26 juillet 2013

Bye bye Bernadette


Bernadette Lafont (1938-2013)

Elle était toujours bien dans ses films, Bernadette Lafont, même lorsque les autres autour d'elle n'étaient pas à la hauteur. Elle avait réussi à se construire l'image d'une égérie du Nouveau Cinéma français des Années 60-70 et à se rendre durablement populaire dans des films plus convenus, de son insolente vitalité de jeunesse à ses années de grand-mère. Elle avait été mariée à Gérard Blain de 1957 à 1959, ça force le respect. Quand on la voyait dans des interviews TV, elle dégageait une personnalité sincèrement sympathique, elle devait l'être. J'ai l'impression qu'elle a toujours été là avec ses yeux pétillants et sa voix gouailleusement sexy si particulière. Aujourd'hui, elle est partie (à 74 ans, c'est trop tôt) et ça fait un peu, beaucoup, bizarre.


Il paraît que son film préféré de sa prolifique carrière était "Les bonnes femmes" de Claude Chabrol, 1960. Je crois que moi aussi, celui-là je l'adore. Bernadette Lafont, Pascale Audran, Clotilde Joano : tout est dit.


3 juillet 2013

Films vus par moi(s) : juillet 2013


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

Runaway train / A bout de course (Andrei Konchalovsky, 1985) **
En Alaska, deux criminels (un sociopathe et un simple d'esprit) échappés d'une prison montent sur un train de fret fou dont le conducteur est mort d'une crise cardiaque. Un film d'action bourrin très Eighties (c'est une production Golan-Globus) surclassé par une réalisation dynamique, le jeu halluciné de Jon Voight et d'Eric Roberts (tous deux formidables) et un sous-texte existentiel assez subtil. Adapté d'un script de Kurosawa (sic). BR UK 

Lincoln (Steven Spielberg, 2012) **
Superbement écrit et réalisé mais d'une austérité non événementielle qui peut rebuter, ce long film d'histoire et de dialogue qui se concentre sur les semaines de 1865 ayant mené au vote de l'amendement abolissant l'esclavage est un chapitre de plus dans le corpus "National Heritage" de Spielberg historiographe. Daniel Day-Lewis, Sally Field (qu'on retrouve avec grand plaisir) et Tommy Lee Jones sont, inutile de le dire, excellents. BR Fr

Manhattan (Woody Allen, 1979) **
Ca faisait des lustres que je ne l'avais pas revu. La photo N&B, la musique de Gershwin, la composition des vues de Manhattan sont splendides et les acteurs disent leurs textes intarissables à la perfection mais le personnage antipathiquement narcissique incarné par Woody Allen n'offre plus, 35 ans plus tard, l'impact de l'inédit. C'est le seul reproche que je je ferais à cette comédie mélancolique sur l'insatisfaction amoureuse des quadragénaires. BF Fr  

The paperboy (Lee Daniels, 2012) ***
Ceux qui comme moi raffolent des mélotrashs ne peuvent qu'être emballés par ce thriller sordide qui se désintéresse de son intrigue pour scruter les outrances de ses personnages, une bande de raclures comme on voit peu. Un casting parfait (Nicole Kidman - géniale - , Matthew McConaughey, John Cusack et même Zac Efron) se donne à fond dans le décor de la Floride de 1969. Un film camp, sexy, inquiétant et cruellement drôle. BR Fr

Il momento della verità / Le moment de la vérité (Francesco Rosi, 1965) ***
La carrière fulgurante d'un jeune espagnol devenu matador par appât du gain. Tourné dans un style à l'immédiateté quasi documentaire, un film tragique et brûlant comme le sable des arènes qui nous plonge au coeur de l'univers de la corrida avec des acteurs qui jouent leur propres rôles (Miguelin est le héros) et des toros qui crachent leur sang. L'antidote à "Arènes sanglantes" (que j'aime aussi) et le meilleur film sur le sujet. BR US

Niagara (Henry Hathaway, 1953) **
C'est évidemment la présence magnétique de Marilyn Monroe, ajustée dans des tenues toutes plus suggestives les unes que les autres et ne lésinant pas sur les poses lascives, l'éclatant Technicolor et le décor des chutes qui élévent ce très banal thriller adultère en un inoubliable moment de cinéma. Si la répétition du morceau "Kiss" tape un peu sur les nerfs, Jean Peters réussit à exister face à Monroe, ce qui n'est pas rien. BR US 

Les mistons (François Truffaut, 1958) *
La chouette liberté de ce court-métarge de 17' lui donne un charme qui fonctionne toujours même si le texte de Maurice Pons est tout juste passable et que la technique laisse à désirer (les dialogues sont souvent inaudibles). Mais l'histoire de ce couple harcelé par des gamins, vue aujourd'hui, vaut  surtout pour des raisons sentimentales : les débuts de Truffaut derrière la caméra et ceux de Bernadette Lafont devant. DVD Z1 US

Le silence de la mer (Jean-Pierre Melville, 1948) ***
Admirablement mise en scène par Melville débutant, une adaptation du texte de Vercors (1942) qui réussit la prouesse d'être à la fois une oeuvre cinématographique fascinante (les cadrages, la photo, la voix off, les monologues) et un bouleversant témoignage sur les conflits humains individuels provoqués par l'Occupation, envisagée du côté français et du côté allemand. Souvent négligé, c'est un des grands films de l'après-guerre. BR Fr

Solomon Kane (Michael J. Bassett, 2009) 0
Un film de dark fantasy sur la campagne anglaise des années 1600 en proie aux exactions d'un démon et de ses sbires. Un héros tourmenté à cape et chapeau noirs se lance dans le combat. L'histoire sans enjeu, l'accumulation de clichés, la paresse du scénario et une fin expédiée pimentent au navet cette boursouflure qui prétend à plus qu'elle n'est. L'univers visuel est pas mal mais c'est loin de suffire et on s'ennuie ferme. BR Fr

Populaire (Régis Roinsard, 2012) *
Un film complètement anachronique, sans une once de cynisme, de second degré ou de recherche post-moderne, sur une secrétaire de 1958 poussée par son patron à s'inscrire à des concours de dactylo. C'est coloré et sympa comme tout mais l'écriture manque du mordant ou de la folie qui eussent été nécessaires. Refaire un film de 1958 (il y en a plein des comme ça à l'époque) en 2012 a-t-il un véritable intérêt ? Pas convaincu. BR Fr

Kongen av Bastoy / Les révoltés de l'île du diable (Marius Holst, 2010) *
C'est le "The Magdalene sisters" norvégien. En 1910, dans une maison de redressement pour garçons isolée sur une île, le quotidien de brimades et d'abus de pouvoir mène les jeunes détenus à la révolte. Tiré d'une histoire vraie (c'est ce qu'on nous dit), le film est austèrement esthétique - la neige, la mer, les arbres - et sans surprise mais tient par un bon casting et la fin est puissante. Enfin, on a l'impression d'avoir déjà vu tout cela bien des fois. BR Fr

La grande bellezza (Paolo Sorrentino, 2013) *
J'aurais mis *** si l'héritage fellinien (La dolce vita, 8 1/2, Roma...) n'était pas aussi roublard. L'histoire de ce type mondain entre deux âges qui réalise la futilité de sa vie a été dit de façon insurpassable il y a 50 ans, pourquoi le redire si ce n'est pour filer la roue ? Et la pauvreté de cette conclusion, Mamma mia ! Reste la beauté des images, de Rome et des scènes de danse, d'un exaltant dynamisme. Ciné plein-air (et à Rome, ce qui fait une différence)

Nuovomondo / Golden door (Emanuele Crialese, 2006) ***
Du départ de la ferme à l'arrivée à Ellis Island, le rude voyage d'une famille paysanne sicilienne (et d'une jeune femme anglaise : Charlotte Gainsbourg) candidate à l'émigration aux Etats-Unis dans les annnées 1910. Le petit budget est surmonté par une mise en scène intimiste mais inventive, pleine de scènes surprenantes à la forte connotation réaliste poétique. Un traitement original pour un film qui réussit à émouvoir. BR Fr

Seeking a friend for the end of the World / Jusqu'à ce que la fin du Monde nous sépare (Lorene Scafaria, 2012) 0
C'est un peu le ""Melancholia" de von Trier à l'américaine, sans le génie. Voisins anonymes, Steve Carell (très bon) et Keira Knightley (exaspérante de maniérismes) prennent ensemble la route et apprennent à se connaître alors qu'un astéroïde fonce vers la Terre pour la détruire. C'est un vrai sujet de cinéma mais le rythme anémié, la réalisation insipide et les dialogues uniformément plats empêchent l'histoire et le film de décoller. BR Fr

Les beaux gosses (Riad Sattouf, 2009) 0
Je me suis carrément emmmerdé devant ce film dont je n'attendais pas grand chose mais dont le succès public et critique de l'époque m'intriguait. Une succession de petites scènes monocordes sur le mal-être d'ados ingrats fixés sur les filles dans un bahut de Rennes. A trop vouloir la comédie distancée et cool, tout tombe à plat, notamment l'émotion, étonnamment absente. J'ai vu la dernière demi-heure en accéléré donc 0. BR Fr

27 juin 2013

It's a small world (William Castle, 1950)



La prolifique carrière du réalisateur producteur William Castle (1914-1977), surtout célébré pour ses films d’exploitation à gimmicks de la fin des années 50 et des années 60, recèle des perles méconnues. Avant de connaître le triomphe avec « The Tingler » (1959), il avait commis une série de séries B Westerns, Noirs et Guerre où les limites budgétaires étaient souvent compensées par un savoir-faire qui les surclassait et où l’aspect mélodramatique pointait souvent son nez.


William Castle, qui fut aussi le producteur de "Rosemary's baby"

« It’s a small world »  (1950) est mon préféré de ses films fauchés, courts et nerveux, qui ont bien résisté au passage du temps et qui fusionnent les genres dans d’invraisemblables scénarios piochant partout pour régurgiter leur propre folie.

Celui-ci raconte l’histoire de Harry Musk, un jeune garçon d’une petite ville du Midwest américain qui s’étonne de voir ses camarades de classe grandir et muer alors que son développement à lui semble s’être arrêté et que sa voix fluette ne change pas. Sujet de leurs moqueries et harcèlements, il trouve dans un dico médical emprunté à la bibliothèque municipale le sens du mot « Midget » (« nain ») que le médecin de famille a asséné à ses parents lors d’une consultation traumatisante. Sa prise de conscience de son altérité et son expulsion du domicile (son père ne veut plus le voir suite au diagnostic) est le début d’un chemin de croix jalonné de rencontres peu recommandables (bateleurs, escrocs et putes) qui le conduiront de l’enfance à l’âge adulte dans une spirale d’humiliations, d’exploitations et de larcins.  Pris en sympathie par un ancien soldat au chômage qui ne prête guère attention à son handicap, Harry retrouve confiance en lui et tente de reprendre le droit chemin en se faisant embaucher par une troupe de cirque itinérante dans laquelle travaille une séduisante petite naine…


Le film appartient de plein droit au genre du « coming of age film » pour lequel le cinéma américain a  toujours eu une véritable passion : seules les épreuves individuelles forgent le caractère et la personnalité et permettent l’épanouissement nécessaire à une vie réussie. Ici, la toute petite taille du héros favorise les situations embarrassantes qui sont autant de chapitres de son apprentissage douloureux, notamment auprès des femmes qui lui en font voir de toutes les couleurs. Sa camarade de classe pour laquelle il avait un coup de coeur lui préfère un sportif costaud, son oncle chez qui il se refuge éclate de rire chaque fois qu’il le voit, la belle pépée qui lui laisse espérer une liaison est une prostituée qui lui pique ses économies et s’envoie en l’air dans la pièce d’à côté avec son mac, la bonne mémé russe qui le recueille est une voleuse professionnelle qui l’envoie sur le trottoir faire les poches des bourgeois...


L’exploitation (au sens propre et au sens figuré) est donc au centre de ce film dont l’histoire racontée comme ça peut faire craindre le pire navet. Pourtant, il n’en est rien : William Castle n’avait pas encore versé dans les trucs et gimmicks extérieurs qui désamorçaient la narration au profit de l’effet pour la titillation immédiate du spectateur. « It’s a small world » n’oublie pas l’émotion et les épreuves que traverse courageusement son petit héros sont sincèrement touchantes, comme l’est son amitié durable avec le personnage séduisant du « guy next door », véritable ange gardien qu’il rencontre sur un banc et qui lui offre (métaphore ou pas) un bout de son sandwich en lui donnant une perspective sur la vie. Les scènes finales, dans le décor des coulisses d’un cirque ambulant, tout en sacrifiant au happy end de bon aloi, laissent un goût amer puisque le seul refuge que trouvera Harry Musk contre la violence des rapports sociaux extérieurs semblera n’exister qu’entre les murailles d’une autre société, close sur elle-même sous la loi du qui se ressemble s'assemble.


Dans un rôle qui occupe chaque scène du film, le lilliputien Paul Dale (dont ce fut apparemment le seul film, à part peut-être une figuration dans « Le Magicien d’Oz ») s’en tire très bien, transmettant à l’écran les multiples émotions qui le traversent au fil de ses aventures, de la peine à la colère, de l’abattement à l’espoir. Sa petite voix de canard fait des merveilles dans un moment de grâce complètement inattendu, quand il se lance à la fin dans une chanson entraînante qui donne son titre au film. Son seul public est une jeune employée du cirque, lilliputienne comme lui, dont le physique m’a fait penser à une Lana Turner miniature qui aurait le sourire d’Ann Blyth. Pour quelques instants, le réalisateur mélange les genres en ouvrant au mélodrame social d’« It’s a small world » les portes de l’absurde et de la comédie musicale. Et ça fonctionne.


Bien sûr un film de William Castle reste un film de William Castle et une scène enfonce le clou de l’Exploitation jusqu’à la garde : celle où une énorme matrone au physique de ballon d’hélium accueille le petit homme terrifié chez elle. On sent là que le vieux roublard qu’était le réalisateur se délecte de l’effet obscènement comique des contrastes physiques. Et ça marche, évidemment car c'est un peu pour ça qu'on était venu.


D'un point de vue technique et visuel, le film rengorge de plans intéressants (en plongée, contreplongée, surimpressions, gros plans…) manifestement hérités des exemples du Film Noir sur lesquels Castle avait fait ses armes. Bref, « It’s a small world » est un très bonne surprise, un petit film comme son petit héros mais qui professe sa leçon de tolérance à la différence avec une assurance qui fait plaisir à voir.



J’ai remarqué depuis longtemps que mes films bis préférés mettaient souvent en scène des nains, des nonnes et des nazis. Celui-ci ne fera pas exception à la règle.

"It's a small world" en disponible en DVD Z1 US dans la collection Warner Archive. Image et son excellents. Pas de sous-titres français.

3 juin 2013

Sylvia Lopez Interview

En 1959, François Chalais interviewe la sublime et tragique Sylvia Lopez dans ce rare document télévisé. Je ne l'avais jamais vue ailleurs que dans ses quelques rôles à l'écran (souvent doublée à la voix) et c'est terriblement émouvant de la découvrir et de l'entendre répondre au journaliste. Elle dégage une éducation bourgeoise des beaux quartiers dont je n'avais pas idée. Cette élocution, ce port, ce regard, cette bouche !

Les trois films dont elle parle qu'elle vient de tourner en Italie coup sur coup sont : "Hérode le Grand", "Hercule et la Reine de Lydie" (un chef-d'oeuvre dans le genre "débauche de cheveux, de bijoux, de tout ce qu'on veut") et "Le fils du Corsaire Rouge". Tous sortis en 1959. Chalais donne l'impression de vouloir croire que sa carrière va décoller à l'international. Elle sourit.

Je ne sais pas si elle savait qu'elle n'en avait plus que pour quelques mois. Leucémie. A la fin de l'année, elle ne serait plus. Comme sa tombe l'indique dans l'allée centrale du cimetière Montparnasse : "Sylvia Lopez. 26 ans...".

Merci à Diabolik pour le partage.

Films vus par moi(s) : juin 2013


*** excellent / ** bon / * moyen / 0 mauvais

The World, the Flesh and the Devil / Le Monde, la Chair et le Diable (Ranald McDougall, 1959) * 
Une fable post-apocalyptique hier audacieuse, aujourd'hui infantile, sur deux survivants (un homme noir, une femme blanche) puis trois (un homme blanc) qui cohabitent et se déchirent, seuls au Monde. Le commentaire racial avait du sens en 1959 mais la lourdeur de la démonstration plombe le tout et l'aspiration bourgeoise de la femme frise le ridicule. Il reste de beaux plans de Manhattan désert. Intéressant, mais à titre historique. DVD Z1 US 

Haltéroflic (Philippe Vallois, 1983) **
Lors d'une enquête sur une disparition à Pigalle, un flic fluet et introverti (Serge Avedikian, comme toujours excellent) tombe sous la coupe d'un culturiste grec qui s'entraîne dans une église désafféctée. Le début des années 80 transpire par tous les pores de cette comédie loufoque (et existentielle et musicale) sur l'identité et la fascination. Le style de petit film fauché et insensé qui a aujourd'hui totalement disparu du paysage. DVD Z2 Fr 

Tôkyô monogatari / Le voyage à Tokyo / Tokyo story (Yasujiro Ozu, 1953) ***
Un de mes films préférés. Avec l'âge, cette histoire de parents provinciaux en visite chez leurs enfants à Tokyo résonne de plus en plus fort. La composition des images et la mise en scène font perler l'émotion sans avoir rien à ajouter, si ce n'est la poignante musique qui les accompagne quand il faut. Si les acteurs brillent, Setsuko Hara irradie dans un rôle magnifique. Cette famille japonaise est la nôtre et la tristesse est universelle. BR UK

Vive la France ! (Michel Audiard, 1974) **
Un hilarant pamphlet documentaire sur la France planquée des années 1910 à Pompidou qui monte des images d'archives sur un commentaire d'une ironie destructrice. 14-18, 39-45 et la décolonisation sont les angles d'attaque et comme Audiard était autant antimilitariste que politiquement désabusé, tout le monde sans exception en prend pour son grade. Les bons mots dérouillent le populo, les troufions et les feuilles de chêne. YouTube

L'amour d'une femme (Jean Grémillon, 1954) **
Le dernier film de Grémillon est d'un propos aujourd'hui suranné (un jeune doctoresse arrivée à Ouessant est tiraillée entre son métier et son amour pour un ingénieur italien machiste) mais sans doute audacieux en 1954. C'est la mise en scène, sèche et précise, qui en fait la beauté et la force. Si Micheline Presle est très bien, Gaby Morlay y est inoubliable, notamment dans une magnifique séquence : celle de sa mort près de l'église du bourg. DVD Z2 Fr

Oslo, 31. august / Oslo, 31 août (Joachim Trier, 2011) **
Les deux dernier jours d'un jeune toxico, juste sorti d'un centre de réhabilitation, avant son suicide. L'aliénation physique et mentale aux autres est suggérée par touches impressionnistes et plans subjectifs dans cette adaptation norvégienne actualisée du roman "Le feu follet" de Drieu La Rochelle. Un film désespéré où l'émotion est tenue à distance (mais pas la douleur) et où la culture du Nord iimprègne chaque scène. BR Fr 

Violent Saturday / Les inconnus dans la ville (Richard Fleischer, 1955) **
Fusion de film de braquage et de mélodrame provincial, cette histoire de trois malfrats qui débarquent dans une petite ville minière US pour faire un mauvais coup est l'alibi pour dresser le portrait d'une société empêtrée dans ses frustrations. Le sort fait à ses personnages est discutable (la morale est plus que sauve) mais la mise en scène de Fleischer éblouit par son utilisation magistrale du Cinémascope et de la couleur Deluxe. BR Fr

Tabu / Tabou (Miguel Gomes, 2012) **
Un mélodrame sur un sujet rabâché (le flashback d'un impossible amour adultère dans la savane africaine) dont les choix créatifs (les deux parties bien distinctes, la pictorialité en noir et blanc 1:33, le second mouvement sans dialogues mais avec une voix off, la BO Sixties...) tourne à l'exercice de style risqué. Mais l'originalité assurée de la réalisation et la beauté des images l'emportent. Celle du charismatique Carloto Cotta fait le reste. BR UK

Kôkaku kidôtai 2.0 / Ghost in the shell 2.0 (Mamoru Oshii, 1995/2008) 0
Je ne m'y connais pas en mangas et n'y suis pas sensible. Leur animation partielle de l'image m'agace au plus haut point. Celui-ci, autour d'une Blade Runner féminine en 2029, se prend très au sérieux et m'a cassé les pieds en 30' (je ne suis pas allé plus loin). Les visuels sont parfois intéressants (mais dans la version 2.0 de 2008, les scènes en CGI jurent avec celles en dessin classique) mais je n'y arrive pas, ça ne sert à rien. BR Fr

Derrière la façade (Yves Mirande & Georges Lacombe, 1939) **
L'enquête de deux policiers gentiment concurrentiels sur le meurtre d'une propriétaire d'un immeuble cossu n'est que le prétexte à une succession de scènes avec des numéros d'acteurs célèbres de l'époque, de Michel Simon à Elvire Popesco en passant par Jules Berry et Marguerite Moreno. Tout ce monde, derrière la façade, a ses petits secrets de portefeuille ou d'alcôve. Le genre de film que les années Trente aimaient beaucoup. DVD Z2 Fr

Arrivano i Titani / Les Titans (Duccio Tessari, 1962) **
Un péplum italien sur le mode parodique dans lequel le charismatique Giuliano Gemma (teint en blond) bondit de palais en plage et de ruelle en grotte pour débarrasser la Crête d'un tyran et épouser sa fille. L'action ne faiblit pas, la comédie s'amuse de tous les poncifs du genre et le culturiste guadeloupéen Serge Nubret est spectaculaire en compagnon de route du héros. Un très bon divertissement, sympa et cool comme tout. DVD Z2 Fr

Sapphire / Opération Scotland Yard (Basil Dearden, 1959) ***
Le préjudice racial est dénoncé dans ce film de société typique de la production anglaise de l'époque. Ici, l'enquête sur le meurtre d'une jeune femme noire à la peau blanche révèle les haines raciales de la petite bourgeoisie confrontée à la mixité. Tourné en couleurs dans les rues de Londres et bénéficiant d'un excellent accompagnement jazzy, le film délivre son message désabusé dans une réalisation qui va à l'essentiel. DVD Z2 UK

Leave her to Heaven / Péché mortel (John M. Stahl, 1945) ***
Les articulations mélodramatiques du scénario craquent un peu et le procès alourdit la fin mais plastiquement, ce psycho-thriller en Technicolor est une splendeur. Un triomphe de l'artifice où les personnages (assez falots, l'héroïne et la mère sont les plus intéressants) se déplacent dans une mise en scène au cordeau avec des gros plans de visages scrutant le vide. Gene Tierney est magnétique, évidemment. BR US (une restauration spectaculaire)

Pattes blanches (Jean Grémillon, 1949) ***
Commençant comme un drame réaliste, cette histoire de solitude et de passions frustrées dans un petit port breton prend vite une autre tournure, virant vers un mélodrame existentiel imprégné de poésie fantastique. La vieille qui ramasse ses herbes, la mariée au bord du gouffre, le manoir empaillé, la valse fantasmée... sont des visions inoubliables, hallucinées comme le regard du jeune Michel Bouquet qui y débutait sa carrière. DVD Fr

8 mai 2013

Ray scare and magic

Ray Harryhausen vient de mourir à 92 ans. Ses créatures en stop-motion ont bercé toute ma vie de cinéphile, provoquant la terreur dans mes jeunes années et me faisant tomber sous leur magie poétique à chaque revision d'un des films auxquels il a contribué. Dans la liste des dix films que je chéris le plus, il y a sans doute une place pour "Jason et les Argonautes" (Don Chaffey, 1963), vu et revu sans jamais en épuiser les sensations d'émerveillement. Revoir le géant Talos bouger pour la première fois sur son socle ou les squelettes attaquer Jason en plongée réveille ces terreurs magiques à chaque fois. Saloperies de CGI !



5 mai 2013

Pulchritude


Steve Reeves & Sylvia Lopez