
Sur la Côte d'Azur, un écrivain gay en panne observe un jeune couple qui se baigne dans une crique et retrouve l'inspiration. Sur un sujet mince comme tout mais solide, un court-métrage flamand de 20' qui bénéficie du décor imbattable du Cap Ferrat - ou d'un site proche -, du physique de ses acteurs - Samuel Suchod, à suivre (dans les buissons ?) - et d'un twist final bien mené. L'ambiance de l'été, avec les reflets du soleil sur la mer, le chant des grillons et la tiédeur de la brise font rêver. Internet

King Kong Ciné-Concert (Merian C. Cooper, Ernst B. Schoedsack + Joachim Latarjet, 1933) ***
Je suis allé voir par curiosité et pour le plaisir du grand écran mon film préféré en version ciné-concert avec la Compagnie Oh ! Oui..., trois musiciens et une demi-douzaine d'instruments. Traité comme un film muet, mais en gardant quelques dialogues, ajoutant des intertitres et en coupant ou accélérant des séquences, King Kong est le même et tout autre, un sacré film rock en tout cas. J'ai vraiment aimé. Pas comme la vieille dans la salle qui sous les huées gueulait qu'ils saccageaient son film. Musée de la Chasse et de la Nature, Paris

Un jeune chaman / Sèr sèr salkhi / City of wind (Lkhagvadulam Purev-Ochir, 2023) ***
A Oulan-Bator, un chaman de 17 ans tombé amoureux s'éloigne de la charge pour laquelle il a été appelé. Un film magnifique, porté par de formidables interprètes - dont Tergel Bold-Erdene, récompensé à Venise 2024 - sur la place essentielle mais fragile du chamanisme dans la société mongole en mutation. Situé dans l'étonnant quartier ancien des yourtes, ce coming of age movie pose de sérieuses questions sur notre rapport au spirituel et au collectif. Le premier film d'une réalisatrice à suivre. DVD FR

Eraserhead (David Lynch, 1977) **
Abandonné par sa compagne, un type lunaire (John Nance, dans un personnage inoubliable) doit s'occuper seul de leur bébé, sorte de foetus vivant, et en perd la tête. J'avais vu le film dans les années 80 et, tout en ayant admiré l'originalité radicale, la force des images et la travail sur le son, je me souviens m'être un peu fait chier. Quarante ans plus tard, avec quelques connaissances en plus sur la psychose et l'Inconscient, rien n'a changé et j'aime toujours autant la chanson de la fille du radiateur. BR UK

Madame Bovary (Sophie Barthes, 2014) 0
En Normandie, une jeune mariée insatisfaite qui rêve d'une vie plus excitante s'y brûle. Malgré la beauté du cadre et de la direction artistique, malgré les acteurs aux personnages rajeunis - Mia Wasikowska est bien mais trop superficielle - et évidemment malgré l'histoire - ici simplifiée -, on s'ennuie ferme dans cette n-ième adaptation qui n'apporte rien et reste platement illustrative du début à la fin alors qu'il faut un peu de névrose avec Emma. J'en ai vu la moitié en accéléré, sans regret. BR FR  

La horse (Pierre Granier-Deferre, 1970) *** 
En Normandie, un propriétaire fermier affronte les trafiquants dont il a détruit la drogue, dealée par son petit-fils (Marc Porel). Sorte de western du bocage, un thriller intimiste dont les éclairs de violence rythment une narration structurée sur la dynamique interne d'une famille commandée par le patriarche. Jean Gabin, dans la dernière partie de sa carrière, est monumental - au sens propre et figuré - dans le rôle taillé pour lui. Les dialogues dégraissés et la mise en scène sont excellents. Cette fin ! DVD FR

Ursus l'Invincible / Gli invicibili tre (Gianfranco Parolini, 1964) **
L'homme fort Ursus est appelé par un vieux roi à venir déloger l'usurpateur qui a pris le pouvoir sous le nom... d'Ursus. Deux Ursus pour le prix d'un donc dans ce peplum italien tourné dans les sables tunisiens. Les culturistes italiens Alan Steel - assez vulgaire - et Mimmo Palmara - plus classe - se partagent le nom et l'affiche, entourés de pépées aux yeux magnifiques et si le film n'a rien de spécial, il est fun, sympathique et coloré et la séquence aux chameaux est étonnante. Pour les fans du genre. BR FR  

La meilleure part (Yves Allégret, 1956) **
Le quotidien d'une équipe qui construit un barrage hydraulique. J'aurai pu mettre 0 parce qu'il ne se passe rien dans ce film plutôt ennuyeux. Mais le décor réel du barrage en construction de Plan d'Amont à Aussois dans les Alpes et la valeur documentaire d'un chantier de ce genre sont captivants, comme le discours (revendications salariales, traitements des travailleurs Algériens...) d'Allégret et de Gérard Philipe, star à contre-emploi. Un film gauche et de gauche qui est aussi raté qu'intéressant. DVD FR  

Sept hommes à abattre / Seven men from now (Budd Boetticher, 1956) ****
Un ex-shérif qui traque sept bandits responsables d'un cambriolage où sa femme a été tuée croise et accompagne un couple qui part en Californie en chariot. Le premier des sept sublimes westerns que Boetticher a tournés avec Randolph Scott pose les règles de l'ensemble : force du scénario, perfection de la mise en scène, réduction de la durée, économie du décor, du jeu et des attitudes. Cette alchimie unique créé de l'or par l'ajout d'un ingrédient final : l'humanité bouleversante des personnages. BR FR

Le Comte de Monte-Cristo (Matthieu Delaporte & Alexandre de La Patellière, 2024) ***
Entre 1815 et 1835, le calvaire et la vengeance forcenée d'un homme condamné au cachot et revenu à la société métamorphosé. J'y allais à reculons, ayant détesté Les Trois Mousquetaires, Part I que je mettais dans le même panier. Mais malgré la mise en scène platement anonyme et illustrative et l'omniprésence pénible de muzak, j'avoue que la noirceur préservée du roman à tiroirs de Dumas, le très bon casting et la splendeur de la direction artistique m'ont fait passer les trois heures comme deux. BR FR

Jane by Charlotte (Charlotte Gainsbourg, 2021) **
Un peu à Tokyo et à New York, surtout à Paris et dans sa maison de l'Aber Benoît en Bretagne, Jane Birkin parle d'elle et d'elles avec sa fille Charlotte. Se révèle, si on ne le soupçonnait pas déjà, une femme sensible et angoissée qui, jadis subliment belle, se voit vieillir seule en affrontant le cancer et la culpabilité du suicide de sa première née. Le documentaire, évidemment très intime, semble comme la captation d'une mémoire familiale doublée d'un câlin mère-fille un peu retenu. Attachant comme elles. BR US

La vie à l'envers (Alain Jessua, 1964) ****
A Paris, un trentenaire fatigué de tout ça décide de s'affranchir de ses obligations et de ses liens sociaux. Un regard sur la schizophrénie ou un pamphlet contre la société de consommation ? Sans doute les deux mais surtout le portrait radical d'un homme qui se libère par le vide. De tous les plans, Charles Denner est magnifique dans un rôle cousin de celui de Maurice Ronet dans "Le Feu Follet" (Louis Malle, 1963). Comme celui-là, c'est un chef-d'oeuvre du cinéma existentialiste. Une vraie découverte. BR FR