**** chef-d'oeuvre / *** excellent / ** bon / * médiocre / 0 mauvais
Hell's Angels (Howard Hughes & James Whale, 1930) ****
Pendant la Guerre de 14, deux frères anglais aviateurs dans la Royal Flying Corps combattent les Chleuhs tout en étant amoureux de la même femme, Jean Harlow dans son premier grand rôle. Étonnamment passé à l'arrière rang des classiques, un film stupéfiant dans sa mise en scène périlleuse des séquences aériennes - le Zeppelin et le grand combat -, son regard sur les militaires anglais et allemands, son audace pré-Code et son bal en Magicolor. Un siècle plus tard, la "folie" one-shot d'Howard Hughes reste un inaltérable chef-d'oeuvre du cinéma. Quelle redécouverte ! BR US Criterion
L'âge ingrat (Gilles Grangier, 1964) *
Leurs enfants (Marie Dubois et Franck Fernandel) devant se marier, une famille normande va faire connaissance de ses beaux à Marseille. Seule et unique collaboration de Gabin et de Fernandel, une comédie de moeurs jouant entièrement sur les différences culturelles et comportementales des gens du Nord et du Midi. Il y a bien quelques moments rigolos - tous dûs à Fernandel, qui prouve ici à quel point le vieux Gabin était monolithique - et la France de 1964 semble bien naphtalinée mais tout cela tourne vite à vide derrière ses deux stars. Une tentative ratée. DVD FR René Chateau
Le conte du Tsar Saltan / Skazka o tsare Saltane (Alexandre Ptouchko, 1967) ***
Calomniée par ses deux soeurs jalouses, une reine exilée avec son fils se désespère de revoir son époux, le Tsar Saltan. D'après le poème de Pouchkine, un conte magique pétri de culture traditionnelle russe avec boyards et cygnes, gnomes et preux, le tout dans des décors inspirés de la peinture illustrative du 19e siècle. Le dialogue en vers - que le sous-titrage maintient - ajoute à la musicalité du jeu théâtral des acteurs en Sovcolor. Quant à l'aspect efféminé du Tsar et du Prince, "né ni garçon, ni fille" selon les soeurs, il ne cesse d'intriguer. Du cinéma d'imagination pure. BR FR Artus Films
Sinners (Ryan Coogler, 2025) ***
Dans le Mississippi ségrégé de 1932, deux frères jumeaux (Michael B. Jordan) revenus de Chicago montent un club de blues dont l'inauguration est ruinée par l'attaque d'une horde de vampires. Formidablement dynamique dans son écriture et sa mise en scène tout en croisant plusieurs thèmes forts d'histoire et de société, un film d'horror très original sur la prédation des cultures qui réussit à tenir en haleine du début à la fin, à émouvoir, à offrir de superbes moments musicaux et à donner à réfléchir symboliquement : admirable exploit pour un blockbuster. BR BE Warner
Blanche Neige / Snow White (Marc Webb, 2025) **
Blanche Neige. Alors j'ai voulu le voir ce film woko-communiste objet de la fureur réactionnaire d'ailleurs et d'ici et responsable des carrières associées à lui, de la chute de l'empire Disney et de la seconde élection de Trump. Une fois la surprise un peu calculée de la jeune hispanique Rachel Zegler en princesse née un jour de neige et en acceptant l'empowerment à la Jeanne d'Arc du personnage, le film n'est pas si mal pour le jeune public ciblé. Pour les autres, à part les chansons insipides et les gnomes digitaux, c'est une adaptation que je dirais d'intérêt. BR FR Disney
Sans un cri / O fovos (Kóstas Manoussákis, 1966) ****
Dans la plaine de Thèbes, le meurtre d'une fille de ferme par le fils du propriétaire s'impose en secret de famille. Inexplicablement inédit en France jusqu'ici, un chef-d'oeuvre du cinéma grec, conte tragique en clair obscur dont la mise en scène implacable est parsemée de morceaux de bravoure et d'accès de fièvre. Sur des dialogues rares et une bande sonore génialement créative et anxiogène, c'est toute l'idée du regard - des personnages, de la caméra et du spectateur - qui est explorée. Une formidable découverte à soixante ans de distance. BR FR Intersections
Aristote et Dante découvrent les secrets de l'Univers / Aristotle and Dante discover the secrets of the Universe (Aitch Alberto, 2023) **
Au Texas en 1987, deux garçons de seize ans se lient d'amitié et bientôt plus. Un coming of age movie gentiment touchant qui repose entièrement sur le charme tranquille de ses deux personnages et de leurs interprètes (Max Pelayo et Reese Gonzales), le contexte des familles hispaniques et la photographie attractive. Des films LGBTQ comme celui-là, il y en eu et il y en aura des pelles, ce qui fait la différence est la justesse et la sincérité de l'objectif et du propos. Rien de révolutionnaire donc mais les ados concernés peuvent s'y retrouver et c'est bien. BR FR L'Atelier d'Images
Le Géant de la steppe / Ilya Muromets (Alexandre Ptouchko, 1956) ***
La lutte du héros russo-ukrainien Ilya Muromets contre les Mongols à la conquête de Kiev. Un superbe livre d'images en Sovscope et Sovcolor qui évacue toute réalité historique pour une approche légendaire typique des contes slaves, avec magie et dragon. Les compositions grandioses en décors naturels rehaussés de matte paintings empruntent à la peinture et à l'illustration russes et la musique symphonique porte le tout vers l'épique. Le film est aussi une charge contre l'envahisseur d'Asie et une ode aux Rus' de Kiev. Vu aujourd'hui, il peut éclairer une certaine actualité. BR FR Artus Films
Cent francs l'amour (Jacques Richard, 1985) 0
Un jeune photographe fauché qui se fait entretenir par un antiquaire homosexuel (Richard Bohringer qui cachetonne) tombe amoureux d'une strip-teaseuse de peep-show. Retrouver l'ambiance de Paris du milieu des années 80, ses voitures et ses fringues, son "réseau" téléphonique, ses peep-shows, sa rue Sainte-Anne et ses gros billets en francs... est sympathique. Pour le reste, l'histoire poussive, la réalisation amorphe et les acteurs qui semblent ne pas avoir envie du film plombent tout. Dommage pour Pierre-Loup Rajot, toujours bien. Avec Dominique Pinon. DVD FR Studio Canal
Nana (Christian-Jaque, 1955) ****
A Paris sous Napoléon III, une meneuse de revue frivole qui vit de la générosité de ses amants séduit un austère courtisan des Tuileries. Le roman de Zola est adapté de façon très opératique dans ce film d'un dynamisme fou qui passe de la comédie au drame dans un scénario et une mise en scène tourbillonants. Les costumes, les décors et l'Eastmancolor créent le spectacle des yeux, les dialogues brillants de Jeanson celui de l'esprit. Et bien sûr, Martine Carol irrésistible, Charles Boyer magistral et tous les autres à l'unisson. Une oeuvre exaltante. DVD FR René Chateau







