20 septembre 2008

Au Coeur de la Vie (Robert Enrico, 1963)

Sortis en DVD sous le titre La Rivière du Hibou (alors que ces trois courts-métrages avaient été réunis en un long-métrage par Enrico sous le titre Au Coeur de la Vie), voilà une occasion formidable de redécouvrir ces films qui marquent un moment fort et atypique du cinéma français des années 60. Les trois films sont :

Ckickamauga. Un petit garçon part en vadrouille dans la forêt et tombe sur les vestiges du champ de bataille de Chickamauga, qui devient son terrain de jeu. 28 minutes.

L'Oiseau Moqueur. Un soldat en vigie tire dans la nuit sur une forme humaine qui fuit dans la forêt. Pris de remords, il part à la recherche de sa cible. 36 minutes.

La Rivière du Hibou. Un homme est exécuté par pendaison depuis un pont. La corde casse, il tombe dans l'eau et s'enfuit à la nage sous les balles du peloton. C'est le court-métrage qui avait été diffusé (mais un peu raccourci) dans The Twilight Zone aux USA en 1964. 28 minutes.

Trois courts-métrages angoissants, poétiques et universels qui traduisent parfaitement l'esprit des nouvelles morbides d'Ambrose Bierce sur la Guerre de Sécession. A la fois cinématographiques (ils sont plastiquement splendides) et littéraires (effets de rythme et de style très étonnants comme l'utilisation de l'anglais pour les dialogues et du français pour les pensées des personnages), ils ne ressemblent à rien d'autre tout en étant truffés de références à des classiques du cinéma américain (de Naissance d'une Nation à Du Silence et des Ombres en passant par Freaks et La Nuit du Chasseur...) et ils n'ont pas pris une ride en 45 ans. Le meilleur est sans doute La Rivière du Hibou, suivi de près par Chickamauga puis de plus loin par L'Oiseau Moqueur (dont la révélation finale est un peu trop prévisible).

La photographie en N&B est d'une rare beauté, le travail sur le son remarquable et la nature (forêts, champs et cours d'eau) est mise en valeur d'une façon sublime. De toute évidence, La Rivière du Hibou a inspiré pas mal de films fantastiques "à twist" de ces dernières années et une scène complète de Chickamauga a été reprise par Spielberg dans La Guerre des Mondes (la bataille derrière la colline). Ces trois courts ont lancé la carrière de Robert Enrico et sont restés très à part dans son oeuvre. Et ils représentent un rare exemple de cinéma onirique (à la limite du fantastique) français des années 60.

Détail intéressant : les 3 films, dont les histoires se passent aux Etats-Unis pendant la Guerre de Sécession, ont été tournés en France. L'illusion et la reconstitution historique sont d'ailleurs remarquables. J'aimerai bien savoir où le tournage a eu lieu. Je dirai la Dordogne (j'ai cru reconnaître dans L'Oiseau Moqueur un paysage utilisé par Chabrol dans Le Boucher), mais je n'en suis pas certain. Si quelqu'un sait ?

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